Un Ministère Vincentien à l'Organisation des Nations Unies

Un Ministère Vincentien à l'Organisation des Nations Unies

Par Richard Devine, C.M.

Province USA-Est

La C.M. à l'ONU.

Dans son discours à l'Assemblée Générale en juillet 1998, le Supérieur Général, Père Robert Maloney, indiquait que la Congrégation avait entrepris les démarches nécessaires pour “être reconnue par l'Organisation des Nations Unies (ONU) en tant que ONG (Organisation Non-Gouvernementale), pour nous permettre de participer aux nombreuses Commissions de l'ONU qui traitent des questions qui nous intéressent en tant que Vincentiens”. À titre d'exemple, le Père Maloney citait “la pauvreté, la famine, la guerre et la paix, la santé, l'éducation et les droits de l'homme”.

C'est le 21 mai 1998 que la Congrégation a présenté sa demande officielle pour être reconnue par l'Organisation des Nations Unies en tant que ONG, associée au DIP de l'ONU (Département d'Information Publique). Cette demande fournissait à l'ONU une information de base sur la Congrégation: sa structure internationale, ses objectifs, ses moyens de communication, ses agents internationaux, ainsi qu'un panorama de son programme d'activités pour 1998. Du point de vue de l'ONU, l'association des ONG avec le DIP est très utile, précisément parce qu'elle permet une diffusion aussi large que possible des informations concernant l'ONU ainsi que leurs programmes et activités.

Le 2 décembre, le Comité des ONG du DIP a approuvé la demande de la Congrégation d'être associée au DIP. Cette approbation permettait à la Congrégation de nommer deux représentants officiels auprès du DIP. Deux confrères, occupant des ministères à plein-temps dans la Province de l'Est, ont été choisis: le P. Richard Devine, professeur de théologie à l'Université St. John de New York, et P. Joseph Foley, membre de l'équipe du Ministère Hispanique de la paroisse St:François d'Assise de Philadelphie, Pennsylvanie. En tant que représentants officiels de la Congrégation, ces deux confrères ont libre accès à toutes les réunions ouvertes des groupes de l'ONU en tant qu'observateurs. En outre, ils sont invités à assister aux réunions restreintes des ONG, organisées régulièrement le jeudi par le DIP, et auxquelles participent des fonctionnaires, des délégués et autres experts des N.U. Ils reçoivent également, chaque mois, l'agenda des conférences, séminaires, réunions restreintes et autres manifestations de l'ONU.

Pour la Congrégation, la reconnaissance officielle du statut des ONG, nous offre la possibilité de nous impliquer dans des questions qui correspondent à notre mission - telles que le développement économique et social, la construction de la paix, les droits de l'homme. Comme le P. Maloney l'a souligné dans la demande officielle, “notre objectif majeur est de collaborer avec le DIP pour une prise de conscience accrue de la pauvreté dans un certain nombre de pays, et pour aider à la réalisation de programmes visant à éradiquer la pauvreté”. Les représentants de la Congrégation devront apprendre désormais comment tirer au mieux profit des ressources de l'ONU pour atteindre ce but.

De quelle sorte de ministère peut-il s'agir ?

De nombreux confrères - entre autres - éprouvent une certaine difficulté à considérer ce travail à l'ONU comme un ministère. Pour certains, l'ONU n'est qu'une bureaucratie pléthorique. Pour d'autres: un colosse impuissant manifestement manipulé par les grandes puissances au profit de leurs intérêts et au détriment du reste du monde.

De quelle sorte de ministère peut-il, donc, s'agir? Si on commence par prendre quelques-uns des objectifs des programmes les plus importants de l'ONU: éradiquer la pauvreté; mettre fin à la discrimination basée sur la race, la religion, l'âge ou le sexe; promouvoir le développement social et économique de tous les peuples; protéger la nature et l'environnement; arrêter la course aux armements et trouver des solutions pacifiques pour régler les conflits entre les peuples - ces objectifs sont incontestablement en parfait accord avec l'esprit vincentien.

Certains critiquent «l'extrême froideur» qui caractérise souvent la réalisation des objectifs de l'ONU. Il est bien évident que les dimensions de cet organisme international ainsi que ses très nombreux échelons de responsabilité et d'autorité, le rendent parfois lourd et peu maniable. Que de fois ses meilleures intentions sont frustrées par les intérêts particuliers d'Etats membres! Il arrive aussi souvent que ses programmes n'arrivent jamais à bon port faute du support financier adéquat de ceux-là mêmes des membres qui s'engagent à financer ses nombreux projets. Mais, si l'ONU devait disparaître, quelle autre voix serait en mesure de parler à tous les pays du monde de l'éradication de la pauvreté, de la liberté et de l'égalité entre tous les peuples, de l'obligation de promouvoir le développement social de tous: hommes, femmes, enfants, de la paix pour tous les peuples!

L'ONU est une institution humaine très imparfaite. Toutefois, et en grande partie, ses valeurs et ses objectifs sont manifestement en harmonie avec ceux de l'Évangile. Ils font également écho à la sollicitude de saint Vincent de Paul pour les plus pauvres, les plus abandonnés, les exclus. Si la présence vincentienne au sein l'ONU peut, d'une certaine façon, favoriser leur action en faveur des pauvres, alors c'est qu'il y a , là, place pour un ministère vincentien!

Comment fonctionne l'ONU?

Imparfaite ou non, comment fonctionne l'ONU? Beaucoup de personnes n'en ont pas la moindre idée, à moins d'avoir été elles-mêmes en contact avec des activités ou évènements de l'ONU. Si l'ONU est une énorme bureaucratie, ses procédures de base sont, par contre, extrêmement simples. Etant donné qu'un nombre considérable de questions est présenté chaque année à cet organisme international, les cas les plus importants soumis à l'Assemblée Générale sont habituellement transmis à l'un de ses six comités, formés par des agents des diverses délégations nationales.

Les questions qui concernent le désarmement, la prolifération des armes et des méthodes de défense, ainsi que la sécurité internationale en général, sont du ressort du Premier Comité. Naturellement, les conventions internationales concernant les armes et la vérification des procédures, sont également sous la responsabilité de ce Comité

Le Second Comité est focalisé sur les questions économiques et financières. Les questions relatives à l'environnement sont également sous sa responsabilité. Il est donc inutile de préciser qu'il ne “ manque pas de travail sur sa planche”! Des problèmes tels que l'éradication de la pauvreté, la promotion du développement, la coopération technique et économique entre les nations - notamment celles en voie de développement - , sont parmi les thèmes les plus sensibles dont il a à s'occuper. Les questions économiques telles que la corruption financière, les transferts illégaux de fonds et le problème complexe de la dette mondiale, sont, pour ce Comité, des défis à toute solution rapide et facile.

Le Troisième Comité traite des questions qui impliquent les problèmes humanitaires, culturels et sociaux. C'est lui qui répond des accusations pour violation des droits de l'homme. Des exemples courants se réfèrent à des pays tels que le Rwanda, le Myanmar, le Kosovo, l'Iraq et sept ou huit autres nations. Des questions telles que la torture, les punitions inhumaines, le racisme, le droit à l'autodétermination, les réfugiés et les personnes déplacées, retiennent aussi son attention. Il s'intéresse tout particulièrement en outre aux droits des femmes et des enfants, notamment des petites filles. Enfin, ce Comité affronte également des problèmes internationaux tels que la drogue, la criminalité, la corruption et la discrimination, compte tenu de son habilité à organiser la coopération entre les pays.

Le Quatrième Comité examine les questions politiques (qui ne sont pas du ressort du Premier Comité), ainsi que le problème de la décolonisation. Il doit surveiller la bonne application de la Déclaration qui reconnaît l'indépendance des pays et des peuples colonisés. Ce qui explique son intérêt pour un nombre de pays nouvellement indépendants des Caraïbes et du Sud Pacifique. C'est par l'intermédiaire du Quatrième Comité que les N.U. sont intervenues - entre autres - dans le récent conflit concernant l'indépendance du Timor-Est vis-à-vis de l'Indonésie. Des questions telles que l'institution d'un droit international et d'une Cour Internationale de Justice, sont également du ressort de ce Comité.

Le Cinquième Comité s'occupe exclusivement des affaires administratives et budgétaires internes de l'ONU. Il prépare le budget annuel de cet organisme et supervise la répartition des contributions demandées aux États membres. C'est lui qui est également responsable du support financier pour les opérations de maintien de paix dans des pays tels que le Kosovo, Timor-Est et la Sierra Leone.

Enfin, le Sixième Comité s'intéresse aux questions légales internationales. Il partage donc la responsabilité du Quatrième Comité en ce qui concerne le droit international et la Cour Internationale de Justice. Sa juridiction s'étend également sur le programme de l'ONU contre le terrorisme international, sur les relations de l'ONU avec le pays qui les accueille (USA), sur les questions concernant la charte de l'ONU.

Un ministère en cours de développement

Jusqu'à présent les représentants de la Congrégation se sont efforcés de mettre en place un système pour partager leurs connaissances de l'ONU et de leurs travaux avec leurs confrères du monde entier. Pour commencer, ils ont créé, sur Internet, un site d'information ONG. En se connectant avec le site web de la Congrégation, les membres des différentes provinces peuvent s'informer de ce qui se passe dans cet organisme international et comment évoluent ses projets à travers le monde, sur www.famvin.org/cmngo

Le futur s'ouvre sur de nombreuses possibilités. Par exemple, si des occasions se présentent d'influencer la direction qu'entendent prendre les organes de l'ONU en intervenant dans leur processus décisionnel, on tentera sûrement de le faire. La possibilité de plaider activement en faveur des pauvres est également un objectif à long terme. Ce ne sera probablement ni pour aujourd'hui, ni pour demain, mais cela se fera sans aucun doute. D'autres le font. Pourquoi pas nous? Un exemple: une ONG dominicaine a appris, par sa mission au Pakistan, que des villages chrétiens avaient été détruits par des extrémistes fondamentalistes. Compte tenu de cette information directe de leurs confrères sur les lieux, les représentants de la ONG dominicaine ont su combien d'églises avaient été détruites, combien de maisons endommagées, combien d'écoles réduites à des décombres. Une vigoureuse protestation auprès de la délégation pakistanaise de l'ONU - qui ignorait encore l'évènement - donnait lieu à une profusion d'excuses. Pendant ce temps, un haut fonctionnaire du Gouvernement pakistanais allait sur place pour organiser officiellement la reconstruction des villages détruits. Un autre exemple: alors que l'ONU réexaminait leurs programmes en faveur des enfants, la Caritas Internationale, ONG elle aussi, distribuait aux diplomates présents un manifeste où était exposée sa conception chrétienne en matière des familles et des enfants.

Comme les représentants de la Congrégation à l'ONU se familiarisent progressivement avec la façon dont «le travail se fait», ils invitent leurs confrères du monde entier à les contacter au site web CMNGO, avec des suggestions pour leur travail au sein de l'organisme international, et soulignent combien l'ONU peut aider les confrères dans leur travail et être utiles aux personnes qu'ils assistent. Ils peuvent aussi se connecter directement à Internet à. deviner@stjohns.edu et jpfcm@netscape.net.

(Traduction: FRANÇOISE AZEMAR TURCO - AIC Italie)

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