De la dévotion à l'évangélisation. L'Association de la Médaille Miraculeuse d'Espagne

De la dévotion à l'évangélisation

L'Association de la Médaille Miraculeuse d'Espagne

Jesùs Rodriguez Rico c.m.

Directeur National de l'Association

de la Médaille Miraculeuse en Espagne.

La piété et la dévotion envers la Mère de Dieu ont marqué l'Association de la Médaille Miraculeuse, mais souvent, elle s'est limitée à cela, sans notable rayonnement ecclésial et social.

Les journées de Mai, les triduums et les neuvaines qui précèdent la fête liturgique du 27 Novembre sont les temps forts de prière autour de Notre Dame de la Médaille Miraculeuse. En beaucoup des quelques 400 centres qui existent en Espagne, on célèbre l'Eucharistie le 27 de chaque mois pour les associés défunts et pour les familles qui reçoivent dans leurs maisons une statue de la Vierge miraculeuse.

Depuis le Concile de Vatican II et l'exhortation apostolique "Marialis cultus", une mise à jour de la marche de notre Association s'imposait.

Nous ne pouvions continuer de faire ce qu'on a toujours fait. Aujourd'hui, Jean-Paul II nous invite à une nouvelle évangélisation au seuil du troisième millénaire.

En Espagne, les Evêques ont le souci d'évangéliser les divers milieux : les intellectuels, les ouvriers, les jeunes, les personnes éloignées de la vie ecclésiale, les tenants d'un agnosticisme de plus en plus répandu avec toutes les conséquences néfastes sur le comportement personnel et social.

La première chose que nous avons faite pour répondre à ces demandes a été d'organiser une catéchèse des adultes dans les groupes de notre Association. Nous offrons ainsi une formation chrétienne de manière systématique à ceux qui n'ont pas d'autre moyen de cultiver la foi de leur Baptême.

Il existe actuellement plus de 200 groupes de catéchèse d'adultes bien que certains centres n'aient pas décidé d'en créer, faute de catéchistes formés et de préparation.

En vue d'une plus grande efficacité, un Prêtre ou une Fille de la Charité explique le catéchisme aux personnes à qui il reviendra d'éduquer la foi des adultes, d'aller à domicile et non pas dans les églises, afin d'atteindre les exclus qui ne viendraient pas à l'église.

Le Supérieur Général de la Congrégation de la Mission, Robert Maloney, dans un message adressé aux participants du Congrès Marial de l'Escorial, à l'occasion du premier centenaire de la fête liturgique de Notre Dame de la Médaille Miraculeuse, nous demandait d'avoir dans chaque centre de l'Association un lieu de prière, de formation de la foi et de la charité à l'égard des nécessiteux. (1)

Unir la ligne mariale de la Compagnie au charisme vincentien de l'évangélisation des pauvres est à l'origine de ces groupes de croyants que nous préparons à rendre compte de leur espérance en ces temps où les sectes font des ravages parmi les simples et les humbles, les pauvres et les moins cultivés.

A présent, dans les centres, nous encourageons la vie de prière. Nous comptons pour cela avec l'expérience spirituelle des Filles de la Charité et les instructions sur la prière qui sont données dans les différentes villes du pays.

Nous visons à ce que les laïcs aient davantage le sens de la prière comme moyen d'accroître et de fortifier leur foi au milieu des activités et occupations quotidiennes.

Ces groupes de formation chrétienne se réunissent une fois par mois. Certains le font tous les 15 jours. Ils prient avec les Psaumes, méditent quelque passage biblique, partagent leur oraison avec simplicité, écoutent l'explication que leur donne le catéchiste, y participent de manière active, et terminent par une prière de demande en forme de litanie ou quelque chant.

Le but de ces groupes qui se réunissent autour de l'image de la Vierge Miraculeuse est un catéchuménat pour adultes. Néanmoins, nous devons avancer à leur pas, tenant compte de leur âge, de leur culture, de leurs capacités. Toute catéchèse se termine par un engagement.

Les conclusions du Congrès de l'Escorial où il y eut 587 participants de toute l'Espagne appartenant à l'Association de la Médaille Miraculeuse, donnent le ton du comportement solidaire et de la promotion des personnes, cherchant à concilier prière et action, dévotion et engagement de vie en faveur des pauvres et des humbles de notre société, piété et partage des biens de l'Association en faveur des défavorisés dont nous voulons être la voix et que nous désirons défendre face à la situation d'injustice engendrée par une société égoïste.

Visite de la Vierge à domicile

Elle est née à Barcelone il y a 80 ans. Nos Confrères avaient observé que, chaque mois, une image ou une statue de la Sainte Famille passait dans les foyers chrétiens qui la demandaient. Ils eurent l'idée de substituer l'image de la Vierge Miraculeuse à celle de la Sainte Famille.

Des groupes d'une trentaine de familles se sont constitués. Chaque famille reçoit l'image de la Vierge Miraculeuse à un jour fixe de chaque mois.

A la tête de chaque groupe, il y a un ou une responsable qui veille à ce que l'image ou la statue arrive à chaque foyer au jour voulu, la répare si elle est détériorée, recueille les offrandes et les remet au Trésorier ou à la Trésorière de l'Association. Cette personne responsable est le lien entre la Direction du Centre et les familles qui reçoivent l'image.

Cette pratique de dévotion tend à la sanctification de la famille. Un signe religieux entre dans les foyers, les enfants le voient, ils prient les yeux tournés vers la Mère de Dieu, ils se souviendront au milieu des difficultés et des occupations de la vie du caractère religieux de ce signe de leur foi baptismale et de la transcendance.

C'est le jour pour honorer Marie et, par elle, son Fils le Seigneur. Nous insistons donc sur la réception des Sacrements ce jour-là. Nous observons souvent que l'image de la Vierge Miraculeuse est l'unique emblème religieux en de nombreux foyers et malheureusement, le seul lien qui unit ces familles à l'Eglise.

En 1916, le Père Hilario Orzanco, grand apôtre de la Vierge Miraculeuse, commençait à étendre cette pratique par toute l' Espagne. Il se servait des Missionnaires qui l'introduisaient dans les villages en mission comme un moyen de persévérance des fruits de la Mission. (2) Il se servait aussi des Filles de la Charité qui avaient la haute main sur la Bienfaisance d'Etat ainsi que d'autres responsabilités dans les villes et villages d'Espagne.

Depuis 1916, l'Association de la Médaille Miraculeuse est étroitement liée à la visite de la Vierge à domicile et s'établit par tout le pays.

Plus tard, les Prêtres de la Mission et les Filles de la Charité ont diffusé cette pratique dans les pays hispano-américains et ont constaté sa force de rassemblement parmi les simples, les humbles, les pauvres et les exclus.

Les offrandes recueillies dans le tronc qui accompagne l'image, la Direction de chaque centre local les destine au culte, à l'apostolat, à la charité pour les nécessiteux (3) à la formation des associés, (4) et contribue aux cinq oeuvres d'Eglise : Domund, Caritas, Lutte contre la Faim, Journée de l'Eglise diocèsaine et Journée du Séminaire.

Nous coopérons aussi à nos missions "ad gentes" et aux Volontaires de la Charité. (5)

Il ne convient pas de thésauriser les offrandes sans les employer selon les urgences qui se présentent, de façon qu'à la fin de l'année, le solde en soit peu important et qu'il ne soit pas nécessaire de le déposer à la banque.

Les comptes bancaires ne sont pas sans risques avec les Finances Publiques. En usurpant notre code d'identification fiscale et sous-couvert d'une association d'Eglise, une fraude fiscale peut être commise ou le blanchissement d'argent sale. L'Eglise, la Compagnie et l'Association seraient mêlées à un scandale, éclaboussées par les médias. On aurait abusé notre bonne foi par l'usage frauduleux de notre code d'identification fiscal.

Pour cela, il convient de donner la signature des comptes bancaires à plus de personnes qu'il n'est nécessaire, selon les dispositions juridiques et commerciales de chaque pays.

Le Supérieur Général Richard McCullen m'avait conféré les pouvoirs pour disposer des fonds de l'Association de la Médaille Miraculeuse en Espagne. (6) Depuis, il a également donné la signature à un autre Confrère (7) afin que les affaires soient bien en ordre, en cas d'accident ou de mort subite, et pour ne pas perdre les fonds de l'Association à la mort du titulaire du compte bancaire.

Insertion dans les paroisses et la pastorale diocésaine

L'Association de la Médaille Miraculeuse étant une association publique dans l'Eglise (8) ne pourra pas rester fermée sur elle-même. Si elle agit au nom de l'Eglise (9) et reçoit de la Hiérarchie le mandat d'être présente au monde et de sanctifier l'ordre temporel (10), elle doit être en communion avec les Eglises locales où elle est implantée et avec ses pasteurs. (11) Actuellement, l'Association est canoniquement érigée en 62 des 67 Diocèses espagnols, y compris le Diocèse aux Armées.

Nous commençons par proposer les associés à leurs Curés respectifs comme catéchistes, animateurs du culte, agents de pastorale caritative et sociale. Nous les intégrons à la Caritas paroissiale et à la visite des malades.

En 1992, Nous avons élaboré un premier plan pastoral de notre Association pour les années 1993-94. Nous avons axé notre attention sur la redécouverte et le véçu de la foi baptismale ainsi que sur le service gratuit des pauvres.

Ce plan pastoral devait s'adapter aux lignes pastorales de chaque diocèse, aux projets des paroisses où nous sommes intégrés et où nous voulons servir l'Eglise selon notre charisme propre.

La réaction de Messieurs les Curés fut encourageante. Ils comprenaient que nous ne voulions rien d'autre que nous intégrer à la pastorale générale de l'Eglise locale et servir leur paroisse sans rien attendre en échange; que dans notre Association on pourrait trouver des personnes pour le ministère prophétique (surtout catéchèse des adultes et des exclus) liturgique (animation du culte eucharistique) et caritatif (malades et nécessiteux).

Comme les offrandes de l'Association tournent au bien de la paroisse ou de la localité où elle est établie, il y eut peu de résistance de la part des Curés, même si, malheureusement, il y en a encore un peu.

Il y a quelques mois, nous avons élaboré un deuxième plan pastoral de l'Association pour les années 1995-96. Avec le précédent, il suppose un pas en avant dans l'engagement pour la promotion des personnes, l'aide aux nécessiteux et la solidarité dans la lutte contre l'injustice.

Il n'est que l'exposé systématique des conclusions du Congrès Marial de l'Escorial en 1994.

Le 15 août 1994, année du centenaire de la fête liturgique de Notre Dame de la Médaille Miraculeuse, nous avons organisé un pèlerinage des associés à Lourdes et à Paris, à la chapelle des apparitions de la Vierge à Sainte Catherine Labouré en 1830. Ce fut un jour historique où nous fûmes plus de 700 pèlerins. Nous fûmes accueillis et salués par le Supérieur Général de la Congrégation de la Mission et par la Supérieure Générale des Filles de la Charité dont c'était la fête.

Aspects juridiques

Bien que cela puisse étonner, le liant qui doit assurer l'avenir d'une association de fidèles n'est pas seulement le charisme qui lui a donné l'impulsion, mais aussi le support juridique nécessaire pour que les Evêques diocésains puissent l'approuver, qu'elle fonctionne convenablement et résiste au temps.

Le charisme de l'Association de la Médaille Miraculeuse est d'honorer Marie Mère du Seigneur dans le mystère de son Immaculée Conception. (12) Ce sera donc l'âme et la vie qui donne vigueur à ses membres. La base juridique aidera à perpétuer ce charisme, à le concrétiser dans les diverses circonstances de la vie chrétienne des associés, à adapter l'Association aux temps nouveaux.

C'est le Supérieur Général de la Congrégation de la Mission qui crée les centres de l'Association de la Médaille Miraculeuse du fait qu'elle jouit du Privilège Apostolique (13) c'est-à-dire qu'elle est confiée par le Pape au Supérieur Général d'un Ordre ou d'une Congrégation Religieuse. Néanmoins, il fut un temps où, par disposition de l'Assemblée Générale de la Congrégation de la Mission, le Supérieur Général délégait cette faculté aux Visiteurs pour leurs provinces respectives et au Supérieur local pour sa maison. Le Visiteur pouvait sous-déléguer un missionnaire pour sa Province. (14)

Actuellement, et pour être plus opérationnel, le Père Richard McCullen, étant Supérieur Général, m'a donné pouvoir écrit d'ériger des centres et de signer les patentes d'érection de l'Association dans tout le territoire espagnol. (15)

Néanmoins, l'autorisation écrite de l'Evêque diocésain est nécessaire pour l'érection canonique d'un nouveau centre de l' Association. (16) Quelques Evêques, invoquant le canon 312 § 2, disaient qu'il suffisait d'avoir une maison de la Congrégation ou des Filles de la Charité en son diocèse pour que l'Association commence à exister comme oeuvre propre de l'Institut.

A ce sujet, je voudrais rappeler le rescrit pontifical "Dilectus Filius" de Saint Pie X, adressé au Père Antoine Fiat c.m. et à ses successeurs dans le généralat de la Compagnie, lui confiant personnellement ce pouvoir et non à toute la Congrégation de la Mission. (17) Le moins qu'on puisse dire, c'est que cette mission fait de l'Association un champ de travail pour les missionnaires et comme elle est confiée au Supérieur Général de la Congrégation de la Mission, nous devons lui donner un caractère vincentien. Et que dire s'il s'agit de l'ériger dans les paroisses tenues par des prêtres diocésains ou par des religieux ? L'autorisation écrite de l'Evêque diocésain est nécessaire. (18)

Il est important de garder dans les archives de la curie provinciale et de la curie générale les photocopies conformes et légalisées devant notaire civil ou ecclésiastique, aussi bien du décret de l'Evêque diocésain autorisant en son diocèse la création de l'Association que les décrets d'érection signés par le même Prélat relatifs à chacun des centres existant dans son diocèse.

Le processus juridique sera le même si c'est la Conférence épiscopale qui procède à l'érection canonique de l'Association. C'est le Supérieur Général qui érige, mais le consentement de la Conférence épiscopale est requis. En Espagne, la Conférence m'a demandé de présenter l'approbation de 12 Evêques diocésains afin qu'il soit accordé au Supérieur Général le droit d'établir l'Association dans tout le territoire national. (19)

Avec ces approbations ecclésiastiques, nous avons donc bien la personnalité juridique et canonique d'une Association. (20)

De ces décrets, il convient aussi de faire deux photocopies conformes et légalisées devant notaire civil ou ecclésiastique pour les garder dans les archives de la curie provinciale et de la curie générale.

Il est utile d'obtenir la personnalité juridique civile. Pour ce faire, on s'inscrit dans le Registre des Associations religieuses du Ministère de la Justice, s'il en est ainsi dans la législation de l'Etat, ou dans le Registre des Associations civiles du Ministère de l'Intérieur ou du Gouvernement. (21)

Avec la personnalité civile, l'Association devient sujet de droits et de devoirs devant l'Etat, et peut acquérir, posséder, administrer et aliéner des biens.

Le plus important est peut-être que, par cette démarche juridique civile, nous sommes en mesure de demander au Ministère de l'Economie un Code d'identification fiscal et d'être intégrés à la Sécurité Sociale du pays au titre d'une petite entreprise afin que nos employés bénéficient de la couverture sociale : assistance sanitaire et pharmaceutique, pension de maladie, d'accident ou de retraite. (22)

J'insiste à nouveau: De tous les documents, il convient d'avoir deux photocopies conformes et légalisées devant notaire civil ou ecclésiastique pour les archives de la curie provinciale et de la curie générale. L'histoire se fait avec des documents écrits.

Il reste à dire que des Statuts sont nécessaires pour toutes ces démarches tant dans le cadre ecclésiastique qu'au civil. (23)

Nous en avons fait qui ont été approuvés par le Père McCullen le 31 janvier 1986 pour commencer à faire les premiers pas qui convenaient.

En cette année 1995, nous avons prévu de faire de nouveaux Statuts, de rénover le Bulletin de l'Association et de préparer la catéchèse des adultes de manière systématique.

(Traduction : Joseph Benoit c.m.)

1 A Rome, le 7 avril 1994.

2 XXVIe Assemblée Générale C.M. de 1902, Décret 553, Secundum Supplementum, p. 3.

XXIXe Assemblée Générale C.M. de 1931, Décret 630, Cuartum Supplementum, p. 4.

3 C. 1254, § 2 et 114, § 2.

4 C. 329.

5 C. 328.

6 A Rome, le 15 mars 1986.

7 A Rome, le 29 octobre 1988.

8 C. 301, § 3.

9 C. 313.

10 C. 298, § 1.

11 C. 311.

12 A.A.S., T. I, n_ 17, pp. 669-671, art. 1. Rescripto Dilectus Filius.

13 C. 312, § 1, n_ 3.

14 Décret 38 de la XXXIIe Assemblée Générale C.M., 1855. Nova Series Post Approbatas Constitutiones, p. 10.

15 A Rome, le 15 mars 1986.

16 C. 312, § 2.

17 A.A.S., T. I, n_ 17, pp. 669-671.

18 C. 312, § 2.

19 Le Décret d'Erection du Supérieur Général de la C.M. a été signé à Rome le 19 décembre 1986. Celui de la Conférence Episcopale Espagnole a été signé à Madrid le 23 février 1987 .

20 C. 114, § 1 et 313.

21 Notre Association l'a obtenu le 8 mai 1987.

22 C. 1 286, § 1.

23 C. 304.