Etat de la Congrégation de la Mission, juillet 1998

Etat de la Congrégation de la Mission,

Juillet 1998

Robert P. Maloney, C.M.

Supérieur Général

Introduction

Nous commençons cette Assemblée dans les dernières années du second millénaire. Déjà, nous pouvons voir des signes à l'horizon qui sont le présage de l'aube du troisième. Aujourd'hui, nous jetons un regard en arrière et en avant, avec cette confiance que le Royaume de Dieu est vraiment ici au milieu de nous. Pour les Chrétiens la présence du Royaume possède un sentiment merveilleux d'urgence: «Je vous le dis, les temps sont accomplis » écrit Paul.» Maintenant que ceux qui sont mariés vivent comme s'ils ne l'étaient pas, que ceux qui pleurent comme s'ils ne pleuraient pas, ceux qui sont dans la joie comme s'ils ne l'étaient pas, ceux qui achètent comme s'ils ne possédaient pas ce qu'ils ont acheté, ceux qui usent des biens de ce monde comme s'ils n'en usaient pas. Car ce monde, tel qu'il est, ne durera plus longtemps. ( Cor 7, 29-31)

Les théologiens ont tenté de décrire la nature paradoxale du Royaume en disant qu'il est «déjà là», mais «pas encore” entièrement. Ses énergies sont au travail parmi nous maintenant par la puissance du Seigneur ressuscité, mais il tend vers sa plénitude lorsque toutes choses seront récapitulées dans le Christ.

Cette tension entre le «déjà là» et le «pas encore» place l'Eglise dans une position paradoxale par rapport au temps. Elle adhère au passé, avec sa riche tradition mais elle n'y est pas enchaînée; au contraire elle le développe, servant d'intermédiaire entre la parole de Dieu et les événements du monde actuel. Elle est attentive au présent mais n'est pas contrainte par ses exigences; au contraire elle est continuellement en train de discerner ce qui vient de Dieu et va dans le sens de la promotion humaine de la personne, mais aussi ce qui est péché et en définitive nous détruit. Elle attend le futur, mais sans angoisse; au contraire elle attend la venue du Seigneur avec confiance, sachant que «ce que nul homme n'a jamais vu ni entendu, ce à quoi nul homme n'a jamais pensé, Dieu l'a préparé pour ceux qui l'aiment.» (1 Cor. 2,9)

Aujourd'hui je vous demande de jeter brièvement un regard en arrière avec moi, plus spécialement sur ces six dernières années, de telle sorte que nous puissions mieux nous comprendre nous-mêmes. Ensuite, je vous demanderai de regarder vers l'avant pendant cette Assemblée de telle sorte que nous puissions nous lancer dans une mission qui soit renouvelée et vivante.

I.Quelques statistiques

Quand saint Vincent mourut, la Congrégation comptait seulement 225 membres. Combien sommes-nous aujourd'hui? Sommes-nous en train d'augmenter ou de diminuer? Quelle est le vrai visage de la Congrégation?

J'ai demandé au Secrétaire Général, le P. Emeric Amyot d'Inville, qui connaît les données mieux que moi, de vous en présenter la situation sur le plan statistique. Ces données nous aiderons à voir la réalité changeante de la Congrégation. Il est clair que les provinces qui se développent le plus rapidement sont souvent celles qui ont le moins de ressources économiques .

II.Nouvelles missions internationales

A la mort de saint Vincent, la Congrégation avait déjà une dimension internationale, étant sortie de France pour aller en Pologne, en Italie, à Madagascar, en Irlande, en Ecosse, aux Hébrides et aux Orcades. A ce jour, nous avons 50 provinces et vice-provinces, et beaucoup d'entre elles ont des missions à l'étranger. En fait, nous encourageons chaque province à mettre en route une mission, ou au moins à participer à l'une d'entre elles si possible. Quelques provinces ont même mis trois ou quatre missions en route.

Lors de la dernière Assemblée Générale, en 1992, deux des engagements que la Congrégation avait fait concernaient les missions ad gentes (§ 5 et § 6), comprenant l'ouverture d'au moins un projet missionnaire en Europe de l'Est. Durant ces six dernières années, de nombreux confrères se sont portés volontaires pour aller dans des endroits nouveaux, généralement très pauvres, et les Visiteurs ont été très généreux en faisant le sacrifice de les laisser partir. Le résultat est que nous avons été capables d'envoyer des équipes missionnaires en Albanie (1993), à Mbinga en Tanzanie (1993), à Honiara dans les îles Salomon (1993), en Chine (1994), à El Alto en Bolivie (1994), à Xai-Mai au Mozambique (1994), à Quarks en Ukraine (1995), à Niznij Tagil en Russie (1997), à Ruhengeri au Rwanda (1998). Des volontaires sont également allés renforcer des missions déjà existantes à Cuba, au Mozambique, en Ethiopie et en Algérie. Souvent dans ces missions nous travaillons côte à côte avec les Filles de la Charité; quelquefois, ce sont les Filles de la Charité qui étaient là avant nous, comme au Rwanda, et nous y allons précisément pour les accompagner.

Les choses n'ont pas toujours été faciles dans ces missions. En fait l'inculturation a été quelquefois difficile. Les missionnaires devaient apprendre de nouvelles langues et s'habituer à des coutumes nouvelles et à des conditions physiques dures. Certains n'ont pas été capables de s'habituer, mais la plupart l'ont été. Leurs lieux sont souvent très reculés, comme en Sibérie, El Alto, Mpepai ou les Iles Salomon; quelques-uns sont en outre très dangereux comme au Rwanda et en Algérie.

Ce ne sont pas les seules nouvelles initiatives missionnaires. Je suis heureux de dire que les provinces, même celles qui diminuent en personnel, continuent d'ouvrir de nouvelles missions, à la fois dans et à l'extérieur de leurs propres territoires, et beaucoup aident les missions financièrement. Presque toutes nos provinces ont entrepris une sérieuse révision de leurs oeuvres de manière à être plus clairement et effectivement au service des pauvres.

III. Les Missions populaires

Au cours de ces dernières années, il y a eu également des efforts significatifs pour renouveler les missions populaires. De tels efforts ont souvent franchi les frontières provinciales et même nationales. Ces missions renouvelées possèdent les caractéristiques suivantes:

a) un temps de préparation important (la pré-mission),

b) l'organisation et l'entraînement d'une équipe missionnaire, en général avec la participation de plusieurs prêtres, diacres, soeurs, frères et des laïcs, hommes et femmes,

c) une durée suffisamment longue dans le territoire de la mission (le temps varie),

d) une Catéchèse et une réflexion sur la parole de Dieu dans des petits groupes,

e) l'implication du clergé local et des laïcs dans la mission elle-même,

f) l'organisation de groupes caritatifs sur le territoire de la mission,

g) le suivi.

IV. Formation du clergé diocésain

A l'Assemblée Générale de 1992, dans sa réflexion sur l'état de la Congrégation, le Père McCullen avait exprimé le désir d'une plus grande présence vincentienne dans cet apostolat qui est si important pour le renouvellement de l'Eglise aujourd'hui.

Je suis heureux de dire que notre présence dans la formation du clergé diocésain à augmenté au cours de ces six années passées. Quelques-unes de nos nouvelles missions ont précisément pour but d'aider à la formation du clergé diocésain. Aujourd'hui la Congrégation continue à diriger un certain nombre de séminaires où les prêtres diocésains sont formés: à Plaisance et Gênes en Italie, à All Hallows en Irlande, à Gdansk en Pologne, à Popayan, Arauca, Ibagué, Inza, Betel, San Vicente del Caguan, Restrepo et Vereda Minas Belalcazar en Colombie; à Chongoene au Mozambique; à Adélaïde en Australie, à Curitiba au Brésil, à Malang en Indonésie et à Honiara dans les Iles Salomon. Des confrères de pays différents travaillent aussi dans des Séminaires, tenus par d'autres, pour la formation des prêtres diocésains (ex.: aux Etats-Unis, aux Îles Fidji, au Nigéria, en Pologne, en Biélorussie, en France, au Mozambique, aux Philippines et dans beaucoup d'autres pays). De plus, ils travaillent dans des universités qui proposent des programmes de formation sacerdotale (ex.: à l'Université St John's aux Etats-Unis et à Belo Horizonté au Brésil.)

V. La Famille Vincentienne

Aujourd'hui, nous sommes témoins d'un nouvel enthousiasme à propos de la Famille Vincentienne. Je peux seulement dire, comme saint Vincent l'aurait fait, que c'est la Providence qui l'a permis. Quand j'ai rendu visite à Mexico avec le Vicaire Général il y a quatre ans, j'ai été très fortement frappé par la coopération étroite entre les différentes branches de notre famille. En revenant ici, nous en avons discuté au Conseil Général et pris la décision de réunir pour la première fois les responsables des principales branches de notre famille. Beaucoup de choses se sont passées depuis. En fait, la Famille Vincentienne et sa mission sont le thème de cette Assemblée Générale. Le Vicaire Général, le P. José Ignacio Fernández de Mendoza, ainsi que le P. Lauro Palú, qui est l'Assistant responsable des contacts avec les différents groupes de laïcs de notre famille, nous en parleront longuement dans quelques jours, aussi je n'en dirai pas plus aujourd'hui

VI. Formation continue

Qu'en est-il du développement personnel des confrères? Continuent-ils à se renouveler personnellement, à lire, réfléchir, changer?

Nos Statuts (n° 42) demandent aux provinces de mettre en oeuvre des programmes de formation continue, aux plans personnel et communautaire. Quelques provinces ont des programmes de formation très bien organisés. Des programmes interprovinciaux ont également été mis en place de manière novatrice au cours de ces six dernières années par les différentes conférences des Visiteurs. Je vais mentionner ici quelques-uns des projets les plus significatifs entrepris à un niveau international.

Pour développer la formation continue des confrères, nous fait avons un Mois Vincentien en 1993 sur le thème de notre dernière Assemblée Générale: «Nouvelle évangélisation, hommes nouveaux, communautés renouvelées«. Des confrères de toutes les provinces sont venus pour y participer.

En 1994, nous avons mis en route le Centre International de Formation (C.I.F.: Saint Vincent de Paul). Deux sessions ont lieu chaque année avec 20 à 30 participants à chaque fois. Notre intention est que tous les confrères âgés de 30 à 50 ans puissent y participer. Les évaluations ont été très positives. Le P. John Rybolt est ici. Il vous en parlera un peu plus tard dans cette Assemblée et répondra à vos questions .

En 1996, nous avons publié une Instruction sur la Stabilité, la Chasteté, la Pauvreté et l'Obéissance dans la Congrégation de la Mission .Elle est maintenant utilisé comme document de base pour les programmes de formation continue dans de nombreuses provinces. Je suis très reconnaissant au Vicaire Général, aux PP. John Prager, Jaime Correra, Léon Lauwerier, Hugh O'Donnell, Miguel Pérez Florez et Benjamin Romo pour leur collaboration dans la réalisation de ce projet.

En 1996, nous avons fait une réunion de tous les Visiteurs à Salamanque pour parler de l'inculturation du charisme vincentien et d'une série d'autres sujets pratiques que les Visiteurs pensaient pouvoir être utiles. Des thèmes semblables ont été discutés à la rencontre de la COVIAM à Kinshasa, en 1994.

En 1997, nous avons organisé un autre mois Vincentien sur les Missions Populaires. de nombreux confrères de diverses provinces y ont participé, ainsi que des Filles de la Charité, des laïcs, hommes et femmes, qui travaillent avec nous dans nos équipes missionnaires. Les évaluations ont été très positives.

Au début de cette année 1998, nous avons organisé la première rencontre des nouveaux Visiteurs et présenté le Guide Pratique du Visiteur qui, nous l'espérons, sera très utile pour ceux qui sont nommés à cet office. La plus grande partie du travail de ce Guide Pratique a été réalisée par les PP. Miguel Pérez Flores, Joseph Levesque et Yves Danjou auxquels nous sommes très reconnaissants.

VII. La prière

Saint Vincent disait: «Donnez moi un homme d'oraison et il sera capable de tout.« Est-ce que j'estime la prière dans la Congrégation?

Durant mes visites dans les provinces, j'ai eu le sentiment que les confrères priaient avec foi. Occasionnellement, trop d'importance est donnée au travail au détriment de la prière. Mais la plupart sont admirables dans leur engagement envers les deux. En prenant en considération notre prière communautaire, plus particulièrement la prière des Laudes et des Vêpres, j'ai le sentiment que des progrès ont été faits, bien qu'on pourrait faire davantage pour qu'elle soit mieux préparée, plus belle et moins mécanique. Pour nous y aider, nous avons créé une Commission sur la Prière qui a commencé à se retrouver en 1993. Nous devons beaucoup de reconnaissance à ses membres: les PP. John McKenna, Manuel Nobrega, Urban Osuji, Bernard Schoepfer et Luis Alfonso Sterling. Le but de cette Commission était de nous aider à renouveler notre prière commune. J'ai demandé qu'elle soit guidée par les principes suivants en ce qui concerne notre prière communautaire:

a) Elle doit être belle;

b) Elle doit être simple;

c) Elle doit être en accord avec la prière de l'Eglise;

d) Elle doit être marquée par la tradition Vincentienne;

e) Elle doit être souple (adaptable à des situations différentes)

Cette commission a réalisé un Livre de Prière Vincentien provisoire. Elle a déclaré de façon très claire que ce livre ne devait pas être une «editio typica« à traduire ou à suivre servilement, mais qu'elle était simplement un exemple de ce qui pouvait être fait en d'autres langages et cultures. L'intention n'était pas de remplacer la Liturgie des Heures de l'Eglise, qui demeure le cadre dans lequel nous prions généralement, mais plutôt de fournir une autre option, plus spécifiquement vincentienne, qui pourrait être utilisée en des occasions variées.

Un certain nombre de provinces ont relevé le défi de travailler à développer des formes de prière communautaire vincentienne, adaptées à leur propre langue et culture. Les résultats de leur travail sont exposés ici à l'Assemblée. Au mois du mois de septembre prochain, ses résultats seront évalués et ensuite la Commission se rencontrera une nouvelle fois pour discuter de la prochaine étape .

VIII. Les moyens de communication

Quand saint Vincent mourut il fallut des mois et des mois pour que la nouvelle soit connue. Des confrères lui écrivaient encore alors qu'il était mort depuis six mois. De nos jours les nouvelles se répandent instantanément grâce aux moyens de communication modernes. Est-ce que nous utilisons bien les nouveaux moyens de communication?

Oui, jusqu'à un certain degré, mais j'espère que nous pourrons faire beaucoup plus dans l'avenir.

En fait, il y a quelques années nous avons mis en place une Commission sur l'usage des Média. Je suis très reconnaissant envers ses membres: les PP. Victor Bieler, Victor Groetelaars, Lourenço Mika, Attilio Mombelli et Augustin Towey. Elle a fait du très bon travail, mais nous avons trouvé certaines de ses propositions trop chères pour l'instant et nous avons pensé que les dépenses ne seraient pas proportionnées aux résultats. Mais, qu'est-ce qui a été fait?

Récemment, j'ai demandé à toutes nos provinces d'équiper le bureau du Visiteur et la principale maison de formation de l'Internet avec courrier électronique. Cela nous permettra de communiquer très rapidement avec tous les Visiteurs et toutes les maisons de formation. Cela nous permettra aussi d'envoyer des articles et autre matériel de formation utiles aux maisons de formation, en espagnol, français et anglais, et de faciliter les échanges de ce matériel entre eux .

Pendant cette Assemblée Générale nous disposons d'un Site Internet, «Famille Vincentienne », et nous y mettons de fréquents bulletins. Cela permet aux confrères du monde entier de savoir régulièrement ce qui se passe ici. Un certain nombre de provinces possèdent déjà leur propres site. Ici, à la Curie Générale, nous recevons et envoyons une grande quantité de messages chaque jour par courrier électronique (e-mail).

Nous faisons également une Vidéo de l'Assemblée Générale qui, nous l'espérons, sera utile aux Visiteurs pour en communiquer les résultats d'une manière plus concrète aux confrères de leurs provinces.

Les membres du S.I.E.V. ont réalisé, entre autres choses, un disque compact contenant les écrits de saint Vincent en plusieurs langues, ainsi que beaucoup d'autres choses intéressantes. Une version provisoire est disponible ici pour ceux qui la voudraient.

IX. Recherche les causes de la pauvreté

Vous vous rappelez qu'en 1986 le Pape Jean Paul II nous a donné un grand défi:

Pères et Frères de la Mission, plus que jamais recherchez, avec courage, humilité et compétence les causes de la pauvreté et encouragez des solutions à court et long terme; des solutions adaptables et concrètes. En agissant ainsi, vous travaillerez à la crédibilité de l'Evangile et de l'Eglise (Osservatore Romano, Edition Anglaise, Août 1986 p. 12)

Quelques pas importants ont été réalisés dans ce sens, bien que je voudrais que nous fassions davantage. L'Université St. John's, à New York, a mis sur pied un centre pour l'Eglise et la Société avec pour but de rechercher les causes de la pauvreté et de proposer des solutions à long et à court terme. Elle a un site intéressant sur Internet.

Récemment, nous avons commencé à demander une reconnaissance auprès des Nations-Unies en temps qu'ONG ( Organisation Non-Gouvernementale) de telle sorte que nous puissions participer aux nombreuses commissions des Nations-Unies qui traitent des questions qui nous intéressent, nous Vincentiens, tel que la pauvreté, la famine, la guerre et la paix, la santé, l'éducation et les droits de l'homme. Notre procédure de demande est maintenant terminée et nous attendons les résultats, qui ne nous arriveront pas avant décembre prochain. Dans ce domaine, nous avons beaucoup appris de l'A.I.C. (Association Internationale de Charité), qui est très bien organisée dans ces relations avec les Nations-Unies, la Communauté Européenne et d'autres organisations internationales.

X. Les finances

Tout cela coûte beaucoup d'argent. Comme vous le savez, saint Vincent voulait que nos travaux aient une solide base financière. Alors, quel est l'état financier de la Congrégation ?

Plus tard dans la journée, l'Econome Général, le P. Pat Griffin, expliquera notre situation financière et sera à votre disposition pour répondre à toutes vos questions .

Conclusion

Mes frères, être pleinement vivant cela veut dire regarder en arrière et regarder en avant, regarder à l'intérieur et regarder au dehors. Le regard en arrière c'est l'histoire. Regarder en avant c'est l'espérance. Regarder à l'intérieur c'est méditer avec un désir de conversion. Regarder au dehors c'est la mission, avec le désir de créer une vie nouvelle.

Aujourd'hui, nous avons porté notre regard vers arrière, spécialement sur ces six dernières années, dans le but d'évaluer l'état de la Congrégation. Dans les jours qui viennent je vous demande de regarder en avant pour envisager de nouvelles possibilités.

C'est un thème que le prophète Isaïe aime à répéter. Le prophète déclare: «Voyez, je fais des choses nouvelles, elles sortent de terre. Ne les voyez vous pas? Je vais tracer un chemin dans le désert, des sentiers dans les endroits sauvages« (Isaïe 43,19-20). Isaïe exprime la promesse de Dieu: «Voici que je crée des cieux nouveaux et une terre nouvelle. Les événements du passé vont être oubliés, ils ne reviendront plus à la mémoire. Je vais créer fête et joie« (Isaïe 65, 17-18a).

Isaïe voit que ses prophéties sont en train de se réaliser. Remarquez que c'est précisément la perspective de Jésus dans le texte qui est fondamental pour notre communauté. Dans la Synagogue de Nazareth, Jésus déroula le livre et lut les paroles du prophète Isaïe: «L'Esprit du Seigneur est sur moi. Il m'a consacré pour annoncer aux pauvres la Bonne Nouvelle» (Lc 4, 18). “Aujourd'hui» ajoute Jésus «ce passage de l'Ecriture est en train de s'accomplir» (Luc, 4, 21). Jésus nous dit qu'aujourd'hui les prophéties d'Isaïe sont en train de se réaliser .

Je puis vous assurer que j'ai vu cela à maintes reprises pendant mes visites aux provinces. J'ai vu les signes du Royaume aujourd'hui. J'ai vu dans notre Famille Vincentienne des hommes et des femmes qui sont remplis de l'Esprit du Seigneur et qui répandent cet Esprit par leur amour, leur compassion, leur enthousiasme, leur paix. J'ai vu des prisonniers libérés grâce à d'innombrables programmes de promotion humaine intégrale, délivrés du péché, délivrés de l'oppression, délivrés de l'ignorance. J'ai été témoin d'aveugles retrouvant la vue grâce à des opérations réalisées dans des hôpitaux tenus par les Filles de Charité, ou grâce à des programmes à l'intention des aveugles dans nos écoles, ou grâce aux yeux des volontaires de la Charité ou des membres de la Société de Saint-Vincent de Paul qui allaient chez eux pour lire à haute voix. Récemment, à Madagascar, j'ai vu des centaines de handicapés marcher et manifester leur joie de vivre dans nos maisons qui leurs sont destinées. Là, également, j'ai vu des lépreux guéris par des médicaments qui stoppaient le mal qui les ravageait, et guéris aussi par l'amour et le soin des confrères et des Filles de la Charité qui les avaient bien accueillis dans leur maison.

Le défi pour nous est de continuer à faire en sorte que cette prophétie d'Isaïe et le thème de notre communauté deviennent vrais aujourd'hui. “Aujourd'hui, dit Jésus, cette parole que vous entendez se réalise». Aujourd'hui en 1998. Aujourd'hui en 1999. Aujourd'hui dans le troisième millénaire. Ayant à maintes reprises été témoin de la générosité de tant de membres de la Famille Vincentienne, je vous invite avec confiance: aujourd'hui et dans le troisième millénaire, continuez à rendre la vue aux aveugles, à faire marcher les estropiés, à aider les pauvres pour qu'ils sachent que la Bonne Nouvelle est vraiment proclamée au milieu d'eux.

(Traduction: Noël Kieken, C.M.)