Le suivi de la mission. Eglise de Panama C.O.N.A.M. (Commision Nationale d'Animation Missionnaire)

Église de panama

"Conam" (commission nationale d'animation missionnaire)

Soeur Sylvia López Herrera

I. Introduction

1. La Commission Nationale d'Animation Missionnaire

a) Objectifs

La Commission Nationale d'Animation Missionnaire fut créée par la Conférence Épiscopale de Panamá (C.E.P.), dans le contexte de la préparation du Vème Centenaire de la Première Évangélisation des Amériques.

La C.E.P. demanda de réaliser "un mouvement missionnaire diocèse par diocèse à travers tout le pays, avec un programme fixé d'avance".

L'Objectif de cette animation missionnaire était de "revitaliser la conscience missionnaire de l'Église en tous ses membres et en chacun d'eux, et particulièrement chez les laïcs".

On demanda à l'Équipe Missionnaire Vincentienne (EMIVI) de se charger de coordonner cette mission. La commission fut formée par les Pères Tomás Sendlein, c.m. et Francisco Bárcenas, c.m. qui présentèrent le plan missionnaire alors en action dans diverses paroisses de Panama, du Salvador et du Guatemala, dont sortit ce qui est maintenant connu sous le nom d'Équipe Timón.

II. Description de l'expérience

A) Mission Populaire

Le projet de la Mission Nationale, pris en charge par l'équipe vincentienne, a été un des plus grands défis, pour parler historiquement, nés dans l'Église de Panamá.

Le Père Tomás Sendlein, c.m., ici présent, disait en ce qui concerne cette proposition, "nous (EMIVI), cherchions à nous faire ouvrir quelques portes, et tout-à-coup, voici que c'est le pays tout entier qui s'est ouvert devant nous."

Une fois organisée la Commission Nationale d'Animation Missionnaire, simultanément on a commencé à travailler à l'organisation, au contenu et à la méthodologie.

La Mission Populaire, à qui la dirigions-nous? ... Sans aucun doute et tenant compte de l'esprit vincentien qui animait les acteurs de la Mission, elle était dirigée principalement vers les gens les plus éloignés de l'Église, les plus pauvres, les marginaux et les indifférents; de toute façon, l'annonce de Jésus et de son Royaume devait être le fil conducteur du contenu de l'annonce, tant pour les enfants que pour les adolescents et les adultes. La Mission devait avoir le caractère d'Évangélisation, non de sacramentalisation. Le logo qui devait accompagner cette Mission serait "des hommes nouveaux, dans des communautés nouvelles, pour une société nouvelle".

On alla visiter les Evêques de chaque Diocèse, puis les curés qui seraient chargés d'organiser leurs paroisses, de faire le recensement, de "sectoriser" les communautés, d'organiser les divers comités d'alimentation, de transport, de logement, etc., le plus important étant les Centres de Mission. Pendant ce temps, la C.O.N.A.M. se préoccupait de motiver et de recruter les futurs missionnaires à qui nous donnions deux sessions de formation sérieuse en fin de semaine, en matière de contenu, de méthodologie, de dynamique, de chants, etc. La formation était confiée à l'Équipe Timón, qui en était responsable et s'occupait de l'organisation avec l'aide de quelques laïcs. Nous avons ainsi "missionné" Diocèse par Diocèse, paroisse par paroisse, en faisant en sorte que qu'il ne reste aucune communauté sans son équipe missionnaire. L'enthousiasme et les attentes allèrent en grandissant dans les paroisses. Dans tous les Diocèses, on parlait de la Mission et on l'attendait. Beaucoup de laïcs, mis au courant de notre travail, se présentèrent spontanément pour recevoir une formation missionnaire. Au cours de ces six années, grâce à Dieu, se présentèrent plus de neuf mille missionnaires laïcs, en majorité des hommes et des jeunes gens. Nous sommes arrivés à plus de trois mille communautés avec les Équipes Missionnaires des neuf Diocèses, dont huit ont reçu la Mission. Ce qui nous a permis de couvrir environ cent cinquante paroisses et de mobiliser près de deux cent cinquante mille personnes.

Le travail essentiel des équipes missionnaires consistait fondamentalement en visites aux familles, même non catholiques; le matin on travaillait avec les enfants, l'après-midi avec les jeunes et le soir avec les adultes. A chaque groupe étaient assignés ses thèmes, sa dynamique et ses activités spéciales. Les réunions par famille, où se rassemblaient trois communautés ou plus, étaient des événements importants qui réunissaient des centaines de personnes de la même paroisse. L'eucharistie était le moment le plus fort de ces réunions, au cours desquelles on apportait des témoignages sur les vocations, le mariage, la vie religieuse, le laïcat, etc.

B) Missions spécialisées

Notre programme pour le Vème Centenaire fut réalisé de 1987 à 1993. Ce furent des années d'un intense travail missionnaire. Il convient de signaler que nous avons laissé de côté, comme étape ultime, la capitale du pays où, en plus des missions paroissiales, nous avons engagé de nouveaux défis dans le but d'arriver, comme dirait Jean Paul II, dans son encyclique "Redemptoris Missio", à la création de "nouveaux aréopages". La ville de Panamá est devenue une ville cosmopolite du fait qu'elle est située sur le Canal de Panamá et du fait qu'elle comporte une concentration de plus de 47 pour cent de la population totale du pays: elle comporte un conglomérat commercial capitaliste, la Zone Libre de Colón, où s'échangent des millions de dollars en importations et exportations annuelles vers l'Amérique Latine, les Caraïbes et l'Amérique Centrale. On y trouve une zone bancaire, avec plus de 140 Banques étrangères et nationales. La population qui y vit est constituée de multiples ethnies: indigènes, afro-américaines, asiatiques, métisses, etc. Il n'était pas question de laisser de côté, dans notre effort d'évangélisation, ce mélange de races et de cultures. C'est ainsi que débutèrent les Missions Spécialisées. Ce furent onze groupes pour lesquels on organisa ces missions, chacune avec son contenu, sa méthodologie et ses activités propres.

C'est ainsi que nous avons eu:

1. La Mission Ouvrière... pour les entreprises et les usines.

2. La Mission Éducative... pour les écoles et les collèges.

3. La Mission Hospitalière... pour les malades et les équipes médicales.

4. La Mission Pénitencière... pour les détenus.

5. La Mission Familiale... où l'on travailla spécialement durant la semaine de la famille dans tout le diocèse de Panamá.

6. La Mission Afro-Antillaise... qui s'adressa aux divers groupes de race noire.

7. La Mission Chinoise... adressée aux groupes de catholiques chinois.

8. La Mission Universitaire... qui toucha cinq universités.

9. La Mission des Entrepreneurs, qui comprit un Congrès destiné aux chefs d'entreprises: la participation y fut très forte.

10. La Mission Législative, adressée aux membres, hommes et femmes, des Assemblées qui gouvernent le pays.

11. La Mission des Forces Publiques, destinée aux différents groupes de la Police Nationale.

Ces Missions Spécialisées furent le grand succès de la CONAM, du fait qu'elles atteignirent un grand nombre de gens qui, tout en étant catholiques, avaient cessé de fréquenter l'église.

Finalement nous avons achevé la Mission dans la capitale par une grande procession de toutes les paroisses du Diocèse, dans le but d'en faire une manifestation publique de notre engagement chrétien.

III. Suivi de la mission

Une fois terminé le projet de Mission Nationale, la Conférence Épiscopale de Panamá décida de poursuivre sur le lancée du travail réalisé par la CONAM: décision motivée partiellement par une pétition de centaines de missionnaires qui souhaitaient voir se prolonger l'activité de cet organisme.

La Conférence choisit de nommer comme Directrice Exécutive votre servante, Sœur Sylvia López Herrera. J'appartiens à une Congrégation Religieuse de Sœurs Missionnaires Catéchistes, fondée par un Lazariste, Monseigneur Francisco Beckmann, c.m., d'origine hollandaise, arrivé très jeune en Amérique Centrale. Après avoir occupé diverses charges à Panamá, il devint Archevêque, fonction qu'il occupa de 1945 à 1963. En tant que pasteur de cette Église, il ressentit la nécessité urgente de fonder une Congrégation Missionnaire capable de répondre au manque de formation des pauvres et marginaux du Peuple de Dieu. Notre charisme est de ce fait missionnaire et nous nous sentons partie de la famille vincentienne.

C'est dans cet esprit que nous avons assumé la responsabilité de poursuivre la tâche commencée par le P. Tomás Sendlein, c.m., ici présent. Je lui exprime ma reconnaissance au nom de tous les missionnaires de Panamá, pour les années qu'il a consacrées au service missionnaire, en travaillant la plupart du temps pour la CONAM. Récemment, le 27 mai, il a fêté ses 25 ans de sacerdoce missionnaire.

Au cours de la Mission, nous avons progressivement découvert l'importance de la seconde phase de la Mission, le "suivi". Il est impossible de songer à organiser une Mission, sans penser simultanément à l'avenir de ce que nous recherchons comme objectif de cette mission. Notre première inquiétude, alors que nous poursuivions notre service missionnaire, a été de savoir ce que nous pouvions offrir à tant de paroisses fortement animées par les équipes missionnaires: ressentaient-elles la nécessité de répondre aux inquiétudes pastorales de leurs communautés? Nous avions tellement insisté dans les rencontres avec les groupes, sur ce fait que la Mission ne prenait pas fin avec le départ des missionnaires, mais qu'elle continuait au niveau des groupes établis, auxquels il faudrait désormais fournir une aide et présenter de nouveaux programmes d'évangélisation. En cette période de Post-Mission, plus de sept mille personnes sont restées disposées à travailler pour leurs paroisses. Ce qui permit d'organiser des groupes chargés des différentes pastorales, et dans lesquels vinrent s'intégrer des jeunes gens, des enfants et des adultes: c'était merveilleux de constater l'enthousiasme de tous, notamment des laïcs, dans leur décision de poursuivre la tâche missionnaire.

Nous nous donnâmes pour tâche de réorganiser l'ensemble de notre travail missionnaire: il était nécessaire de revitaliser la conscience missionnaire, et dans ce but, de maintenir toute notre dynamique d'Animation, de Formation des Missionnaires et des aspirants missionnaires, tout en continuant à leur offrir, de manière continue et permanente, les programmes de formation missionnaire. Notre objectif est de pouvoir offrir aux paroisses des modèles, avec des programmes spécifiques destinés aux agents de pastorale, les rendant ainsi capables d'assumer, en union avec leur Pasteur, les tâches évangélisatrices. Nous avons organisé des équipes Missionnaires itinérantes que nous proposons aux paroisses, et qui sont disponibles toute l'année. Et nous travaillons également à la création de matériels didactiques nouveaux, avec des objectifs spécifiques.

Nous pourrions signaler des domaines concrets que la CONAM offre aux paroisses qui sollicitent un prolongement de la Mission:

1. Domaine de la Formation: c'est la première chose que nous offrons aux curés, à savoir des programmes ayant pour objectif d'initier un processus de formation destiné aux personnes qui sont restées motivées à la suite de leur participation à la Mission. Nos programmes sont établis en vue d'une formation systématique et progressive.

2. Animation Missionnaire: Inclus dans notre objectif spécifique se trouve l'engagement de maintenir l'Animation Missionnaire dans l'Église de Panamá. Dans ce but, nous offrons, chaque année, deux périodes, ou plus, de formation à la Missiologie et aux tâches concrètes de la Mission. Une autre façon de maintenir l'Animation Missionnaire, c'est tout ce qui permet d'échanger les inquiétudes au sujet de l'être et de l'agir missionnaires. C'est ainsi que nous avons: des soirées d'animation missionnaire, des réunions missionnaires, des déjeuners ou dîners missionnaires. Ces derniers, tout particulièrement, et entre autres effets, nous aident en matière économique.

3. Missions Paroissiales: Nous pourrions dire que c'est là la raison d'être du CONAM, que tout notre travail a été dirigé vers cette fin, à savoir maintenir et offrir aux paroisses notre service missionnaire. Il existe actuellement des paroisses qui maintiennent dans leur programme des missions d'été ayant lieu chaque année; d'autres paroisses sollicitent, au cours de l'année, des missions à l'occasion de fêtes patronales, de la Semaine Sainte, ou de quelque moment liturgique spécial.

4. Formation Permanente des Missionnaires: Beaucoup de missionnaires sont restés fidèles à la CONAM. Ce qui fait que nous avons, depuis dix ans passés au service de l'Évangélisation, de nombreuses personnes qui ont consacré tout leur temps au travail missionnaire. Certains de manière complète, d'autres de manière partielle, la majorité qui consacrent à ce travail leur temps de vacances, au cours de l'été. Pour tous ces missionnaires, et pour tous les autres qui se présentent chaque année, nous offrons les formations missionnaires nécessaires. Ces personnes viennent de différentes paroisses entre lesquelles nous maintenons une étroite collaboration et avec lesquelles nous restons en communication.

Tout ce processus fait partie du "suivi" de la Mission, au cours duquel, grâce à ces tâches concrètes, nous continuons à aider et à appuyer le projet de Mission Nationale. Nous maintenons une attitude de disponibilité et d'ouverture à regard de l'avance et du sentiment de l'Église Universelle et de l'Église Locale. Actuellement, nous ouvrons des voies, avec l'aide de nos missionnaires, en vue de répondre aux demandes les plus urgentes de la Mission Ad Gentes: nous avons déjà quelques jeunes missionnaires au Guatémala et il y en a d'autres en processus de formation.

Reflexion.

Chers Frères Vincentiens:

Au cours de ce bref exposé, j'ai voulu résumer ce qu'ont signifié pour moi 10 années d'un intense programme missionnaire. La Commission National d'Animation Missionnaire comporte depuis sa naissance l'esprit vincentien; c'est une expérience unique en Amérique Latine dans le contexte du Vème Centenaire: une expérience qui a réussi à obtenir que tous les diocèses du pays réalisent une Mission de style vincentien et avec une dynamique propre.

Peut-être maintenant, en préparation au IIIème Millénaire, d'autres Eglises Particulières sont-elles au travail et s'adonnent-elles à une effort similaire.

L'Encyclique Redemptoris Missio de Jean Paul II nous dit dans son chapitre I, paragraphe 11: "L'Église ne peut se permettre de cesser de proclamer que Jésus est venu nous révéler la Face de Dieu, et obtenir le salut pour tous les hommes, grâce à la Croix et à la Résurrection." Dans les lignes suivantes, le Pape se pose la question: pourquoi faire la Mission? Nous répondons avec la foi et l'espérance de l'Église : à nous ouvrir à l'Amour de Dieu et à la véritable libération. C'est en Jésus, et seulement en Jésus que nous sommes libérés de toute forme d'aliénation et de tout risque de déraillement. Le Christ est vraiment "notre Paix" (Ephésiens, 2, 14).

Nous pouvons affirmer de toute Mission qui est réalisée dans l'esprit de notre fondateur Saint Vincent, qu'elle a pour objectif final de présenter Jésus comme l'unique chemin de Salut et de Libération. Dans cette rencontre avec le Seigneur, chacun doit être à même de découvrir la Face de Dieu; une Face qui se fait tendresse dans la présence d'un enfant, une Face qui se fait Frère du pauvre, du prisonnier, du malade, qui se fait espérance pour le vieillard; et finalement une Face qui se fait amour et liberté avec tout homme désirant s'ouvrir à la grâce infinie de Dieu.

Ce sont là des motifs suffisants pour rendre grâces à Dieu pour toutes les oeuvres vincentiennes, pour la présence et l'action de milliers de frères vincentiens qui collaborent aujourd'hui avec l'Église pour présenter le véritable Visage de Dieu à tous les hommes et tout spécialement à tous ceux qui ont soif de libération.

Finalement je suis reconnaissante à l'équipe organisatrice qui a eu la gentillesse de m'inviter à mettre en commun notre expérience missionnaire.