La situation actuelle de la formation des nôtres à travers le monde

La situation actuelle de la formation des nôtres

à travers le monde

par J. Ignacio Fernández Mendoza, C.M.,

Vicaire Général

Dans la réflexion sur l'état de la Congrégation, réalisée dans les dernières Assemblées, un des aspects qui s'est nécessairement présenté avec un relief particulier est celui des vocations et de leur formation. C'est, en réalité, quelque chose d'une importance vitale, non pas tant pour la survie de la Congrégation que pour que 1'on continue dans 1'Eglise à évangéliser les pauvres selon le charisme et l'esprit de saint Vincent.

L'Assemblée Générale de 1980 demanda au Supérieur Général de publier une Ratio Formationis (1) pour le Séminaire Interne. L'Assemblée Générale de 1986 fit la même demande pour le Grand Séminaire Vincentien et pour la formation des Frères. Le Supérieur Général publia la Ratio Formationis pour le Séminaire Interne en 1982; la Ratio Formationis Vincentianae pour le Grand Séminaire en 1988; et le document Frères pour la Mission en 1991.

De même l'Assemblée Générale de 1992 demanda au Supérieur Général de promouvoir l'élaboration d'une nouvelle instruction sur les voeux de la Congrégation. Le Supérieur Général publia le 25 janvier 1996 l'Instruction sur la stabilité, la chasteté, la pauvreté et l'obéissance dans la Congrégation de la Mission. Dans tous ces documents, y compris le dernier, on insiste sur la formation vincentienne en vue d'une conformité plus profonde et plus grande avec notre charisme.

Quant à l'éveil et à l'essor des vocations, le désir des Assemblées s'en est tenu aux termes mêmes du Statut 37,1 qui dit: "Les Provinces, les Maisons et tous les Confrères auront à coeur de susciter des candidats à la mission vincentienne".

Ils accomplissent la mission de Jésus-Christ

Le candidat qui a décidé de commencer sa préparation spécifique pour être missionnaire, est accompagné par des formateurs.

Je me permets d'évoquer avec reconnaissance ceux qui m'ont formé et; à travers eux, tous les formateurs que nous avons eus dans la Congrégation. J'ai eu des formateurs vraiment exemplaires par leur sainteté, leur science et leur dévouement. Je leur dois presque tout ce que je suis en tant que vincentien.

Le ministère de la formation des nôtres est de la plus grande importance et il est très agréable aux yeux de Dieu. Il continue l'oeuvre que le Christ a réalisée patiemment avec les apôtres: "S'employer pour faire de bons prêtres et y concourir ... c'est faire l'office de Jésus- Christ qui, pendant sa vie mortelle, semble avoir pris à tâche de faire douze bons prêtres, qui sont ses apôtres, ayant voulu pour cet effet demeurer plusieurs années avec eux pour les instruire et pour les former à ce divin ministère" (Coste XI,8). Le Fils de Dieu commença à "annoncer l'Evangile aux pauvres; mais avec le temps, il fit des apôtres, il prit la peine de les instruire, les avertir et les former, et enfin il les anima de son esprit, non pour eux seulement, mais pour tous les peuples de la terre" (XII,83).

Il s'agit d'une activité sacrifiée et, parfois, ingrate. C'est pourquoi tous les formateurs méritent un mot de remerciement de la part de toute la Congrégation. Ils font l'oeuvre du Seigneur et, par leur sacrifice et leur dévouement, ils lui présentent, ainsi qu'à l'Eglise et à la Congrégation, le fruit le plus précieux que l'on puisse leur offrir.

D'autre part, il s'agit d'un ministère qui, depuis les origines, appartient inséparablement à l' historique de la Congrégation et correspond à sa fin propre: "Ne savez-vous pas, Monsieur, que nous sommes également obligés à former de bons ecclésiastiques comme d'instruire les peuples de la campagne, et qu'un prêtre de la Mission qui veut faire l'un et non pas l'autre, n'est missionnaire qu'à demi?" (VII, 561).

I. En regardant les origines

L'idée de contribuer à la formation du clergé surgit en saint Vincent au cours de ses missions, en constatant d'une part l'état d'abandon et d'ignorance des pauvres gens des champs et, d'autre part, la déchéance du clergé. Sa contribution à la formation du clergé avait comme but particulier d'assurer le fruit des missions: "Nous tâchons aussi, écrit-il, de contribuer à faire de bons ecclésiastiques par les exercices des ordinands et par les séminaires, non pour abandonner les missions, mais pour conserver les fruits qui se font par elles" (IV, 43). Pour le saint les missions et la formation du clergé sont deux chemins complémentaires visant l'évangélisation des pauvres. Les deux ministères figurent d'ailleurs dans l'héritage que le fondateur a légué à la Congrégation.

Sur ce point aussi, saint Vincent fut inventif. Il forma le clergé à travers de multiples initiatives: la fréquentation des prêtres, les exercices des ordinands, les conférences des mardis, les retraites, les séminaires, et même par sa participation au Conseil de conscience.

Du début à la fin de sa vie missionnaire, il contribua à la formation des prêtres. La bulle Salvatoris Nostri, du 12 janvier 1633, en approuvant la Congrégation, affirme que son objectif est de chercher le Salut "de ceux qui habitent les hameaux, les terres et les lieux les plus reculés" et "d'instruire ceux qui doivent être promus aux ordres sacrés, veillant à ce qu'ils fassent les exercices spirituels" (XIII, 260).

Dans les Règles Communes, saint Vincent, sur le point de mettre un terme à sa vie missionnaire, nous dit de façon précise que la fin de la Congrégation est "de travailler à sa propre perfection", "de prêcher l'Evangile aux pauvres" et "d'aider les ecclésiastiques à acquérir les sciences et les vertus nécessaires à leur état" (R.C. I, 1). Dans la conférence du 6 dicembre 1658, les missionnaires entendirent des lèvres mêmes de saint Vincent ces expressions: Dieu "nous a appelés pour contribuer à faire de bons prêtres, à donner de bons pasteurs aux paroisses et à leur montrer ce qu'ils doivent savoir et pratiquer. Oh! que cet emploi est haut! qu'il est sublime!" (XII, 84). Cette ferme intention du saint se vit confirmée par l'ouverture de vingt-et-un séminaires de son vivant.

Dans la propre maison

Il faut rappeler que saint Vincent, en même temps qu'il employait toutes sortes de ressources pour la formation du clergé diocésain, prenait aussi des mesures pour garantir l'avenir de son oeuvre de prédilection: la Congrégation de la Mission.

Le développement de la Congrégation fut lent et progressif. Le saint évita l'empressement au moment d'ajouter des membres à sa communauté naissante. Il écrivait à Antoine Portail:"Le nombre de ceux qui sont entrés parmi nous depuis votre départ est de six. Monsieur, que je crains la multitude et la propagation!" (I,312).

Les premiers à se joindre à sa cause furent des clercs déjà ordonnés. C'est ce que nous révèle l'acte d'association des premiers missionnaires signé à Paris le 4 septembre 1626 (XIII,203). Attirés par la figure du saint et par le ministère qu'il se proposait d'accomplir, les missions et la formation du clergé, ils adhéraient l'un après l'autre à la communauté naissante. Assurément, jamais il ne cessa de se montrer exigeant quant à la pureté d'intention et aux vertus fondamentales des candidats: "Dix tels qu'il les faut en vaudront cent; et cent qui ne sont pas bien appelés, ou qui ne répondent pas aux desseins de Dieu, n'en valent pas dix" (II,324).

Avec le cours du temps ceux qui sollicitent leur entrée étaient en général des jeunes non ordonnés, âgés au moins de dix-sept ans. Dans les débuts, pendant dix ans, la responsabilité de leur formation incomba à saint Vincent lui-même, faute de structures solides et de personnel préparé.

Ils ont deux années de séminaire

En 1637, vu le nombre croissant de ceux qui frappaient aux portes de la Congrégation, saint Vincent créa à Saint-Lazare le premier séminaire Interne. A partir de cette décision, le nombre des demandes d'entrée alla en augmentant: "Notre séminaire, écrit-il, est assez rempli, par la miséricorde de Dieu; il y en a 36 ou 38. Nous en avons reçu 7 le mois dernier"(II,323).

Le saint consolida peu à peu cette institution grâce à des structures à la fois solides et flexibles. Le séminaire Interne est obligatoire pour tous (III,209); la vocation du séminariste s'y affermit: "les années de probation ne sont pas pour reconnaître si les séminaristes ont les dispositions requises, car il faut les avoir reconnues auparavant, mais afin qu'ils s'y affermissent davantage"(VI,149); le séminaire dure deux ans: "L'on fait deux ans de séminaire"(I,565); en général le séminariste vit à part des autres ecclésiastiques: "pour plusieurs raisons, les séminaristes ne communiquent point avec les prêtres"(I,565); ils sortent de la maison accompagnés; ils font les exercices spirituels tous les six mois (RC X , 9 ) ; ils ne font pas en même temps les études et le séminaire parce que "cela pourrait être un empêchement à faire validement leurs voeux" (VII , 479 ) . Le saint permet à deux séminaristes, qui terminent leur séminaire, d'étudier la philosophie (VIII,382); les séminaristes sont envoyés en mission: "Nous venons d'envoyer ce matin deux séminaristes en mission en Champagne et demain ou après nous en enverrons sept ou huit en deux bandes" (II, 360) Les actions communes de chaque journée étaient les mêmes que dans les autres communautés: oraison de bon matin, temps d'étude, eucharistie, examen particulier, repas, récréation et temps de silence. Le programme incluait la lecture de l'Ecriture Sainte et des auteurs spirituels, et le catéchisme (I,563-64). Au terme de la première année les séminaristes faisaient les Bons-propos.

Saint Vincent délégua peu à peu à des missionnaires bien préparés une partie de la responsabilité de la formation. Durant la vie du saint deux séminaires furent ouverts en France: à Saint-Lazare et à Richelieu.

Les attentions de saint Vincent pour le Séminaire interne prouvent qu'en plus de son dévouement assidu à la formation du clergé, il s'intéressa aussi en pratique à affermir la formation des siens. C'est qu'il y allait de la survie de son oeuvre la plus chère: la Congrégation de la Mission et, en définitive, de 1'annonce de la Bonne Nouvelle aux pauvres.

Amenés à rappeler un trait notable de saint Vincent en tant que formateur des missionnaires, il faudrait signaler son intérêt à centrer la vie des aspirants sur Jésus-Christ Evangélisateur des pauvres. C'est sur Lui que repose le service de l'Eglise à travers les missions et la formation du clergé. Les lettres et les conférences du saint adressées aux missionnaires sont une preuve digne de foi des convictions personnelles plus profondes qu'il s'efforça de transmettre aux siens.

Ils ne cesseront de s'appliquer aux études nécessaires

Saint Vincent, en tenant compte de 1'affluence toujours plus nombreuse des candidats, décida de fonder un scolasticat. Pour la communauté naissante, il s'agissait d'une oeuvre indispensable. Sans une préparation commune, adaptée et reliée à la nouvelle communauté, formée d'hommes de diverses provenances, il lui aurait manqué l'identité et les idéaux communs.

La première maison d'étudiants fut installée aux Bons-Enfants. L'édifice, pas très spacieux, accueillit en même temps des oeuvres très diverses: séminaire ecclésiastique d'ordinands, maison d'exercices spirituels, résidence pour prêtres de passage et scolasticat de la Congrégation. Saint Vincent, dans une lettre à Robert de Sergis, du 3 février 1639, faisait allusion à ce qui nous intéresse: nous en avons envoyé “cette année dix ou douze pour étudier la théologie aux bons-Enfants", dit-il (I,539).

Nous connaissons les marques distinctives de la formation que saint Vincent donnait aux étudiants. Il préférait l'usage d'un bon manuel aux cours dictés (II,212); la piété, les vertus et l'eucharistie prenaient une particulière importance; il faut en dire autant de la liturgie, de la théologie, dogmatique et morale, de l'administration des sacrements, de la façon de catéchiser, de l'exposé des cas de conscience et des débats: "Il y en a deux qui débattent entre eux: l'un argumente et l'autre assure la défense. Et c'est la meilleure façon d'acquérir la science. Cela se pratique aussi dans les séminaires. Aux Bons-Enfants et en bien d'autres lieux" (IX,1149 -édit. esp.).

L'enseignement en tout cas devait être conforme à la vraie foi et orienté vers la pratique (XIII,185). On intercalait durant les études certaines activités pastorales: "là où il y a un séminaire, il est bon que nous y ayons une paroisse pour y exercer les séminaristes" (VII,253-254). Le saint supprima aux Bons-Enfants la chaire de théologie dogmatique: "J'ai appris que la scolastique que l'on enseigne aux Bons Enfants est peu ou point utile; et j'ai pensé de l'ôter, d'autant plus que du Collège l'on va à Navarre ou en Sorbonne entendre la scolastique" (XIII,185).

Son projet s'orientait avant tout vers la formation de missionnaires ayant une bonne préparation pratique et qui soient aptes pour le travail des missions et des séminaires. Saint Vincent mettait en garde les siens contre l'étude qui ne serait pas ordonnée à l'action. Il s'efforçait de former des pasteurs, et non pas des docteurs. Il prévenait souvent ceux qui étaient en formation pour qu'ils évitent certaines tentations: le sacrifice de la piété sur l'autel du savoir, le danger de la vanité et de la fausse curiosité (XI,127; XII,63, 199). En même temps, et à l'encontre de ce que l'on a parfois dit, le saint Fondateur voulait dans sa communauté des missionnaires bien préparés: "ils ne laisseront pas néanmoins de vaquer soigneusement à l'étude des choses nécessaires pour se bien acquitter des fonctions d'un missionnaire" (RC XII,8).

C'est par ces deux institutions, le séminaire interne et le scolasticat, que sont passés pratiquement tous les missionnaires de la Congrégation durant la vie du saint.

Les renseignements fournis sont suffisants pour arriver à une première conclusion: Saint Vincent orienta sa vie et celle de beaucoup d'autres vers l'évangélisation des pauvres. A l'appui de ce but, il a esquissé une spiritualité propre. Il s'est préoccupé en outre de développer toute une tactique pour atteindre ce but en essayant d'y impliquer et d'y préparer ses plus proches collaborateurs. Il se livra pour la vie au ministère des missions et à la formation du clergé, sans cesser pour autant d'assurer l'avenir de la Congrégation en formant les siens le mieux possible.

La Congrégation, pour sa part, reçut en héritage le champ que le Fondateur avait cultivé de ses propres mains: celui des pauvres, que nous atteignons surtout à travers certains ministères: la mission d'annoncer l'Evangile, celle de former le clergé et, bien sûr, l'affermissement de la propre communauté grâce à la formation des candidats. Il ne semble pas qu'il soit opportun de se désintéresser de l'un de ces ministères, sous prétexte de stimuler les autres. Les missions, la formation du clergé et l'impulsion donnée à de nouvelles vocations pour la Congrégation garantissent l'avenir.

II. La formation des nôtres aujourd'hui

Les Constitutions issues de l'Assemblée Générale de 1980 font référence à la formation du clergé (Const. 1,3; 15) et à la formation des nôtres (Const. 77-95). C'est dans la même direction que se sont déroulées les Assemblées Générales de 1986 et 1992. Ces données manifestent la conscience actuelle de la Congrégation en ce qui concerne la formation sacerdotale et elle se traduit par deux aspirations.

D'une part, conformément à l 'héritage reçu de saint Vincent, le ministère de la formation du clergé subsiste, bien que réduit quant aux effectifs employés. Le Supérieur Général précédent, le P. Richard McCullen, avait communiqué à l'Assemblée Générale de 1992 sa réflexion sur l'état de la Congrégation; il déclara que le nombre des confrères appliqués à former les séminaristes diocésains avait diminué.

D'autre part, dans la période post-conciliaire, la Congrégation a continué à tracer, pour la formation des nôtres. de nouveaux chemins et une nouvelle théorie élaborée à partir de la Ratio Formationis pour le Séminaire Interne et le Grand Séminaire.

La formation dans les divers continents

Actuellement la formation des nôtres s'appuie sur les documents de l'Eglise, les Conférences épiscopales, les Constitutions, les Statuts et la Ratio Formationis de la C.M. Mais, en même temps, les particularités des diverses cultures continuent à trouver place dans les programmes locaux de formation; ce qui est dû à l'effort des Provinces en faveur de l'inculturation.

a. Provinces d'Europe

Séminaire Interne

En général chaque province d'Europe forme les candidats dans son propre séminaire interne. Cependant, la tendance à l'unification, due au nombre réduit des séminaristes et à la nécessité de mieux profiter des formateurs disponibles, est manifeste en ces dernières années.

En ce moment, le Séminaire Interne est interprovincial en France, en Pologne- Slovaquie et, selon le cours des choses, il semble qu'il le sera aussi en Italie et en Espagne.

La Ratio Formationis pour le Séminaire Interne influence de façon décisive la marche du Séminaire. D'autre part les Provinces ont approuvé leur propre plan de formation et ont veillé à doter leur Séminaire des moyens utiles à une bonne formation. Le nombre des séminaristes de chaque Province est souvent réduit, ce qui permet une formation person nalisée, excluant tout danger de formation massive. La proximité entre formateurs et séminariste est évidente. Chez les jeunes qui entrent au Séminaire, on constate une maturité humaine et chrétienne supérieure à celle qu'avaient leurs prédécesseurs en des temps relativement récents. En général les séminaristes actuels commencent le Séminaire après avoir suivi les études requises pour entrer à l'université et, en certains cas, après être passés par le postulat qui inclut parfois dans son propre programme une partie des études de philosophie.

Grand Séminaire

Parmi les Provinces d'Europe et d'Orient, seules celles de Pologne et de Rome sont titulaires chacune d'un centre d'études respectif pour la philosophie et la théologie. L'un est à Cracovie, l'autre à Plaisance; et leurs propres étudiants, entre autres, y assistent. Les deux autres provinces d ' Italie, celles de Turin et de Naples, font des démarches pour envoyer leurs propres étudiants à Plaisance, dont est responsable la province de Rome. Ce centre d'études deviendrait ainsi, pratiquement, interprovincial. La province de Turin est titulaire d'un Institut théologique à Gênes où vont des étudiants religieux et laïcs. Toutes les autres provinces envoient les leurs dans des centres académiques dont les responsables appartiennent à des organismes étrangers à la Congrégation de la Mission.

Dans les deux premières décennies post-conciliaires la plupart des provinces, suivant en cela beaucoup d'ordres et de congrégations religieuses, fermèrent leurs scolasticats où jusqu'alors les élèves comme les professeurs étaient des membres de la Congrégation. Les étudiants furent envoyés à d'autres centres académiques où se donnaient les cours de base traditionnels. L'enseignement y était confié à un diocèse ou à une Congrégation religieuse ou encore, comme cela arrive parfois, les charges étaient partagées.

A l'exception de la province de Pologne, qui est responsable des séminaires diocésains de Gdansk, Jordanovo et Grodno, ce dernier étant en Biélorussie, aucune des autres provinces d'Europe ne prête un pareil service à un diocèse du vieux continent

b. Provinces d'Afrique et de Madagascar

Séminaire Interne

Chacune des provinces d'Afrique continue à recevoir dans son propre Séminaire Interne des candidats à la Congrégation. Si ce n'était pour les distances et parfois pour la diversité des langues et des cultures, la collaboration interprovinciale pourrait se réaliser davantage et serait bénéfique à tous. Vu le nombre restreint de leurs propres séminaristes, quelques Visiteurs ont parfois cherché à titre personnel des solutions précises en envoyant leurs sujets à d'autres provinces.

Il faut noter l'accroissement numérique des entrées dans les séminaires respectifs d'Afrique. La Ratio Formationis pour le Séminaire Interne sert de fil conducteur de la formation. D'autre part, sur le continent africain l'Eglise s'efforce spécialement d'intégrer l'Evangile dans les vraies valeurs culturelles. Les divers séminaires de la Congrégation ne sont pas étrangers à cette t'ache si nécessaire.

Il y a lieu de signaler deux notes caractéristiques. Les provinces ne disposent pas souvent du personnel suffisant et préparé pour la formation. D'autre part 1'étude des humanités chez les candidats qui entrent au séminaire est assez souvent incomplète. Ce qui oblige les formateurs à multiplier leurs efforts pour surmonter une telle insuffisance. L'échange de formateurs, même s'il est temporaire, serait bénéfique pour les provinces et, finalement, pour la Congrégation. Il arrive que là où le nombre des candidats augmente, le manque de formateurs se fait fréquemment sentir

Grand Séminaire

Dans ce paragraphe nous nous référons aux provinces de Madagascar, d'Ethiopie, du Zaïre et aux vice-provinces de Saint Justin-de-Jacobis et du Mozambique. Nous incluons aussi la région du Nigéria, qui dépend de la province d'Irlande, et la mission du Cameroun dont est responsable la province de Paris.

Les provinces ou vice-provinces mentionnées qui ne disposent pas de centres d'études théologiques relevant de leur propre et seule responsabilité, envoient leurs étudiants soit aux séminaires diocésains soit à des instituts théologiques intercongréganistes.

A aucune des provinces citées plus haut n'a été confié jusqu'à présent le grand séminaire de l'un des nombreux diocèses du continent africain. Néanmoins, les missionnaires de la Congrégation continuent à collaborer à la formation spirituelle et intellectuelle des séminaristes en Afrique. Selon des calculs approximatifs, dix-sept confrères s'emploient à des tâches de formation et, en particulier, comme enseignants dans des centres d'études qu'en général nos étudiants de philosophie et théologie fréquentent aussi.

Comme il arrive en Europe, toutes et chacune de nos provinces et vive-provinces d'Afrique disposent d'une maison d'étudiants ou, comme d'autres préfèrent l'appeler, d'un scolasticat. La communauté est en général composée de formateurs et d'étudiants. Parfois le scolasticat est jumelé avec une communauté de la province.

Dans les années passées, à cause de la situation politique et sociale du Zaïre, on a laissé passer un projet, soutenu par le Supérieur Général, d'ériger dans ce pays un centre de formation interprovincial pour les provinces d'Afrique. Pour sa part, la province du Mexique est responsable du petit séminaire diocésain de Xai-Xai, au Mozambique, et il a été confié à la province de Saint Louis, aux USA, depuis 1980, le grand séminaire de Nyeri, au Kenya.

cAsie et Australie

Dans le paragraphe qui suit, nous nous référons aux provinces d'Inde, d'Indonésie, des Philippines, de Chine et d'Australie.

Séminaire Interne

Chaque province, excepté celle de Taïwan, a son propre séminaire interne. Malgré les distances très grandes, deux provinces collaborent dans ce champ de formation des séminaristes. Chaque année un petit groupe de séminaristes d'Indonésie arrive au séminaire interne des Philippines; le reste fait le séminaire interne dans sa propre province. On constate en Indonésie et en Inde une augmentation soutenue de séminaristes; elle est plus modeste aux Philippines et présente une certaine continuité, par rapport au passé récent, en Australie. Cette dernière province forme ses "novices" au séminaire interne situé dans les Îles Fidji, mais parfois aussi en Australie. A Taïwan on ne compte pas de vocations en ce moment, et c'est pourquoi on n'a pas non plus de structures pour la formation.

Comme dans les provinces d'autres latitudes, la Ratio Formationis est pour les formateurs et les élèves un point de référence.

Grand Séminaire

La province d'Indonésie dispose, avec deux congrégations religieuses, d'un centre d'études philosophiques et théologiques. En plus de nos propres étudiants et de ceux des deux congrégations coparticipantes, ce centre est fréquenté par les séminaristes de neuf diocèses. La province s'est chargée aussi d'un petit séminaire diocésain.

De son côté, la province d'Inde maintient son propre scolasticat à Orissa où se donnent les enseignements du cycle de base. A Pune, second scolasticat de la province, les étudiants assistent aux cours du séminaire diocésain.

La province des Philippines, qui assume la responsabilité du séminaire diocésain de Cebu dans sa section de théologie, possède en plus à Manille son propre grand séminaire. La province d'Australie envoie ses étudiants à des centres diocésains ou de responsabilité intercongréganiste. Aux îles Fidji, la contribution des confrères de cette province à la formation des futurs prêtres est considérable.

D'après les statistiques disponibles, il y a en tout vingt-quatre membres de la Congrégation qui collaborent à la formation académique des séminaristes diocésains et des étudiants de la congrégation de la Mission.

La nouvelle mission internationale, créée récemment par le Supérieur Général aux Îles Salomon, s'est chargée du grand séminaire interdiocésain.

d.Amérique Latine

Séminaire Interne

En général chaque province a disposé jusqu'à présent d'un séminaire interne propre. Néanmoins, dans cette vaste zone du continent américain, une tendance à la collaboration interprovinciale se fait sentir. Les groupes provinciaux suivants sont solidairement responsables d'un séminaire interne: le Pérou, 1'Argentine et le Chili; les provinces de Fortaleza et de Curitiba, avec une probable participation ultérieure de celle de Rio de Janeiro; la province de Porto Rico, qui accueille dans son séminaire les séminaristes de Cuba. Le séminaire interne d'Amérique Centrale et de Philadelphie, situé à Panama, est aussi interprovincial. En Amérique Centrale, les provinces et les vice-provinces qui sont dans cette région ont avancé dans leur collaboration, en ce qui touche la formation des séminaristes. Il faut mentionner en plus, les provinces de Costa Rica, Barcelone et Saragosse. Si l'on parvenait à un accord, tous en seraient bénéficiaires, étant donné qu'on ne dispose pas, parfois, des formateurs suffisants et que, d'autre part, le nombre des séminaristes de chaque province est trop réduit. Les provinces de l'Equateur et du Venezuela ont commencé une collaboration mutuelle, à partir de l'année 1995-1996, en établissant en Equateur leur séminaire interne interprovincial.

Il n'y a pas d'uniformité quant à l'âge et au degré de préparation des candidats qui entrent au séminaire interne. Dans quelques provinces on entre au séminaire interne après avoir suivi les cours de philosophie ; en d'autres, c'est une fois terminé les études secondaires, requises pour entrer à l'université.

Quelques provinces d'Amérique Latine continuent à exiger le petit séminaire, ou parfois le postulat, pour les jeunes jeunes qui sont à peine âgés de seize ans. Il s'agit d'une première expérience de vie communautaire. C'est le cas des provinces du Mexique, de Porto Rico, d'Amérique Centrale, du Venezuela, du Pérou et du Chili. C'est dans une pareille situation que se trouvent les provinces de Curitiba, de Rio de Janeiro et de l'Equateur. La province de Colombie continue à maintenir une école apostolique.

Bien qu'elle soit inégale selon la diversité des lieux, la tendance est à l'augmentation graduelle du nombre des candidats.

Assez souvent on improvise la préparation des formateurs, surtout en ce qui concerne leurs connaissances de la spiritualità Vincentienne. L'aide des provinces, riches en personnel bien préparé, à celles qui en sont dépourvues est particulièrement urgente pour ces dernières, à l'heure actuelle.

Grand Séminaire

Les provinces d'Amérique Latine envoient leurs étudiants à des centres universitaires dont elles n'ont pas la responsabilité. Il faut excepter trois provinces. Celle de Colombie dispose d'un centre d'études théologiques dont elle assume la responsabilité. La province d'Equateur maintient sa maison de formation: on y donne les cours du cycle de base requis. Pour sa part, la province de Curitiba dispose d'un séminaire de philosophie où collaborent des enseignants d'autres congrégations et que fréquentent, entre autres, les étudiants de la Province.

La province de Colombie est responsable de cinq séminaires diocésains en Colombie et d'un autre situé en Bolivie. Les autres provinces ont abandonné ce ministère.

En Amérique Latine vingt-deux confrères environ sont professeurs dans des centres d'enseignements pour futurs prêtres. A ce chiffre il faut ajouter un nombre accru de confrères, environ quarante, de la province de Colombie, qui se consacrent à la formation sacerdotale des aspirants au sacerdoce.

e.Etats-Unis d'Amérique

Séminaire Interne

Les cinq provinces, vu la baisse du nombre des candidats, ont décidé d'un commun accord d'établir un séminaire interprovincial. Les résultats sont encourageants. Plusieurs confrères collaborent à la formation avec le directeur et, en particulier, pour enseigner les matières étudiées pendant l'année de séminaire. Normalement les candidats qui entrent au séminaire ont une bon niveau de formation universitaire et de maturité humaine.

Grand Séminaire

Les provinces envoient leurs étudiants à des centres d'études dont la Congrégation de la Mission n'a pas la responsabilité.

Dix-sept confrères sont formateurs ou professeurs, enseignant dans des centres de formation presbytérale. Il faut mentionner en particulier les Séminaires de Camarillo, au diocèse de Los Angeles. Cinq prêtres de la Congrégation de la Mission sont professeurs ou formateurs en Théologie et deux en Philosophie.

Conclusions

Actuellement la formation donnée au Séminaire Interne de la Congrégation suit les lignes tracées dans la Ratio Formationis correspondante et, en particulier, dans le domaine plus spécifique de la spiritualité Vincentienne. A cause de la Ratio Formationis en vigueur, la formation des séminaristes des diverses provinces et régions géographiques coïncide pour l'essentiel, sans porter préjudice d'ailleurs à l'inculturation nécessaire dans les différents lieux.

Collaboration interprovinciale

De plus en plus de provinces s'associent pour partager la responsabilité d'un séminaire interne commun. Il est à noter une certaine improvisation des formateurs. Assez souvent, ils ne disposent pas de l'opportunité ni des moyens requis pour se préparer, suffisamment à l'avance, à exercer ce ministère avec compétence. La rareté des formateurs se fait remarquer dans les provinces où le nombre des aspirants est croissant. Il s'agit d'une carence dont les conséquences fâcheuses sont de longue portée et difficiles à enrayer. Il serait souhaitable que les provinces s'entendent pour trouver les moyens de s'aider mutuellement grâce à un échange de formateurs.

Etant donné qu'actuellement les groupes de séminaristes sont en nombre restreint, on n'a plus les inconvénients de la formation massive d'autrefois; mais, par ailleurs, on n'a pas résolu de façon satisfaisante les inconvenants issus de la réduction excessive du groupe de séminaristes, parfois minuscule.

Comme à notre époque la préparation académique des candidats au séminaire interne ne pouvait être en reste, elle se caractérise par la diversité, selon les pays et est dépendante des niveaux culturels et de la législation locale sur les études secondaires. Les provinces sont d'accord pour exiger de ceux qui entrent au séminaire interne un âge plus élevé, ainsi qu'une plus grande maturité humaine et une expérience suffisante de la vie communautaire.

Grand Séminaire

Dans les scolasticats ou les grands séminaires de la Congrégation, la disparition des structures classiques de la formation, sans qu'on les remplace à temps par d'autres structures nouvelles et meilleures, a entraîné avec elle une évidente désorientation pendant les deux décennies qui ont immédiatement suivi le Concile et même dans un passé plus récent. En certains cas, on l'a payé cher, au détriment des formateurs et des élèves. En certains endroits encore, ces funestes effets se font sentir.

Actuellement, en tout ce qui concerne la formation, on constate un plus grand équilibre et plus de sérénité. Après une situation caractérisée par les changements rapides, sans discernement suffisant parfois, on est passé à une situation de pause, favorable à la créativité, caractéristique du moment ecclésial que actuel.

La formation que reçoivent aujourd'hui les étudiants du cycle de base, établi dans la Congrégation, s'ajuste pour l'essentiel à celle qui se donne aujourd'hui dans les centres de formation de l'Eglise universelle et de l'Eglise locale. Dans l'ensemble, la Congrégation a incorporé à son propre projet de formation des nôtres les orientations de Vatican II, les celles postérieures du Saint-Siège et des Conférences épiscopales et, naturellement, les spécificités de notre propre tradition Vincentienne. Aujourd'hui la dimension Vincentienne de la formation, telle qu'elle est exprimée dans les Constitutions, dans la Ratio Formationis pour le Grand Séminaire, dans le document "Frères pour la Mission" et dans les plans de formation propres aux provinces, offre aux formateurs et aux élèves des garanties d'authenticité. Ces documents ont été reçus favorablement dans les provinces. Ils ont recentré sur l'essentiel ce qui fait l'unité de la Congrégation et, à leur tour, ils ont laissé des espaces libres pour encourager la diversité en harmonie avec la culture locale.

Si l'on excepte un petit nombre de provinces, toutes les autres ont confié la formation supérieure de leurs candidats à des professeurs et à des établissements étrangers à la communauté Vincentienne. Les conséquences positives sont évidentes. Les étudiants de la Congrégation ont suivi, en cela, la pratique adoptée aujourd'hui par la plupart des ordres et des congrégations religieuses. D'autre part, on a vu disparaître l'isolement appauvrissant toujours possible qui se serait sûrement produit si les étudiants étaient restés enfermés dans leur milieu propre.

Mais d'un tel procédé découlent aussi certains inconvénients. La participation, faible ou nulle, des professeurs de la Congrégation dans les centres où vont nos propres étudiants entraîne avec elle une distanciation réelle et progressive entre la dynamique propre aux centres d'enseignement et nos formateurs. L'autre inconvénient affecte directement la Congrégation de la Mission en tant que telle. Le déclin du Ministère de la formation sacerdotale, tout en diminuant la responsabilité des provinces sur les séminaires diocésains, et en réduisant nos propres centres d'études ecclésiastiques, peut conduire, et conduit de fait, à un appauvrissement de la formation académique spécialisée des confrères. A défaut d'intérêts particuliers, il est probable que, dans la pratique, les provinces ne considèrent pas opportun qu'un groupe de confrères se spécialise dans certaines disciplines théologiques.

Formation des Frères

Dans la formation des Frères on a corrigé certains anachronismes que l'on traînait par le passé. Dans les Constitutions le Frère est considéré comme égal aux clercs en tout, sauf en ce qui découle de l'ordre sacerdotal. Dans quelques provinces l'accroissement ou la diminution des vocations laïques à l'intérieur de la Congrégation est équivalent à l'accroissement ou à la diminution des vocations sacerdotales. Dans l'ensemble de la Congrégation la diminution du nombre des Frères est supérieure à celle des clercs.

La formation des Frères au séminaire interne est semblable à celle des aspirants au sacerdoce. En général ils reçoivent également une formation doctrinale suffisante soit dans les facultés soit dans les écoles de théologie pour laïcs. D'autre part, les provinces ont pris des moyens pour que les Frères obtiennent une formation professionnelle suffisante. L'éventail des fonctions et des ministères que les Frères remplissent aujourd'hui s'est élargi. Il embrasse les travaux manuels, les services domestiques, l'administration, 1 'enseignement et la pastorale sous leurs aspects les plus divers.

Malgré ce qu'on a dit, il reste deux éléments concernant les Frères qui n'ont pas été réglés de façon satisfaisante: la formation à partir du séminaire interne et l'intégration du Frère dans une société cléricale. Tout récemment on a entendu des voix favorables à l'élaboration d'une Ratio Formationis pour les Frères.

Sans cesser de fixer le regard sur l'avenir, lisons attentivement les pages que saint Vincent et beaucoup d'autres confrères de la Congrégation ont écrites dans le passé sur le ministère de la formation des prêtres et des nôtres. Cela nous servira d'appui et de garantie pour entrer de plain-pied dans le vingt-et-unième siècle.

(Traduction: Jules Vilbas, C.M.)

(1)Programme de Formation.