Le Directeur Provincial selon les Constitutions, les Statuts de la Compagnie et le Directoire des Directeurs Provinciaux. Quelques précisions et points d'insistance

Le Directeur Provincial selon les Constitutions, les Statuts de la Compagnie

et le Directoire des Directeurs Provinciaux.

Quelques précisions et points d'insistance

P. Fernando Quintano, C.M.

Directeur Général des Filles de la Charité

9-VII-2001

Introduction

Lorsque les Statuts de la Compagnie des Filles de la Charité énumèrent les différentes attributions qui sont du ressort du Directeur Général, ils soulignent particulièrement ceci: «Il coordonne et oriente la tâche des Directeurs Provinciaux». Durant les sept ans qui se sont écoulés depuis que le Supérieur Général m'a nommé pour être son représentant permanent auprès de la Compagnie, j'ai eu des rencontres avec différents groupes de Directeurs Provinciaux, en particulier avec ceux des pays ayant plusieurs provinces de Filles de la Charité, certaines ont eu lieu avec des regroupements plus ou moins larges comme ce fut le cas pour les pays d'Amérique Latine et des Caraïbes ou des pays d'Europe de langues slaves, d'autres ont eu lieu lors des visites particulières. La Rencontre extraordinaire de ce mois nous permet de nous retrouver tous. Pour moi, c'est une occasion spéciale pour accomplir cette tâche de coordination et d'orientation qui m'a été confiée. Nous devons en être reconnaissants aux deux Supérieurs Généraux qui l'ont convoquée.

En septembre 1996 déjà, j'écrivais un article pour les Échos de la Compagnie sur le thème qu'il m'est demandé de développer aujourd'hui. C'est la seule fois où, avant de publier un article, je l'ai soumis à la lecture du Père Général. Je suis bien conscient que, aussi bien le Directeur Général que les Directeurs Provinciaux, nous devons accomplir cet office en accord avec celui qui nous a nommés pour être ses représentants auprès des Filles de la Charité à ces deux niveaux. M'appuyant sur cette garantie, je pourrais me contenter de répéter dans cette conférence ce que j'ai écrit il y a cinq ans, mais la vie continue et il m'a fallu tenir compte de situations différentes, tant en ce qui concerne la Congrégation de la Mission que la Compagnie des Filles de la Charité.

Dans les rencontres que je viens d'évoquer, ce qui a prédominé ce sont les réponses apportées aux questions posées par les Directeurs eux-mêmes, spécialement ceux qui venaient d'être récemment nommés. Plusieurs d'entre vous, avez été nommés au cours de cette année et beaucoup d'autres sont dans cet office depuis peu de temps, il est donc probable que vous souhaitez trouver une réponse aux nombreuses questions que vous vous posez. Sans aucun doute, lorsque vous avez été nommés pour cet office, vous avez lu très attentivement les Constitutions et les Statuts des Filles de la Charité ainsi que le Directoire pour les Directeurs. Mais comme il m'a été demandé de traiter l'office du Directeur Provincial à partir de ces trois documents, je m'efforcerai de m'y conformer. Je m'évertuerai cependant à ne pas répéter le mot à mot de ce que vous connaissez déjà, ni de m'arrêter à de longues explications de textes. Je vais plutôt tenter d'éclairer certains points sur lesquels nous pouvons avoir des doutes et répondre en même temps aux questions que quelques-uns d'entre vous m'avez posées en m'envoyant la copie du Rapport Annuel ou dans des lettres particulières. Nous aurons le temps, tout au long de ce mois, de continuer à nous éclairer les uns les autres.

1. Le Directeur Provincial selon les Constitutions de la Compagnie

L'office de Directeur, tant Général que Provincial, remonte aux origines de la Compagnie. Saint Vincent était le Supérieur de la Congrégation de la Mission et des Filles de la Charité. Ses nombreuses occupations ne lui permettaient pas de s'occuper des Sœurs de la façon dont il le désirait et les Sœurs en avaient besoin. Pour l'aider dans ce service, il demanda la collaboration de quelques missionnaires, comme par exemple: le Père Portail, premier Directeur Général et les Pères Desdames et Bertoldi, respectivement supérieurs de Varsovie et de Turin, que nous pouvons considérer comme les deux premiers Directeurs Provinciaux de la Pologne et de l'Italie. Les uns et les autres agissaient avec les pouvoirs que saint Vincent leur avait délégués, bien que l'aspect juridique de l'office n'ait pas encore été bien défini à cette époque. Les Supérieurs Généraux successifs ont donné des normes et des orientations qui élargissaient ou limitaient les pouvoirs de ces offices. Les premières Constitutions de la Compagnie (1954) ont donné un cadre juridique à la figure du Directeur Provincial, et le Père William Slattery promulgua le premier règlement en 1965, règlement renouvelé par le Père James Richardson en 1976.

En 1967, la Sacrée Congrégation pour les Religieux accorda à la Compagnie la faculté de convoquer les Assemblées Générales en tant qu'organe législatif suprême. Depuis lors, les Filles de la Charité ont la capacité de décider du rôle et des attributs du Directeur Provincial. C'est ainsi qu'elles ont procédé lors des Assemblées Générales successives. Avec le temps, ce n'est pas seulement le langage qui a changé, mais également les compétences qui ont été précisées et limitées. L'office de Visitatrice, en tant que principale responsable du gouvernement de la Province, s'est consolidé, comme s'est renforcé le caractère pastoral et de collaboration du Directeur, particulièrement en ce qui concerne la formation spirituelle et vincentienne. En fait, pour connaître ce qu'est un Directeur Provincial, quelles sont ses compétences et la façon dont il doit les exercer, il faut se référer aux Constitutions et aux Statuts de la Compagnie; de plus le Père Général peut lui accorder des attributions occasionnelles ou permanentes.

Les Constitutions et les Statuts en vigueur actuellement utilisent un langage accessible aux Sœurs plutôt que d'employer des termes techniques et juridiques, toujours plus précis mais moins intelligibles. C'est pourquoi, certains pensent peut-être que le rôle du Directeur n'est pas clairement délimité dans le droit propre de la Compagnie. Le Directoire des Directeurs Provinciaux, approuvé en 1985 par le Père Richard McCullen, en précise les fonctions et explique la façon de les exercer. La rapide évolution de l'histoire, le changement de mentalité des Sœurs, la réalité de la Congrégation de la Mission et d'autres circonstances préconisent la révision de ce Directoire.

Selon le droit actuel propre à la Compagnie, le Directeur Provincial est un prêtre de la Congrégation de la Mission que le Supérieur Général des deux Compagnies nomme, après consultation, pour être son représentant dans chacune des Provinces des Filles de la Charité. Et si la mission du Supérieur Général consiste à aider la Compagnie à se maintenir fidèle à son esprit propre et dans sa mission, celle du Directeur Provincial doit se situer dans cette même direction.

Pour ce qui en est dit dans les Constitutions, je m'attarderai seulement sur trois points qui peuvent poser question et qui de ce fait demandent une explication.

1)«Il partage avec la Visitatrice et son Conseil la responsabilité de promouvoir l'esprit vincentien dans la Province».

Un premier éclaircissement s'impose par rapport à l'autorité du Directeur Provincial. Parmi les différentes définitions possibles de l'autorité, celle du Père Flores l'explique comme «la faculté acquise d'une manière légitime pour pouvoir diriger légalement les membres d'une société ou d'une communauté, afin que ceux-ci puissent atteindre les fins qu'ils se sont proposées d'atteindre en entrant dans la société ou la communauté».

Le Directeur Provincial possède légitimement une telle autorité, aussi bien parce qu'il est le représentant du Supérieur Général que parce que le Droit propre de la Compagnie la lui accorde.

«Partager» précise la convergence des tâches avec la Visitatrice, à qui les Constitutions confient la fonction de direction et de gouvernement immédiat de la Province. Il ne s'agit pas d'une double autorité (Directeur et Visitatrice) mais d'une autorité partagée (Directeur avec Visitatrice). Elle est responsable en dernier ressort du gouvernement et des décisions à prendre. Le Père Flores cite ce «commentaire» du Père Contassot: «De même que le gouvernement immédiat de la Compagnie appartient à la Mère Générale et non pas au Supérieur Général… de la même façon le gouvernement de la Province appartient à la Visitatrice» (et non au Directeur). Pour que l'exercice de cette autorité partagée n'engendre pas de conflits, ils devront l'exercer, l'un et l'autre, en harmonie et complémentarité, et jamais comme une concurrence de pouvoirs, tout en reconnaissant, acceptant et respectant mutuellement l'autorité propre à chacun.

2)«Il collabore à l'organisation de tout ce qui concerne la formation spirituelle des Sœurs, en particulier des Sœurs Servantes».

«Collaborer» signifie travailler avec d'autres personnes. Si la Visitatrice, aidée par son Conseil, a le devoir de promouvoir la vitalité spirituelle et apostolique de la Province, le Directeur partage cette même responsabilité et collabore pour que cette mission devienne une réalité dans la Province.

Dans la Province, la collaboration du Directeur à l'établissement d'un Plan Général de Formation bien structuré et de Commissions spécialisées qui programment et réalisent les activités adéquates, est l'une des meilleures manières de promouvoir la vitalité spirituelle et apostolique de la Province. Les Constitutions renforcent cette collaboration à la formation spirituelle, et nous en verrons plus loin l'explication donnée par le Directoire. Face à l'importance et aussi à la difficulté qu'implique l'office de Sœur Servante, rien d'étonnant à ce que les Constitutions mettent l'accent sur la collaboration du Directeur dans cette formation.

3)«Il fait la visite des Communautés locales demandée par l'Église».

La référence à cette visite nous est donnée par le Canon 628 § 1: «Les Supérieurs établis par le droit propre de l'institut pour cette charge feront au temps fixé la visite des maisons et des membres qui leur sont confiés, d'après les règles de ce même droit». Les Statuts énumèrent quelques-unes des facultés du Père Général, dont celle de «faire personnellement ou par un délégué la visite des Provinces et des Communautés locales demandée par l'Église». Les Statuts précisent également que cette visite «porte sur l'aspect spirituel et vincentien de la vie des Sœurs… et se fait au moins tous les cinq ans». Il s'agit donc de la visite canonique. Dans les communautés religieuses, c'est l'Évêque ou le Vicaire nommé pour cette fonction qui la réalise. Dans la Compagnie, qui est une Société de Vie Apostolique et qui jouit de l'exemption, cette visite est réalisée par le Directeur Provincial.

Parmi tous les thèmes abordés par le Directoire, la visite canonique occupe beaucoup de place. C'est une façon d'en faire ressortir l'importance, et non sans raison car elle est demandée par le Code de Droit Canonique. L'Évêque pourrait presser les Directeurs à réaliser cette visite des Communautés de Sœurs présentes dans son diocèse, et s'ils ne la faisaient pas, il pourrait y envoyer le vicaire pour les religieuses. Cela ne serait pas la première fois qu'une telle chose arrive. C'est pourquoi, je me permets d'insister sur ce point.

Les Constitutions demandent au Directeur Provincial de se tenir à la disposition des Sœurs afin qu'elles puissent s'adresser à lui en toute liberté. Elles réclament de plus en plus une attention personnalisée. Le Directeur Provincial n'est pas un directeur spirituel mais, en fait, nombreuses sont les Sœurs qui ont recours à lui, habituellement ou occasionnellement, comme s'il l'était. La visite canonique est un temps spécial pour promouvoir l'esprit vincentien et la vitalité apostolique, aussi bien au niveau personnel que communautaire. Le Directoire en précise le déroulement.

Je reconnais qu'elle occupera une bonne partie de votre temps, surtout dans les Provinces qui ont beaucoup de Communautés. Dans ce cas, le Directeur est, en général, libéré d'autres ministères. Mais quand son temps est partagé avec d'autres tâches, la priorité devra être accordée en fait et en droit à l'office de Directeur. La pratique du Père Général consiste à ce que la Visitatrice, le Visiteur et le Directeur, d'un commun accord, cherchent une solution pour les cas exceptionnels.

La demande de nomination d'une Sœur Servante pour un troisième triennat ou plus doit être présentée au Conseil Général. Cette demande doit être accompagnée d'une série de renseignements, y compris la date et l'appréciation du Directeur donnée lors de sa dernière visite canonique. La Mère Générale, le Conseil et moi-même, nous déplorons les retards ou les omissions que nous percevons dans la pratique de ces visites. Nous pensons que, quand cela arrive, les Sœurs et les Communautés sont privées d'un dynamisme important et que cela peut aussi contribuer à une certaine dévaluation de l'office de Directeur chez certaines Sœurs. Le Rapport Annuel de la Province que le Directeur envoie au Supérieur Général doit inclure un point concernant les visites canoniques.

2. Le Directeur Provincial selon les Statuts de la Compagnie

Je me limiterai à l'explication de quelques points par rapport au Directeur Provincial qui paraissent ne pas être très bien précisés.

1) Nomination

Elle revient au Supérieur Général; elle est faite après consultation auprès de la Visitatrice, des Conseillères, du Visiteur et du Directeur qui cesse ses fonctions. Cette consultation est limitée parce que souvent les Sœurs ne connaissent pas les Pères suffisamment, ce qui fait que les informations qu'elles peuvent apporter sont peu éclairantes. Le Directeur Provincial est nommé pour six ans et il peut être nommé de nouveau, après consultation. Pour cette seconde nomination possible, le Supérieur Général décide que la consultation sera adressée à toutes les Sœurs de la Province. Car après six ans, les Sœurs ont suffisamment d'éléments pour donner leur avis sur le Directeur et contribuer ainsi au discernement et à la décision du Supérieur Général. Cette nouvelle nomination peut être pour trois ou six ans, selon le jugement de l'autorité.

2) Quelques attributions

  • Les Statuts, en énumérant les différentes attributions du Directeur Provincial, disent: il «préside» l'Assemblée Provinciale et «assiste» au Conseil. La Compagnie considère que l'Assemblée Provinciale est l'un des temps où le Directeur doit apparaître plus clairement qu'il est le représentant personnel du Père Général. C'est pourquoi on lui confie la présidence. Le Directoire des Directeurs et le Règlement de l'Assemblée précisent ses fonctions et la façon de les exercer.

C'est la Visitatrice qui préside et dirige les séances du Conseil. Le Directeur «assiste», ce qui ne doit pas être interprété comme une présence passive. Il y participe et exprime son opinion en toute liberté, lorsqu'il le juge opportun, afin de collaborer à une meilleure étude, au discernement des affaires traitées et à la prise de décisions. Il arrive souvent que les séances du Conseil soient centrées sur les affaires inscrites à l'ordre du jour. Celui-ci est nécessaire, bien sûr, mais les séances de travail sont aussi un temps et un lieu de réflexion et de discernement sur les grands thèmes qui posent question au gouvernement de la Province: la fidélité à l'esprit et à la fin de la Compagnie, la lecture évangélique des signes des temps, la réponse aux nouveaux appels de l'Église et des pauvres, la façon d'assumer la formation aujourd'hui, la pastorale des vocations, la révision des œuvres, la situation des communautés, etc. Le Directeur, avec une vision plus ample, partant d'une autre optique et se sentant dégagé des affaires et des problèmes immédiats, peut contribuer à aider le Conseil à traiter ces grandes questions en profondeur, avec une vue orientée sur l'avenir et dans la sérénité.

Les Constitutions disent aussi que le Directeur préside l'Assemblée Provinciale et assiste aux séances du Conseil. En tant que Président de l'Assemblée, aussi bien le Code de Droit Canonique que le Directoire de l'Assemblée lui accordent la faculté de résoudre les possibles ballottages. Dans la pratique, il est plus prudent de demander une deuxième votation et que ce soit l'Assemblée qui décide. Le fait de lui accorder la faculté ne veut pas dire qu'il soit obligé de l'exercer. Selon la Constitution 3.42, le Directeur ne fait pas partie du Conseil. Il assiste et participe aux séances. C'est pourquoi il ne vote pas et son opinion contraire n'a pas pouvoir de «veto».

Les Statuts énumèrent également les affaires pour lesquelles le Directeur «donne son avis» et celles pour lesquelles il «donne son approbation» au cours des séances du Conseil. Donner son avis équivaut à exprimer son opinion. Il peut la dire librement en ce qui concerne toutes les affaires traitées au Conseil, mais pour les quatre énumérées par les Statuts, il lui est demandé de le faire explicitement. Donner son approbation veut dire prendre une position claire et précise sur les questions se rapportant aux vœux, à l'autorisation de demeurer hors d'une maison de la Compagnie et au renvoi ou à la réadmission d'une Sœur. L'approbation ou l'avis contraire du Directeur ne change ni annule la décision qui aurait pu être prise par le Conseil. Les Constitutions, dans leur principe général, donnent la primauté à la Visitatrice et à son Conseil. Si c'est le Directeur qui décide, on ne respecte pas le principe général. Étant donné que ce sont des affaires importantes dont la solution revient au Conseil Général, celui-ci a intérêt à savoir ce que le Directeur en pense. En connaissance de cause je peux vous dire que le Conseil Général apprécie l'opinion du Directeur et, lorsqu'elle n'est pas consignée, on lui demande de l'exprimer. Il en est de même pour les consultations. (Il est probable que vous ne soyez pas tous d'accord à propos de cette interprétation sur «donner son avis» ou «donner son approbation». Le Père Flores pense lui aussi que la rédaction des Statuts n'est pas claire et qu'elle devrait être améliorée lors de la prochaine révision).

Le Directeur doit être au courant de la marche de la Province. Et l'un des meilleurs moyens d'y arriver consiste à assister et à participer au Conseil. C'est pourquoi il conviendrait qu'il assiste à toutes les séances et non seulement à celles où il s'agit des affaires pour lesquelles les Statuts demandent son opinion ou son approbation. Dans le cas contraire, il se détacherait de la réalité de la Province. Les Directives pour les Visitatrices soulignent que lorsque le Directeur est empêché d'y assister, la Visitatrice lui soumettra par écrit, aussitôt après la séance, les projets proposés et les décisions prises».

  • On demande au Directeur de donner son avis sur «l'utilisation des biens de la Province en matière importante». On peut entendre par «matière importante» la somme qui dépasse le montant maximum des dépenses autorisées par le Conseil Général à la Province. L'opinion du Directeur devra être une aide pour faire un bon usage de ces biens.

Les Sœurs qui ont des biens personnels demandent au Directeur la permission de les utiliser en «œuvres pies». Pour ne pas favoriser des différences en ce qui concerne le style de vie des Sœurs, le Directeur les aide à discerner la façon dont elles peuvent utiliser les revenus qu'elles retirent de leurs biens personnels. Il ne peut autoriser une autre destination que des «œuvres pies». La fidélité au vœu de pauvreté va plus loin que la simple demande et les permissions accordées.

3.Le Directeur Provincial selon le Directoire

D'aucuns pensent que les Constitutions et les Statuts proposent une image imprécise de l'office et des compétences du Directeur Provincial. Je crois que l'on ne peut dire la même chose du Directoire. Il précise les traits qui sont, peut-être, un peu estompés dans les autres documents et, surtout, il explique clairement et dans le détail ses fonctions et la façon de les accomplir.

Un temps consacré à la lecture personnelle de ce document est prévu pour cet après-midi. Je ne vais donc pas m'arrêter maintenant à présenter tout ce dont il est question. Il est possible aussi que la Compagnie introduise quelques changements concernant le Directeur quand elle révisera les Constitutions lors de la prochaine Assemblée Générale. Au cas où cela arriverait, il faudrait aussi réviser le Directoire. En suivant la même ligne, je vais en souligner deux points sur lesquels il nous faut réfléchir étant donné l'importance et les difficultés qui peuvent se présenter dans la pratique.

  • Les Constitutions et les Statuts déterminent quelle est l'autorité de la Visitatrice et celle du Directeur dans la Province. Il n'est pas toujours facile d'exercer une autorité partagée et complémentaire. C'est pourquoi le Directoire parle longuement de l'esprit qui doit animer les relations entre ces deux supérieurs. Il s'agit de collaboration et de complémentarité, jamais de concurrence de pouvoirs. Les deux exercent l'autorité comme un service pour que la fidélité à l'esprit et à la fin de la Compagnie soient vécues dans la Province. L'humilité, la simplicité et la charité sont les vertus qui peuvent le mieux contribuer au bon exercice de l'autorité ainsi qu'à mieux surmonter les conflits qui pourront surgir. L'estime et la confiance mutuelle, les rapports fréquents et cordiaux entre la Visitatrice et le Directeur ne signifient pas qu'ils doivent être toujours d'accord en tout. Les possibles divergences doivent permettre d'éclairer la réalité avec des lumières différentes, mais jamais antagonistes.

Il est normal que la Visitatrice et son Conseil aient à faire face à des situations difficiles, par exemple par rapport à la révision des œuvres, à des conflits aigus au sein des communautés, dans les relations avec différents organismes, etc. La proximité du Directeur à ces moments-là, ses conseils et son soutien sont plus que des attributions de son office, ce sont des signes de solidarité et d'affection fraternelle.

Dans les relations entre la Visitatrice et le Directeur, il y a un aspect auquel il faut veiller tout particulièrement: il ne faut pas donner lieu à ce que les Sœurs puissent percevoir que l'opinion de la Visitatrice est la même que celle du Directeur ou vice versa. Il est possible qu'une Sœur soit contrariée et prenne ses distances ou avec la Visitatrice ou avec le Directeur. Si les Sœurs les considèrent comme semblables l'un à l'autre, ils ne seront plus une porte ouverte à laquelle elles pourront frapper dans l'espoir d'être accueillies et écoutées.

  • Les Constitutions confient au Directeur la responsabilité particulière de la formation spirituelle des Sœurs. Le Directoire développe cette responsabilité et la précise: «Le Directeur doit, dans toute la mesure du possible, suivre toutes les étapes de la formation: aspirantes, postulantes, séminaristes, jeunes Sœurs qui se préparent aux Vœux, ou les ayant émis. Il participe à la recherche des thèmes, à l'élaboration des programmes, au déroulement des rencontres et au choix des intervenants, en particulier au sein de la commission de formation. Ce point exprime l'importance de la collaboration du Directeur en tout ce qui concerne la formation. C'est la vitalité spirituelle des Sœurs et la qualité de leur service auprès des pauvres qui est en jeu. Il est évident que l'on ne peut demander à un Directeur d'être un expert dans les différents domaines de la formation, mais il lui est demandé de s'y intéresser fortement pour pouvoir la stimuler. Le Guide pour la Formation Initiale, élaboré par une Commission formée de Sœurs impliquées dans la formation et publié il y a deux mois, avec l'approbation des Supérieurs Généraux, demande à plusieurs reprises cette collaboration du Directeur.

La préoccupation principale du Directeur est d'encourager la réalisation du Plan Général de Formation élaboré par le Conseil Provincial avec l'aide de la Commission spécialisée et des Commissions techniques. Il est prévu qu'au cours de ce mois, une Commission formée de Pères Directeurs et d'une Conseillère Générale nous présente les grandes lignes d'un Plan de Formation au niveau provincial.

En ce qui concerne l'animation spirituelle des Sœurs, la retraite annuelle a une importance particulière. Le Directoire confie sa programmation au Directeur Provincial et à la Visitatrice. Si dans la pratique, une autre Sœur les programme et cherche les prédicateurs, il est souhaitable qu'un dialogue s'établisse avec le Directeur. L'Assemblée Générale de 1997 a approuvé une proposition confiant à chaque Province la mission de déterminer les modalités les plus adéquates pour revitaliser les huit jours de retraite annuelle. Le Directoire souligne l'importance de la présence et de la disponibilité du Directeur se tenant à la disposition des Sœurs pendant ce temps fort de leur vie spirituelle.

Conclusion

La Congrégation de la Mission et la Compagnie des Filles de la Charité ont écrit, durant presque quatre siècles, une histoire d'union et de collaboration. Ce sont les fondateurs qui l'ont commencée, et nous, Prêtres et Sœurs, nous en sommes les héritiers. Le Directeur Provincial a été et continue d'être la figure incarnant le mieux, dans la pratique, cette union et cette collaboration. La façon de concevoir et d'exercer cet office ou ce ministère a changé à travers l'histoire, parfois en raison de l'évolution du Code de Droit Canonique, d'autres fois à cause de l'évolution du droit propre de la Compagnie. Celui-ci nous montre la manière dont les Filles de la Charité d'aujourd'hui comprennent le rôle du Directeur Provincial. C'est à elles qu'il revient aussi de dire comment il devra être à l'avenir. Il est tout à fait justifiable, étant donné la maturité de plus en plus grande des Sœurs et la sensibilité de la culture actuelle face à l'égalité et au féminisme, que la fonction du Directeur Provincial se déplace davantage vers l'aspect spirituel et pastoral. Au fond, c'est cette collaboration que les fondateurs ont peut-être cherchée, même si à leur époque et également après elle, celle-ci a été exprimée par des liens juridiques d'autorité.

Les Constitutions, les Statuts de la Compagnie et le Directoire reconnaissent l'autorité propre du Directeur Provincial. Il l'exerce en collaboration avec la Visitatrice, principale responsable du gouvernement de la Province. Ensemble ils doivent concevoir leur office comme un service de complémentarité, orienté pour favoriser un dynamisme fidèle à l'esprit et à la fin de la Compagnie dans l'Église.

Les Constitutions et les Statuts de la Compagnie présentent le portrait du Directeur Provincial. Le Directoire des Directeurs Provinciaux décrit en détail ses fonctions et la façon dont il doit les réaliser. Mais il faut reconnaître que dans le contexte actuel, la réalité vécue par les Pères et les Sœurs dans les différentes Provinces, les qualités et les limites du Directeur, des Visitatrices et des Sœurs, ont une influence certaine sur la manière concrète d'exercer cet office. Plusieurs Sœurs nous le diront tout à l'heure. Demain, quelques Directeurs nous présenteront également différentes expériences dans la façon dont ils réalisent ce service.

L'évolution de l'office de Directeur Provincial est incontestable, elle se situe dans le sens d'un mouvement qui va de la capacité de décision au domaine de l'animation spirituelle et apostolique. Malgré cela, le Père Richard McCullen, dans sa présentation du Directoire des Directeurs, adressait ces paroles aux Directeurs et aux Sœurs: «Il y a eu une certaine évolution dans l'office de Directeur. Que personne, cependant, ne sous-estime l'importance du Directeur comme animateur spirituel et guide de la vie des Sœurs et des activités de la Province: agir ainsi serait, non seulement être infidèle aux vues profondes de saint Vincent et de sainte Louise, mais finalement diminuerait la vitalité de l'apostolat des Sœurs auprès des Pauvres».

(Traduction: Centre de Traduction - Filles de la Charité, Paris)

S. 36.

Cf. C. 3. 28.

C. 3. 38.

Cf. C. 3. 36.

C. 3. 38.

C. 3. 38.

S. 35.

S. 46.

Directoire pour les Directeurs Provinciaux, Pages 20-22.

Cf. Directoire, p. 24, nº 65.

Cf. Directoire, p. 23, nº 61.

Cf. S. 46.

Cf. C. 3. 49.

Cf. C. 3. 42.

Cf. Canon 119 § 2º.

Nº 72. 5.

Cf. Directoire, nº 20.

S. 46.

Cf. Directoire, p. 13, nº 20.

Cf. Lexique: Approbation du Directeur Provincial.

Cf. Directives pour la Visitatrice et son Conseil, p. 21.

S. 46.

Cf. C. 3. 55 § 3º.

Cf. C. 2.7; S. 46.

Cf. Directoire, p. 19, nº 46.

Cf. Directoire, p. 9 - 10.

Directoire, p. 14, nº 26.

Cf. Directoire, p. 13 - 14, nº 23 - 25.

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