L'Aumônier des Mouvements Vincentiens

L'Aumônier

des Mouvements Vincentiens

Lauro Palù, C.M.

Assistant Général

chargé des Mouvements Vincentiens

L'inspiration première, pour nous qui travaillons comme aumôniers (conseillers) des mouvements laïcs, appelés aujourd'hui vincentiens, vient justement de saint Vincent et de sainte Louise (1). Après avoir lancé les Confréries de la Charité, saint Vincent leur donna leurs règlements (nous en connaissons beaucoup pour des confréries féminines, masculines ou mixtes). Les Missionnaires devaient fonder de nouvelles “Charités” là où ils prêcheraient les missions, et en établir dans toutes leurs oeuvres. Tout spécialement saint Vincent forma sainte Louise pour qu'elle fût la première “conseillère” des “Charités”, leur animatrice et formatrice.

Saint Vincent était un homme pratique. Il voulait que l'on repère les pauvres vraiment indigents, il voulait savoir le prix des choses en chaque région, il demandait que l'on coupe la viande en petits morceaux si le malade n'avait pas de dents, - mille détails qui indiquent la grandeur de son amour. (Dans la richesse extraordinaire des détails pratiques, nous rencontrons, me semble-t-il, la main de plusieurs collaborateurs de saint Vincent, et en premier lieu celle de sainte Louise). C'était un homme de foi, inspiré par l'Evangile, par la personne, les paroles et les manières d'agir de Jésus-Christ. Il fallait servir les pauvres avec douceur, mansuétude, cordialité, patience, tendresse, respect, dévotion. Il parlait des pauvres comme du sacrement de Jésus-Christ: il faut voir Jésus en eux. Il disait que les pauvres sont nos maîtres et seigneurs. D'autres fois, il leur disait: il faut voir les pauvres avec les yeux de Jésus-Christ, avec l'estime qu'il avait pour eux. Pour faire les oeuvres du Christ, affirmait-il, il faut nous revêtir de son esprit; une Congrégation peut tout si elle est animée par l'Esprit de Dieu, nous devons agir en tout avec les sentiments de Jésus-Christ, etc. En vrai prophète, saint Vincent dénonça les maux auxquels les pauvres étaient soumis, il proclama leur dignité, il annonça le projet de Dieu de les sauver par Jésus-Christ et il entreprit des actions transformatrices en leur faveur.

Saint Vincent était un extraordinaire formateur des bonnes volontés, attentif aux détails qui assureraient le bon fonctionnement des oeuvres, leur continuité et leur développement au cours du temps. Tout se basait sur le contact personnel avec les pauvres et sur l'amour qu'il leur vouait et qu'il savait transmettre à ses collaborateurs.

Dépassant les schémas du cléricalisme, saint Vincent a su faire confiance aux laïcs qu'il savait rencontrer, former et envoyer ensuite aux plus indigents, là où ils se trouvaient, où ils se cachaient. De façon spéciale, il a su faire confiance aux femmes et leur attribuer des responsabilités sociales et ecclésiales très concrètes et qui exigeaient beaucoup d'engagement. Connaissant le pouvoir évangélisateur des pauvres, il activa aussi le potentiel apostolique de ceux qu'il préparait pour leur service, qui en prendraient soin matériellement et spirituellement, de façon intégrale, corps et âme, individuellement et en famille, à l'hôpital et dans leurs foyers, quand ils en reviendraient, donnant à manger et offrant en temps opportun des semences et des instruments agricoles, etc. En cette sphère du corporel et du spirituel, saint Vincent fut certainement aidé par l'expérience des laïcs et spécialement des Filles de la Charité. L'évangélisation sera intégrale et ira plus loin que la simple annonce de l'Evangile; elle dépassera le seul niveau de l'assistance pour arriver à la promotion. Autant aux Dames qu'aux Soeurs, saint Vincent disait: vous révélez aux pauvres la bonté de Dieu par la vôtre (Coste XIII, 781; IX, 253).

“C'est ainsi que nous pouvons voir en saint Vincent le modèle du conseiller, discernant en lui l'homme qui part de la réalité, le croyant (prêtre) qui voit le Christ dans le pauvre, qui exige pour lui le plus grand respect, qui ne sépare pas l'amour pour Dieu de l'amour du prochain, l'organisateur; le prêtre qui fait pleinement confiance au laïc et, concrètement, à la femme; l'homme de sens pratique, qui présente clairement les objectifs et les moyens des Confréries, qui cherche la promotion intégrale de la personne, qui transmet son propre charisme à tous pour le bien des pauvres. C'est tout cela que saint Vincent inculque à sainte Louise, sa collaboratrice fidèle et efficace, et aux Dames, dans ses entretiens et ses homélies” (Alvaro Quevedo, “Asesoría en la AIC”, dans la revue CLAPVI, n° 59, 1988; p. 212).

Notre rôle d'aide aux laïcs vincentiens

Le Statut 7 de la Congrégation dit: “Les Missionnaires auront un soin particulier des Associations de laïcs instituées par saint Vincent lui-même ou dérivant de son esprit; elles ont droit, en effet, à notre sollicitude et à notre soutien. Tous les confrères indistinctement doivent être prêts à rendre ces services; toutefois il sera bon que quelques-uns d'entre eux se spécialisent en ce domaine. On veillera à donner à cette animation une dimension spirituelle, ecclésiale, sociale et civique”.

Il y a ici deux réalités complémentaires: le droit des laïcs à notre aide et notre devoir à leur égard. Et dans ce Statut il y a aussi deux prescriptions pour nous: quelques-uns doivent se spécialiser comme conseillers des mouvements laïcs et tous doivent leur venir en aide avec une orientation vincentienne, décrite ici dans ses dimensions spirituelle, ecclésiale, sociale et civique. En réfléchissant sur le travail et les qualités des animateurs des mouvements vincentiens, il faudra approfondir ce que signifient ces diverses dimensions.

Dans une étude sur le rôle des conseillers vincentiens aujourd'hui (publiée dans la revue CLAPVI, année XXII, n° 93, 1996; pp. 324-336), le P. Antonio Elduayen développe ainsi les dimensions que nous devons donner à la fonction d'aumônier: Religieuse (vie spirituelle, sacrements, célébrations); ecclésiale: communion et participation à la vie et au projet organique de l'Eglise (diocèses, paroisses, groupes apparentés); vincentienne: vocation et esprit, sens de ce qui est “vincentien” et appartenance à la Famille Vincentienne; mariale: Marie, sous l'invocation de Notre Dame de la Médaille Miraculeuse, en tant que mère, modèle, guide et protection; missionnaire, au service de la nouvelle évangélisation assumée comme objectif et méthode; sociale: intégrant la charité théologale, d'assistance, de promotion et de libération (dimension politique, sur les structures) pour rendre effectif l'Evangile; organisatrice: objectifs et modes d'action généraux de l'Association d'après les statuts.

En pensant spécialement aux Jeunesses Mariales, quand je préparais ces pages pour leurs aumôniers, je sentais qu'il y avait certaines choses à éviter, dans notre façon d'agir, et qu'il y en avait d'autres à entretenir dans le cœur des jeunes. Ce qu'il faut éviter, c'est le paternalisme, le dirigisme, les éloges allant jusqu'à dire que nous sommes fiers des jeunes, de leur gentillesse. Et de même, il ne faut pas donner à notre action un caractère de folklore. Les jeunes sont gentils mais ne sont pas des pantins qu'on peut faire danser... Ce qu'il faut cultiver dans le contact avec les jeunes, les dimensions sur lesquelles nous devons insister, sont: la prière, la direction spirituelle, les valeurs humaines, les activités pastorales, le choix d'une vocation, le travail en équipe. Dans le texte des Statuts internationaux que le Supérieur Général va envoyer aux associations nationales pour préparer leur approbation, ces aspects sont présents dans la “finalité” de l'Association (à l'article 9 de la première rédaction).

FINALITÉ: La contemplation du Christ et le regard attentif, à l'exemple de Marie, seront la source d'énergie et la force qui permettront à l'Association d'atteindre les fins suivantes:

1°Former les membres à vivre dans une foi solide à la suite de Jésus-Christ évangélisateur des pauvres.

2° Vivre et prier, comme Marie, dans la simplicité et l'humilité en assumant la spiritualité du Magnificat.

3° Susciter, animer et garder l'esprit missionnaire dans l'Association, surtout au moyen des expériences missionnaires, en particulier parmi les plus pauvres et les jeunes.

4°Préparer les membres de l'Association, individuellement et communautairement, à collaborer, dans l'Eglise et la société, avec les autres agents pastoraux, en suivant les orientations de la hiérarchie de l'église universelle et locale.

Autonomie des mouvements vincentiens

Nos relations avec les Filles de la Charité sont réglées par nos Constitutions respectives. Celles des Soeurs disent: “Depuis son origine, la Compagnie a voulu être soumise à l'autorité du Supérieur Général de la Congrégation de la Mission , successeur de saint Vincent de Paul. Il a sur elle le double pouvoir dominatif et de juridiction , reconnu par l'Eglise et les Constitutions. Les Filles de la Charité le reconnaissent et l'acceptent comme le représentant de Dieu, qui les aide à se maintenir dans leur esprit propre et à remplir leur mission dans l'Eglise” (3, 27). “Le Directeur Général est un prêtre de la Mission nommé directement par le Supérieur Général ad nutum, pour être son représentant permanent auprès de la Compagnie. (...) Il veille aussi à ce que la vie des Soeurs et leur action apostolique se réalisent toujours dans la fidélité à leur vocation” (3.28).

Ces deux citations nous disent déjà que par la charge de conseiller, que nous remplissons envers les autres, il s'agit de les aider à vivre leur propre charisme dans l'Eglise. Il en sera ainsi avec les laïcs. Par exemple, la Société de Saint Vincent de Paul, fondée par Frédéric Ozanam en 1833, est une association privée de fidèles, dirigée et gouvernée par des laïcs et reconnue par le Saint-Siège. Elle n'a aucun lien juridique avec la Congrégation de la Mission. Néanmoins, entre les deux il y eut toujours une longue histoire d'intime et cordiale coopération.

Les relations juridiques des divers groupes d'Associations mariales avec notre Congrégation sont de différents types. Cependant, le Supérieur Général est communément leur Directeur Général, selon les statuts de chaque groupe, et c'est lui qui nomme le Directeur National.

Le Supérieur Général est aussi le Directeur Général des Associations de la Médaille Miraculeuse.

L'Association internationale des Charités qui regroupe dans un immense organisme les associations nationales de Volontaires (les anciennes Dames de la Charité), est une association publique de chrétiennes et de chrétiens, dirigée selon son propre règlement et ses statuts, dans le cadre des canons 298-320 du Code de Droit Canonique. Saint Vincent fonda l'Association en 1617. En 1971, le P. James W. Richardson, Supérieur Général, renonça à son pouvoir juridique sur cette Association au niveau international, tout en conservant son rôle au double niveau national et local. L'Association a un assistant ecclésiastique qui, en vertu du canon 317, §1, est nommé par le Saint-Siège, après consultation de la direction internationale de l'Association. Pour choisir l'assistant (cf. Règlement, 3), l'AIC présente divers noms au Saint-Siège, avec l'accord du Supérieur Général de la Congrégation de la Mission. C'est parmi les prêtres de cette Congrégation que les assistants ont été choisis. Aux niveaux local, régional et national, il faut voir ce que disent les statuts sur le Supérieur Général et la façon de nommer les assistants.

Le rôle de l'“assesseur” (assistant) des mouvements laïcs

Je le propose à tous ce qui suit, à la lumière du Statut 7: Quelques uns d'entre nous devront se spécialiser en ce domaine, mais nous avons tous le devoir d'aider les mouvements laïcs.

Le mot “asesorar” (assister, conseiller) vient du latin “assidere” (ad sedere), s'asseoir en compagnie de quelqu'un, à son côté. C'est tout un programme. Il y a deux types d'assistance: l'un est directif, l'autre plus libérateur. (Je suis les suggestions méthodologiques du P. Alvaro Quevedo dans l'article cité dans la bibliographie). La première caractéristique peut paraître négative, mais elle est didactique, en opposant clairement deux façons de proposer l'assistance aux groupes. Il n'est pas évident que ce modèle soit automatiquement dépassé parce que le temps a passé. Montrer les déficiences d'une pratique est une façon d'aider à corriger ce qui ne va pas. Il y a ici de quoi réviser nos méthodes de travail avec les groupes laïcs en général.

1. L'assistance directive: Dans le schéma de l'Eglise cléricale, tout était conçu comme si le “directeur” savait tout et que les laïcs étaient “des mineurs”, dépendants du prêtre en tout. Le modèle était la pyramide, où le poste le plus haut était occupé par les prêtres, les religieux et religieuses, les évêques et le Pape. Le prêtre était responsable de tout, les laïcs demeuraient passifs. Le directeur conduisait, c'était lui qui savait les choses, c'est pour cela qu'il enseignait. On peut critiquer fortement cette manière de voir cléricale, pour les conséquences qu'entraîne ce paternalisme, qui finissait par dépersonnaliser les laïcs, qui devaient écouter, obéir, suivre ce qui était prescrit, sans dialogue, sans participation, sans responsabilités personnelles. C'était la vérité du directeur qui prévalait et s'imposait, sans donner d'importance à l'expérience du groupe. Parfois il n'y avait pas de problèmes apparents, parce qu'on n'évaluait pas les actions ou les tâches, les résultats, la méthode, toute la procédure.

Avec une telle manière d'agir, on finit par développer la passivité, on n'éveille pas le sens critique, on ne raisonne pas, on tombe dans l'autoritarisme, on stimule l'individualisme, le groupe ne s'enrichit pas parce qu'il ne partage rien.

2. L'assistance non directive, de type libérateur: A l'opposé, on peut donner une assistance différente, fruit d'une autre vision de l'Eglise. Maintenant, dans l'ecclésiologie de Vatican II, on parle du peuple de Dieu, où nous sommes tous égaux, même quand nous occupons des places différentes, avec des fonctions différentes, en servant nos frères. Nous ne pouvons plus traiter les laïcs comme des objets de notre zèle, de notre direction, de notre autorité. En tant que sujets qu'ils sont, comme nous, de leur vie et de leur réponse à Dieu, les laïcs doivent apporter leur contribution avec leur charisme personnel, leur expérience, leurs talents, leurs idées, leur capacité d'aimer et de servir, de façon responsable et adulte. Nous rejoignons l'idée de saint Vincent: les pauvres nous évangélisent, ce sont nos maîtres, il faut nous mettre à leur école (et fréquenter leurs cours!). Avec les laïcs, nous ne passons pas notre temps à enseigner mais à nous former, dans le processus de transformation de la société et du monde.

On dit que ce genre d'assistance est libérateur, parce que, en suscitant la participation active des personnes et en les formant à la participation, il libère le pouvoir transformateur qu'il y a en chacun de nous. Par ce processus actif de participation, on est aidé à passer d'un état d'ingénuité ou de fascination à un sens critique qui cherche à connaître la réalité telle qu'elle est, avec ses valeurs positives et ses déficiences, les ambiguïtés qu'il y a dans les personnes et les limites qu'il y a dans les choses. Avec tous ces efforts pour connaître la réalité et les personnes, pour participer aux processus dans lesquels nous sommes insérés avec l'ouverture au dialogue, à la réflexion, au partage des responsabilités, chacun est aidé à prendre conscience de sa dignité et de sa valeur, s'affermissant pour transformer la réalité et contribuer au bien de tous, surtout des plus déshérités et abandonnés. Sur ce plan, peut-on dire, un tel type d'assistance est plus approprié à notre option fondamentale en faveur des pauvres.

Fonctions et qualités d'un aumônier

Fonctions et tâches ou mission de l'aumônier: L'aumônier d'un groupe vincentien doit aider ses membres à vivre une expérience d'Eglise, à travailler pour les plus indigents de leurs frères, en s'inspirant de l'amour de Jésus-Christ pour les pauvres. En cela, l'objectif de nos groupes vincentiens ainsi que leur style de vie et de travail sont déjà indiqués. Par son office, l'aumônier doit aider nos groupes à se situer dans une ligne authentiquement évangélique, face aux problèmes qui affligent les pauvres aujourd'hui.

Basé sur l'Evangile, sur saint Vincent et sur la doctrine sociale de l'Eglise, l'aumônier doit contribuer à ce que les groupes, puisant leur source d'inspiration à ce même charisme qui nous est propre, se forment et servent les pauvres comme des apôtres. En tant qu'aumônier, il doit aider à ce que le groupe se développe, en facilitant la dynamique du groupe qui permet aussi chaque personne en particulier de grandir. Sa tâche, par conséquent, se réfère au groupe en lui-même et aux travaux apostoliques du groupe.

Le P. Jaime Corera résume ainsi la spiritualité vincentienne que nous transmettons aux laïcs: “Dans la spiritualité ou vision spirituelle chrétienne propre à saint Vincent de Paul, le laïc (...) est appelé à vivre sa foi baptismale (sa sainteté) en se dévouant activement au salut corporel et spirituel des pauvres. Il doit le faire en lien avec d'autres personnes dans une institution organisée (confrérie, association ou communauté) avec une façon d'agir et de ressentir qui soit simple, humble et remplie de la charité du Christ lui-même” (Jaime Corera: “L'aumônier des Mouvements Laïcs Vincentiens”; dans CLAPVI, année XXII, n° 90-91, 1996, pp. 54-63; ce sont les pp. 58-59, dont j'ai souligné quelques aspects, qui sont citées ici).

Avec les adaptations requises, on peut appliquer aussi aux autres groupes vincentiens avec lesquels nous travaillons ce que Claire Delva, ex-présidente de l'AIC, première et principale organisatrice au niveau international des “Volontaires de la Charité”, communiqua aux Visiteurs réunis à Bogota, en 1983; cela signifie que les membres de l'Association Internationale des Charités, de toutes parts, nous demandent ceci:

- soyez attentifs à nos efforts,

- soutenez-les et encouragez-les,

- reconnaissez notre capacités en tant que femmes laïques responsables,

- acceptez la valeur de notre groupement au niveau national et international, notre identité propre, notre autonomie face à d'autres organisations charitables et d'entraide,

- collaborez avec nous à tous les niveaux possibles, clercs et laïcs unis et responsables, coopérant sur un pied d'égalité”. (Et Claire Delva ajouta, au nom de toutes les Volontaires du monde: “C'est à tout cela que nous nous engageons nous aussi”). (Apud Alvaro Quevedo, op. Cit., p. 219).

En revenant encore à la première rédaction des Statuts Internationaux que le Supérieur Général est en train de préparer, on y voit que “Pour atteindre ses objectifs, l'Association met à la disposition de ses membres tous les moyens qu'elle estime convenable:

a) elle développe l'intériorisation de la Parole du Seigneur et la célèbre. Elle met en valeur la prière de groupe et la liturgie car le Christ se rend présent dans la Parole, l'Eucharistie et parmi ceux qui sont assemblés pour la prière;

b) elle offre un cheminement catéchétique de formation pour mûrir dans la foi: d'inspiration catéchuménale, avec ses étapes, ses objectifs et ses activités;

c) elle fait connaître aux membres ce que dit la Sainte Ecriture et l'Eglise au sujet de la Vierge;

d) elle promeut la connaissance de saint Vincent, de sainte Louise, de sainte Catherine et des autres témoins de l'Eglise qui ont vécu l'Evangile en s'adonnant à la charité;

e) elle offre aux membres la possibilité de servir les pauvres;

f) elle promeut des sessions d'études, des écoles de catéchistes, des congrès, des assemblées, des publications et autres instruments de pastorale et de communication sociale.”

Evidemment, la place de l'aumônier est là où se réalisent ces activités de formation, soit qu'il les anime lui-même, soit qu'il s'intègre dans les équipes qui les soutiennent. Il y a mieux que de “donner aux jeunes les conditions” pour faire tout cela; c'est de “créer avec les jeunes les conditions” pour faire tout cela. Et cela est une très bonne description des tâches et des méthodes de travail d'un aumônier.

2. Les qualités d'un aumônier: Nous n'avons pas le monopole de l'assistance des groupes laïcs vincentiens ni du Volontariat de la Charité. Cependant, plus encore que les autres aumôniers, parce qu'on nous demande fréquemment de contribuer à la formation de nouveaux aumôniers, qu'il s'agisse de Soeurs ou de laïcs, les qualités que nous devons personnellement cultiver dans notre cœur pour cette fonction, sont les suivantes:

a) Nous devons être des personnes de foi, disposées à transmettre aux autres le feu qui nous embrase.

b) Pour être animateurs, nous devons être capables de stimuler le développement des personnes et des groupes, de ne pas être tout le temps à critiquer les faux pas, les moindres défauts; il faut découvrir ce qu'il y a de bon dans les processus, appuyer les signes de bonne volonté et croire en l'avenir; il faut préparer le futur avec la patience et l'organisation requises par nos tâches et un esprit optimiste et courageux. Il ne s'agit pas d'expliquer les paroles de saint Vincent, mais plutôt de communiquer son esprit de façon vivante et créatrice.

c) Pour encourager les laïcs à travailler avec les pauvres et les déshérités, nous devons savoir leur transmettre un message toujours positif, joyeux et plein d'espérance, dans la certitude que nous apportons l'amour de Dieu pour les derniers et les exclus. Saint Vincent le disait (Coste XI, 392): Il faut annoncer que le Royaume de Dieu est pour les pauvres. Il faut le faire comme les femmes que le Seigneur ressuscité envoya annoncer aux apôtres sa victoire sur la mort, sur le péché et sur toute forme de mal.

d) Inspirés par saint Vincent, vivant son charisme dans une spiritualité d'engagement apostolique auprès des pauvres, nous devons travailler dans la ligne que l'Eglise nous prescrit: c'est une ligne de “promotion” et de justice, conforme à notre esprit qui est empreint d'“un amour simple, humble, cordial, un amour audacieux et inventif” (extrait du Document de Base de l'AIC).

e) Pour aider les laïcs à lire les signes des temps et à les interpréter à la lumière du Christ et de l'Evangile (et non à celle de la télévision...), nous avons besoin du don de discernement. Nous le chercherons au contact de la Parole de Dieu, lue avec les yeux des pauvres, dans la Bible et dans la vie de chaque jour.

f) Un aumônier doit toujours cultiver de bonnes relations humaines, d'une manière fraternelle, pleine d'amitié chrétienne, d'union dans le service et d'amour pour la Famille Vincentienne.

“Dans des réunions d'aumôniers et de laïcs vincentiens, on entend maintes fois des demandes comme celles-ci: Nous, les laïcs vincentiens, nous voulons des aumôniers qui se comportent en serviteurs, en amis, en accompagnateurs, en toute sincérité et justice, qu'ils nous communiquent leur enthousiasme et nous stimulent, qu'ils nous fassent avancer dans le partage des responsabilités, dans l'engagement, dans la vie chrétienne et vincentienne, qu'ils nous donnent de l'assurance dans notre cheminement avec Jésus au service du frère opprimé et abandonné” (Alvaro Quevedo, op. Cit., p. 220).

Une telle façon de présenter une kyrielle de qualités, pensons-nous parfois, ne prend pas en considération notre réalité personnelle: nous ne sommes pas tous si doués. On ne peut espérer, de fait, que l'aumônier soit un surhomme sans défauts et pourvu de tous les dons de la nature et de la grâce... Il nous suffit d'une bonne volonté sans mesure, d'un effort constant, d'une aptitude à évaluer et à adapter notre comportement, du courage de reconnaître nos limites et, en conséquence, de l'effort pour améliorer chaque fois notre apport, surtout en préparant bien nos activités et nos tâches.

L'aide réelle aux laïcs dans les Provinces

La Commission Préparatoire de l'Assemblée Générale de 1998 a résumé les réponses des Provinces au questionnaire envoyé par le Supérieur Général sur le thème de cette Assemblée. En ce qui concerne le thème, La Famille Vincentienne dans le monde et les défis de la Mission au Troisième Millénaire, les réponses de 21 Provinces disent qu'il faut se connaître, coordonner nos activités et travailler ensemble; 16 demandent que l'on précise ce qui nous unit en tant que Famille Vincentienne, la spiritualité vincentienne; 12 désirent que l'on contribue à la formation et à l'animation des groupes de la Famille Vincentienne; 3 souhaitent que l'on crée des structures de coordination; 4 disent que nous devons nous offrir une aide spirituelle réciproque.

Quant à l'unité et à la coopération entre les diverses branches de la Famille Vincentienne, les réponses ne furent pas toujours évidentes. J'attendais plus de collaboration, par exemple, entre nous et les Filles de la Charité. Mais seulement 5 Provinces ont signalé qu'il y a un niveau de coopération élevé. Pour 15 Provinces, un tel niveau est bon; il est seulement passable pour 6 (un Missionnaire est leur Directeur, quelques-uns collaborent à la direction spirituelle dans les retraites et les exercices annuels et pour les confessions); en 10 Provinces il y a seulement une coopération sporadique ou accidentelle. En deux autres, il n'y a aucune collaboration; dans une autre encore, on coopère sans aboutir à un projet commun; deux Provinces sont en train d'amorcer leur coopération. Une autre signale le besoin de nouvelles formes de coopération sur un pied d'égalité.

Entre les membres de notre Congrégation et la AIC, il existe une étroite collaboration dans 6 Provinces; dans 9 autres on note un certain intérêt de la part de quelques missionnaires, qui sont aumôniers ou conseillers spirituels des “Volontaires”. En 17 Provinces, on commence à collaborer. En 11 autres, les Volontaires n'existent pas ou ce n'est pas nous qui nous en occupons.

Entre nous et la Société de Saint Vincent de Paul, il y a en 14 Provinces un ou plusieurs Confrères qui sont engagés comme aumôniers et membres actifs de la Société et qui travaillent à des projets communs; en 9 autres il y a de bonnes relations au plan général et le désir de collaborer de plus en plus; en 16 Provinces, la relation est faible, en 5 autres elle est pratiquement inexistante. Dans une Province la Société n'est pas établie.

Entre les Confrères et les Associations Mariales (Jeunesse Mariale Vincentienne, Mouvement Marial, Enfants de Marie, etc.), les liens sont étroits en 10 Provinces où quelques Missionnaires sont directeurs et animateurs; en 6 Provinces il existe une relation intermittente, insuffisante, peu enthousiaste. Dans 4 Provinces, on commence des groupes de Jeunesse Mariale; en 4 autres il y a des groupes, mais ils sont animés par les Soeurs et non par nous. Et 21 Provinces n'ont pas de groupes de Jeunesse Mariale. Cependant, en presque toutes les Provinces il y a des groupes de jeunes, mais sans caractère vincentien.

Entre les Confrères et les Associations de la Médaille Miraculeuse, il n'y a pas de lien en 29 Provinces (c'est, en général, parce qu'il n'y a pas d'Association). En 17 Provinces il y a une certaine relation, bien qu'elle soit souvent limitée au plan spirituel (célébration de neuvaines, etc.). Quelques-unes publient des bulletins pour les associés. La relation entre les Confrères et les Associations de la Médaille Miraculeuse est presque toujours informelle et anonyme, (sauf en quelques pays où l'Association a des objectifs définis et une organisation structurée).

Entre les Missionnaires et les autres groupes de la Grande Famille Vincentienne il y a quelque contact, disons une certaine collaboration active, dans 21 Provinces. Parmi celles-ci, 2 seulement estiment que leur relation est dynamique. Chez les autres elle se réduit à quelques célébrations liturgiques; 24 autres Provinces ont signalé que, s'il existe d'autres groupes vincentiens, ils maintiennent à peine quelque contact avec eux.

Entre les divers groupes vincentiens, y a-t-il des liens mutuels? Onze Provinces l'ignorent; 26 reconnaissent qu'il n'y a aucune coordination entre les groupes ou que c`est insuffisant: cela se réduit, dans tous les cas, à des célébrations de fête occasionnelles. Dans 5 Provinces on fait les premiers pas pour une coordination effective; et 3 autres font ensemble des rencontres de formation.

On a mentionné plusieurs fois les rencontres liturgiques en certaines occasions: je pense que plusieurs se référaient à la journée de prière, célébrée à partir de septembre 1996, sur la requête coordonnée des quatre responsables des principales branches internationales de la Famille. Ceci est un signe évident que, lorsqu'on commence, quelque chose bouge.

Nous devons donner une réponse au Seigneur et à nos frères de la Famille Vincentienne, et tous ensemble aux pauvres, sur ce que nous sommes disposés à faire pour nous unir davantage et “travailler ensemble contre toutes les formes de pauvreté”, comme disent les Volontaires.

En clôturant au Guatemala une rencontre des Provinces d'Amérique latine sur “Saint Vincent et les laïcs aujourd'hui”, les Pères et les Soeurs présents ont pris, en tant qu'aumôniers, les engagements suivants:

“1. Nous nous rendons compte du besoin urgent d'une plus grande formation systématique pour connaître les diverses Associations Vincentiennes; elle doit commencer dès le Séminaire et se parfaire ensuite par une formation personnelle.

2. Dans le développement des thèmes (voir CLAPVI 96), nous éprouvons le besoin d'exercer le rôle d'aumônier avec plus de sérieux, de responsabilité et d'humilité, en respectant l'identité de chaque groupe.

3. Il faut nous unir et nous épauler pour obtenir l'intégration de la Famille Vincentienne, en évaluant à bref délai le travail accompli avec les divers mouvements. Pour cela, il est nécessaire de nous doter d'une organisation et d'établir un programme dans les diverses branches de chaque pays” (CLAPVI, année XXII , n° 90-91, 1996; p. 20).

(Traduction Jules Vilbas, C.M.)

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(1) J'emploierai surtout le mot “asesor”, conseiller spirituel; mais en divers pays on dit aussi: aumônier, assistant (ecclésiastique), animateur, etc. L'image et les tâches de l'aumônier sont décrites en divers articles par des Confrères qui ont travaillé ou travaillent encore dans ce ministère. Je m'en rapporterai à quelques-uns: BERRADE Alphonse: Asesoría de laicos; dans CLAPVI, année XXII, n° 93, 1996; pp. 312-323. CORERA Jaime: El Asesor de los Movimientos Laicos Vicentinos; dans CLAPVI, année XXII, n° 90-91, 1996; pp.54-63. DELL'AMORE Célio: San Vicente, asesor de laicos, dans CLAPVI, année XXII, n° 93, 1996, pp. 288-293. ELDUAYEN Antonio, Papel de los asesores vicentinos hoy. Ibidem; pp.324-336. GIELEN Charles: L'animation spirituelle des “Charités” par la Congrégation de la Mission . Dans Vincentiana, 1977 (1-2); pp. 59-73. ORTEGA Rafael: Formación del Laicado Vicentino . Dans CLAPVI, année XXII, n° 90-91, 1996; pp.74-84. ORTEGA Rafael: La formación a través de una asesoría liberadora. Dans AIC 1993: Redes de interaccion solidaria para y con los Pobres. Actas del Seminario América Latina, Venezuela, 1-5 mars 1993. Bruxelles, AIC (1993); pp. 113-120. PANQUEVA Alvaro: La asesoría a los movimientos laicales vicentinos. Dans CLAPVI, année XXII (sic), n° 96-97, 1997; pp. 209-215. PEREZ FLORES Miguel: Asesor de las Voluntarias de la Caridad: pro manuscripto. QUEVEDO Alvaro: Asesoria en la AIC. Dans CLAPVI, année XIV, n° 59, 1988; pp. 210-220. SALAMANCA Francisco: San Vicente , asesor de laicos. Dans CLAPVI, année XXII, n° 90-91, 1996; pp. 21-28. Dans cette présentation, j'ai suivi surtout les idées et propositions du P. Alvaro Quevedo.