Défi des sectes en Amérique Latine

Défi des sectes en Amérique Latine

par Francisco Sampedro Nieto, C.M.

Visiteur du Chili

En Europe et aux Etats-Unis, on parle d'un accroissement de l'incroyance et du matérialisme. En Amérique latine, on constate qu'il y a une grande escalade des sectes. La façon de parler de ces phénomènes n'est pas toujours appropriée ni exacte. La difficulté vient, croyons-nous, du manque de clarté sur ce que sont les sectes et de l'amalgame entre sectes et sectarisme, sectes et fondamentalisme, ce que certains auteurs appellent sectes fondamentalistes. Procédons à quelques analyses.

I. Le problème en Amérique Latine

Au cours des années 60, le problème des sectes n'était pas encore préoccupant en Amérique latine. De fait, durant la IIème Conférence Générale de l'Episcopat Latino-américain (Medellin), qui eut lieu en 1968, les principales préoccupations se concentrèrent sur les inégalités qui mènent à la pauvreté et à la misère. Il en résulta une option ferme en faveur des pauvres. Le thème des sectes apparut seulement dans le Document de base qui signalait qu'il était nécessaire de les connaître: elles font acte d'un prosélytisme qui affecte tous les chrétiens; elles ne s'intéressent pas aux problèmes sociaux et ne contractent pas d'engagements.

Dans les années 70, surgit aux Etats-Unis une préoccupation spéciale pour l'engagement social assumé par l'Eglise Catholique. Cela favorisa la présence et l'action des Groupes fondamentalistes et des sectes .

Durant la IIIème Conférence Générale de l'Episcopat Latino-américain (Puebla) qui eut lieu en 1979, à la fin des années 70, on aborde déjà plus directement le problème des sectes. On affirme qu'elles ont pris une attitude agressive avec leur propagande et leurs méthodes de conquête; on demande d'étudier ce phénomène et d'interpréter à nouveau la religiosité du peuple. Puebla appelle les sectes «Mouvements Religieux Libres»; cette terminologie n'est pas la plus appropriée, car elle prête à confusion avec les Eglises libres ou missionnaires. Dans le Document, on affirme plusieurs choses sur les sectes: on parle de leur invasion, de leur agressivité, de leur prosélytisme, de leur propagande, de la menace qu'elles représentent, de leur tendance anticatholique et syncrétiste. On reconnaît aussi qu'une partie du problème réside dans l'Eglise Catholique et que si «elle n'interprète pas à nouveau la religion du peuple latino-américain, un vide pourrait se produire que les sectes occuperaient». Et elle admet que l'on n'a pas toujours donné «les moyens efficaces pour surmonter la maigre éducation dans la foi de notre peuple». Dans les sectes, on le reconnaît, il y a aussi des aspects positifs comme le désir d'appartenance à une communauté, de participation, d'une liturgie plus vivante. Tout cela exige de l'Eglise Catholique des réponses.

Après Puebla, il y a eu différents Documents des Conférences Episcopales, Commissions, Départements, ou de personnes qui expriment la même chose et signalent quelques nouveaux aspects qui ont surgi. Dans ces Documents on prend déjà bien en compte les défis que présentent les sectes. Celles-ci demandent aussi une autocritique.

Faisant un pas de plus, la IVème Conférence Générale de l'Episcopat Latino-américain (Saint-Domingue), qui eut lieu en 1992, traite à nouveau ce thème. Ici non plus la terminologie n'est pas claire. Le Document parle de sectes fondamentalistes, dont la présence a augmenté de façon inquiétante «depuis Puebla jusqu'à nos jours»; ensuite il nous présente les Nouveaux Mouvements Religieux (NMR) que sont pour nous les sectes proprement dites et sur lesquelles nous allons faire une brève analyse critique.

a.Les sectes fondamentalistes:

Ces groupes mettent en avant Jésus-Christ comme leur Seigneur et leur Sauveur. Il est important d'avoir une expérience personnelle de Jésus. C'est le message central qui les aide à trouver des adeptes. C'est pour cela, croyons-nous, que Saint-Domingue a prêté u8ne attention spéciale à ces Groupes qu'il appelle sectes fondamentalistes. On les définit ainsi: «Les sectes fondamentalistes sont des groupes religieux qui insistent sur le fait que seule la foi en Jésus- Christ peut sauver et que l'unique base de la foi est la Sainte Ecriture, interprétée de façon personnelle et fondamentaliste, donc en excluant l'Eglise, et en insistant sur la proximité de la fin du monde et du jugement final». Comme on le voit, cela peut s'appliquer à beaucoup d'évangélistes.

On signale, comme attitudes et caractéristiques, qu'ils emploient des méthodes inadéquates dans leurs visites à domicile; c'est ainsi qu'ils parviennent à leurs fins par des écrits où l'on manipule la vérité avec des moyens économiques et techniques. Ils ont recours au rigorisme et à l'agressivité contre l'Eglise Catholique. Ils lisent aussi la Bible dans son sens littéral, en dehors du contexte et de la vie de l'Eglise. Ils recourent volontiers aux moyens de communication sociale, à la dîme, et font appel à l'affectivité.

Ces groupes, conclut-on, envahissent l'Amérique latine; ils manifestent leur présence en causant des problèmes aux plus vulnérables: migrants, personnes abandonnées ou ayant des problèmes matériels, gens simples et sans formation. C'est un défi pour l'Eglise Catholique, qui doit évangéliser davantage et combler les vides.

b. Les Nouveaux Mouvements Religieux (NMR)

Saint-Domingue donne ce nom aux groupes que nous appelons sectes proprement dites. Il les définit comme «des formes religieuses, généralement syncrétistes, qui parviennent à exprimer leur identité et des désirs du coeur de l'homme».Les principaux courants ou types de phénomènes sont:

Parachrétiens ou semi-chrétiens: Les Témoins de Jéhovah et les Mormons. Ils sont prosélyte, millénariste et ont des caractéristiques d'organisation propres aux entreprises. Nous appelons aussi ces groupes pseudochrétiens. Ici, nous incluons également Science Chrétienne, Enfants de Dieu, Moon et le Chemin International (Ramitas).

Esotériques: Les adeptes du spiritisme, les Rose-Croix, les Gnostiques, les Théosophes, etc. Ils se caractérisent par la recherche d'illuminations spéciales, d'occultisme religieux et de connaissances secrètes.

Philosophiques et de cultes orientaux: Hare Krishna, Luz divina, Ananda Marga et autres. Ils insistent sur le mysticisme et sur l'expérience.

D'origine asiatique: C'est ici que se situent les groupes dérivés du Bouddhisme (Seico no ie, etc.), de l'Hindouisme (Yoga, etc.), de l'Islamisme (Fe Baha'i).

Socio-religieux: On place ici la secte Moon, Nouvelle Acropole et les Eglises électroniques. On les considère comme des entreprises ayant des objectifs idéologiques, politiques, portées au prosélytisme, qui recourent à la conversion, à la guérison et aux moyens de communication.

Cure divine: Ce sont des centres qui se consacrent à des guérisons spirituelles et physiques.

Cette classification est discutée, mais elle a le mérite de faire allusion à des sectes présentes dans ce continent de l'espérance.

II. La croissance

On a beaucoup parlé de la forte expansion des sectes en Amérique latine. Les hauts pourcentages, je crois, ne sont pas réels et ils sont dus, comme je l'ai dit plus haut, au fait que l'on unit des groupes évangélistes à des fondamentalistes (sectes fondamentalistes) et à des sectes proprement dites ou NMR. Recueillons les renseignements de quelques auteurs qui font allusion à cet accroissement:

En premier lieu Jeffrey Klaiber affirme:

De plus en plus, l'expansion des groupes fondamentalistes et des sectes non chrétiennes en Amérique latine éveillent l'intérêt chez les sociologues. Ce phénomène fait penser que l'Amérique latine fait l'expérience d'une révolution culturelle peut-être aussi importante, et même plus durable, que n'importe quelle révolution politique. Selon les calculs les plus récents, environ 40 millions de latino-américains sont protestants. C'est-à-dire, près de 10 % de la population. Au Brésil, près de 20 % de la population est protestante. Au Chili, le pourcentage moyen est de 20 à 25 %. Au Guatemala, estime-t-on, il atteint les 30 %. Au Nicaragua, il approche les 20 %. Par contre, le protestantisme n'a pas eu la même poussée vertigineuse en d'autres pays comme la Colombie, le Venezuela ou l'Uruguay. Il est important de signaler que les groupes qui augmentent le plus ne sont pas ce que l'on appelle «les Eglises historiques» (luthériens, anglicans, méthodistes ou presbytériens), mais ce sont les «fondamentalistes», connus aussi aux Etats-Unis comme «évangélistes». Au Chili, par exemple, près de 80 % des protestants appartiennent aux Pentecôtistes (l'Eglise Méthodiste Pentecôtistes). Selon David Stoll, auteur d'un livre récent sur ce thème, si le rythme actuel de progression se maintenait, 57 % de la population du Brésil serait protestante en l'an 2020; à Porto Rico 75 % le serait; et au Guatemala, 127 %».

De son côté, Herménégilde Zanuzo parle:

«de l'irrésistible marée des Eglises et des sectes qui continuent à envahir l'Amérique latine, à un rythme de croissance annuelle de 11 % ; de telle sorte qu'au commencement de notre XXème siècle, les non catholiques en Amérique latine étaient 50.000, et actuellement ils sont quelque 40 millions et que dans 14 ans (en l'an 2000), ils arriveront à être 140 millions. Chaque jour, une moyenne de 8.000 catholiques d'Amérique latine se font protestants» .

Le temps lui-même a démontré que l'accroissement n'a pas été tel qu'il se présente et qu'on l'envisage ici. On parle, pour le Chili, d'une avancée de 20 à 25 %. Néanmoins, le Recensement National de 1992 donne un pourcentage de 0,8 % de protestants et de 12,4 % d'évangélistes, ce qui donne un total de 13,2 %. La diminution des catholiques, depuis le Recensement de 1970, aurait été de 3,9 %. Les différences dans les données sont considérables. Et il faut tenir compte qu'un Recensement, malgré ses limites, est la statistique globale la plus complète.

Malgré ce qui a été dit, nous reconnaissons le problème des sectes ou NMR et la diminution des catholiques. Mais nous pensons que cette diminution se répartit entre: 1) une certaine avancée des pentecôtistes et autres évangélistes, spécialement des fondamentalistes; 2) les sectes ou NMR; 3) la non-croyance ou l'incroyance, qui atteint déjà en certains pays 5/8 % et jusqu'à 11 %.

Il faut dire aussi que les sectes ou NMR, bien qu'elles soient d'un pourcentage inférieur, sont spécialement dangereuses. Nous estimons qu'il faut y faire attention et leur donner des réponses juridiques et pastorales.

III. Défis pastoraux

Autant par rapport aux sectes fondamentalistes qu'aux NMR, le Document de Saint-Domingue montre les défis et propose des lignes pastorales importantes. Sans oublier la valeur de ces défis, nous présentons ces propositions pastorales.

1.Réponse à la quête d'Absolu: Etant un être religieux, l'homme tend à la rencontre avec le transcendant, le divin, le mystérieux. Notre évangélisation et notre pastorale doivent savoir lui offrir le vrai chemin de la rencontre avec Dieu. C'est Lui l'Absolu que cherche l'homme., le «totalement Autre» qui peut remplir la vie de tout être.

Dieu répond aux ultimes questions que l'homme moderne continue à se poser. Jésus peut combler le désir d'expérience que cherche l'homme postmoderne. Néanmoins, comme tout homme est un être libre, il a besoin d'être éclairé et orienté pour suivre le meilleur chemin.

2.Formation des personnes: De tout temps, mais très spécialement dans les temps actuels, l'homme a besoin d'une formation sérieuse et profonde. C'est ainsi seulement qu'il peut résister au monde varié des offres de pensées religieuses, idéologiques ou de sectes de tout genre. Nous pensons que la formation d'aujourd'hui doit comporter différents niveaux:

a.Une formation générale et systématique: Après le Concile Oecuménique Vatican II, bien des choses ont été écrites, dont quelques-unes sont très bonnes. Mais peut-être a-t-on omis de donner une formation d'ensemble systématique qui présente tous les fondements de notre foi catholique. Dans cette formation, on devrait étudier l'homme, la révélation et la foi, le Christ, l'Eglise, les sacrements, l'avenir de l'homme. Si notre formation était plus solide, quelques-uns de nos catéchistes et beaucoup de nos fidèles n'abandonneraient peut-être pas l'Eglise. Que se passe-t-il avec eux? A qui la faute? Bien sûr, nous ne pouvons plus être des catholiques à la façon de nos aïeux, mais nous devons être préparés pour justifier notre foi et notre espérance.

b.Une formation biblique: La Bible possède un attrait spécial. Beaucoup disent qu'ils sont allés à d'autres assemblées parce que là on leur apprend à lire la Bible. Sans doute utilise-t-on beaucoup la Bible, mais on l'utilise mal aussi. On s'en sert parfois comme d'un moyen pour attirer et pour séduire. Nos catholiques doivent la connaître davantage, savoir s'en servir et savoir en faire différentes lectures. Ils ont déjà progressé avec les Cours Bibliques, les Cercles Bibliques, les Ateliers, etc. Mais il y a encore beaucoup à faire.

c.Une formation spécifique: Les textes bibliques et les citations qu'utilisent quelques évangélistes ou quelques sectes ne sont pas nombreuses. Quand on les connaît et que l'on est prêt à leur répondre, ils n'ont pas grand succès. Leur doctrine est simple. Il faudrait préparer nos catholiques à connaître le mauvais usage que font certains groupes religieux de certains points de doctrine. Il serait également très utile de préparer nos fidèles à poser, à leur tour, des questions qui vont à l'encontre de ce qu'on leur propose. Si on leur dit ainsi que le Christ n'est pas Dieu, ils pourront citer des passages de la Bible qui se rapportent à sa divinité. Avec les sectes, il ne faut pas dialoguer mais les interroger. Quand on leur pose des questions, elles ne savent pas répondre, parce qu'elles ne sont préparées que pour vendre leur marchandise.

3. Apostolat et accompagnement personnel: Les sectes n'ont d'autre genre d'apostolat que celui de personne à personne. Le jeune communique sa pensée à un autre jeune, l'ami à l'ami. C'est de cette façon que l'on cherche à convaincre, à conquérir. Dans notre Eglise, l'apostolat de proximité existe à peine. Nous agissons généralement d'une manière massive. Il faudrait travailler aussi au moyen de la visite, du contact personnel.

De plus, l'attention et l'accompagnement personnel sont recherchés par bien des gens. Dans le mystère de la personne, il y a des inquiétudes qu'elle ne manifeste qu'au représentant de Dieu, au directeur spirituel. De fait, les sectes recourent beaucoup à l'attention des gourous, maîtres et leaders. Et les entreprises et les éducateurs emploient des conseillers.

4.Une plus grande participation des laïcs: Ce qui précède exige dans l'Eglise catholique une plus grande force des laïcs. De plus, l'Eglise c'est nous tous. C'est seulement avec la collaboration des laïcs que nous pourrons réaliser l'apostolat de proximité, avoir des guides qui se consacrent au soin spirituel personnel, qui collaborent à la pastorale de la santé; n'oublions pas que le malade se trouve dans une situation existentielle et religieuse très spéciale. Beaucoup de sectes agissent aussi comme cela. Rappelons-nous que les évangélistes ont réparti jusqu'à 10.000 missionnaires en Amérique latine. Au Chili, 1.200 missionnaires (Elder) Mormons circulent neuf heures par jour, du lundi au dimanche, de 10 à 22 heures, plus trois heures de repos et d'études. De cette façon, ils consacrent 10.800 heures journalières à leur conquête missionnaire. Face à cela, que de choses doivent faire nos laïcs!

C'est peut-être pour cela que, dans le Rapport du Saint-Siège, de 1986, sur les Sectes ou nouveaux mouvements religieux, on parle de revoir le système paroissial. Sans aucun doute, pensons-nous, il faudrait changer la mentalité, la structure pour que l'on change l'apport économique, l'engagement dans l'évangélisation.

5. Revitalisation missionnaire: Il y a des groupes religieux qui sont venus combler des vides auxquels notre Eglise et nos anciennes missions n'ont pas pourvu ou qu'elles ont abandonnés. La mission traditionnelle avait sans doute ses défauts, mais on a oublié que l'on pouvait et que l'on devait la rénover. En outre, il ne faut pas oublier que l'Eglise est essentiellement missionnaire et que chacun de ses membres doit jouer un rôle dans la diffusion du message du Christ.

L'heure est venue de revitaliser l'esprit et l'action missionnaires dans la vie de nos fidèles. De par leur baptême, tous nos laïcs doivent être missionnaires. Nous devrions, nous aussi, avoir des laïcs qui se consacrent à plein temps à la propagation de la foi. Quelques évangélistes et certaines sectes en ont. Il y a déjà des paroisses en état de mission et des Congrégations qui sont revenues au travail missionnaire, mais il faut encore faire davantage.

6. La Pastorale des Jeunes: Ceux qui appartiennent davantage aux sectes, nous dit-on, sont des jeunes des classes terminales de l'enseignement secondaire et des premières années d'université. Y trouvent aussi refuge des jeunes sans travail, des femmes d'âge moyen qui ne savent que faire de leur vie et de leur temps et des personnes âgées qui se trouvent seules; les sectes s'approcheraient de ces dernières pour recueillir leur héritage.

En regardant les jeunes, nous constatons que souvent ils n'ont pas une famille bien constituée et que leur font défaut la société et l'éducation. En d'autres occasions, ce sont les possibilités de travail qui sont rares et ils se sentent délaissés et incompris par les adultes. Devant cela, apparaissent les sectes pour leur offrir de l'affection, un groupe, et les considérer comme «quelqu'un». Mieux encore, elles leur offre une vision nouvelle de l'homme, du monde et de l'histoire. Cela attire les jeunes.

Notre pastorale devrait se consacrer davantage au travail auprès des jeunes. Ils ne sont pas faciles, mais la personne de Jésus-Christ les attire. Un meilleur accueil dans les paroisses, une plus grande attention dans les collèges, le dévouement de quelques personnes spécialisées aideraient le jeune à s'intégrer, à participer et à travailler dans notre Eglise.

7. L'expérience de Dieu: Nous sommes dans une époque marquée par l'affectivité, la recherche d'expériences. Nous avons parlé à des personnes qui sont entrées dans les sectes et elle nous ont dit qu'elles y sont entrées en cherchant ce qui est caché, l'expérience profonde dont elles avaient besoin. Dans les sectes, il y a des exercices, des techniques, des cultes et toute sorte d'actions étranges.

Il a manqué dans notre Eglise, croyons, d'amener nos fidèles à une expérience de prière. Nous avons une grande richesse et des méthodes, mais il faut les enseigner. La méditation chrétienne est ce qu'il y a de mieux, puisqu'elle nous porte à communiquer avec le vrai Dieu et à connaître la vérité. Cependant, ces moyens n'arrivent pas jusqu'au grand nombre de nos chrétiens. Il y a un gros travail à faire sur ce terrain.

D'autre part, il faudrait rendre notre liturgie plus attractive, plus ouverte à la participation collective, plus vivante, sans qu'elle cesse d'être digne ni qu'elle tombe dans la vulgarité. Beaucoup nous disent qu'ils ne la comprennent pas et qu'elles les ennuie. Dans l'expérience de Dieu, ce qui devrait être important, c'est la parole de Dieu, l'Esprit-Saint, des méthodes et pratiques de prière personnelles et communautaires. Nos fidèles doivent se savoir aimés de Dieu personnellement et acquérir une expérience personnelle du Christ.

8. Des communautés ecclésiales de base: L'homme aspire à la communauté et il en a besoin. Dans le petit groupe on fait plus attention à la personne et de meilleure façon. Il peut y avoir des relations plus étroites. C'est ce que cherchent beaucoup de personnes dans les sectes et aussi dans les petits groupes évangélistes. Nous croyons que nos Communautés Ecclésiales de Base répondent à ces besoins. Chez elles, en outre, la personne est traitée comme «quelqu'un», elle peut participer davantage, être reconnue, lire et méditer comme les autres la parole de Dieu.

La paroisse elle-même devrait être une «communauté de communautés». Elle répondrait ainsi plus adéquatement à ce que les catholiques cherchent dans d'autres groupes. De cette manière, il y aurait de meilleures relations entre les personnes, une communication d'expériences, une présentation de témoignages; c'est précisément ce qui plaît à beaucoup de personnes.

9. Les Moyens de Communication Sociale: Nous sommes à l'époque de la communication et il faudrait en faire un plus grand usage pour le service de la Nouvelle évangélisation. Ces moyens ont une place prépondérante dans la «nouvelle culture», celle dont il faut tenir compte dans le présent et le futur de ce qui est à vivre et dans la présentation de la foi chrétienne.

Les évangélistes et certaines sectes utilisent continuellement les moyens de communication sociale. En ce domaine, il reste beaucoup à faire à notre Eglise. Ici également, il faut bien tenir compte de «l'identité culturelle» et du problème de l'inculturation. Il faut parler à l'homme d'aujourd'hui avec les méthodes et le langage qui lui sont propres. Il attend un langage simple et veut des réponses appropriées.

10. L'information: Le problème des sectes requiert une information sur elles: sur ce qu'elles sont, sur leur doctrine, leurs tactiques et les dangers qu'elles représentent. Nous aurons, de cette façon, une pastorale préventive et nous éviterons que beaucoup de personnes tombent dans ces groupes. En général, nous agissons de façon curative, c'est-à-dire quand le problème existe déjà; alors tout est plus difficile. Rappelons-nous qu'il est facile d'entrer dans une secte, mais qu'il est difficile d'en sortir.

Pour accomplir ce que l'on vient de dire et orienter comme il faut ceux qui sortent des sectes, il est aussi très nécessaire de s'informer. Je ne puis donner une orientation personnelle et pastorale appropriée que si je sais ce qui s'est passé dans le groupe. Il est très important de connaître les sectes, leurs agissements et leurs dangers; comme je ne puis les connaître toutes, je devrais avoir une bonne bibliographie pour m'informer quand ce sera nécessaire. Une fois informé, je puis informer et aider.

11. Une pastorale familiale. La famille est le sujet et l'objet de l'évangélisation. Une famille évangélisée et qui vit comme une famille chrétienne, dans une relation de foi en tant qu'époux, parents et enfants, sera une aide précieuse pour ne pas tomber dans les sectes. Il ne faut pas oublier que les sectes portent spécialement atteinte à la famille, en la divisant et en la détruisant. Souvent elles éprouvent l'un des époux ou leurs enfants. La famille doit avoir une formation chrétienne appropriée, en partant du petit enfant à qui l'on apprend la foi, la prière. C'est toute la famille unie qui doit prier, méditer la Parole divine, jouer son rôle dans l'Eglise.

La famille désarticulée et avec des problèmes offre un terrain propice au développement des sectes. La famille structurée et chrétienne est à l'abri des sectes. La famille qui évangélise aide ses frères face aux sectes.

Les sectes ou Nouveaux Mouvements Religieux présentent aussi des défis juridiques que les Etats doivent affronter; en Amérique Latine on fait peu en ce domaine. On n'a pas pris en compte le fait que les sectes sont dangereuses et qu'elles nuisent aux familles, à l'éducation, à la personne et aux gouvernements eux-mêmes. Elles manipulent l'économie, la politique et l'idéologie.

Nous ne pouvons nous étendre, mais nous voulons terminer en affirmant que notre continent doit prendre conscience de ce défi en regardant autant en dehors qu'à l'intérieur de l'Eglise, où se trouvent bien des causes qui ont favorisé les sectes. C'est seulement ainsi que nous serons le continent de l'espérance.

(Traduction: Jules Vilbas, C.M.)

Sur les sectes en Amérique latine, nous avons déjà écrit en d'autres occasions : cf. Sampedro Francisco, dans Razon y Fe 226 (1992) 311-321. Nous n'allons pas répéter ici tout ce qui a été dit dans cette publication, mais en donner quelques éléments complémentaires. Ce que nous affirmons ici fait partie du Projet FONDECYT 1971 292-1997, qui a pour titre : « Nouveaux Mouvements Religieux ou sectes et liberté religieuse : critères pour une solution juridique.

Medellin, 14,1.

Medellin, 14,7.

Cf. Sampedro Francisco, Sectas y otras doctrinas en la actualidad. Bogota (1995) 319-320.

Cf. Document final (1979). Il y a 12 numéros qui se réfèrent à ce thème.

Cf. Puebla, 469.

Il faut dire qu'en Amérique latine il n'y a pas de clarté sur la terminologie. Parfois on inclut dans les sectes des groupes protestants. C'est pour cela que l'accroissement des sectes semble plus élevé qu'il ne l'est en réalité.

Cf. Puebla, 419, 342, 1108, 1109, 112, 456, 1102.

Puebla, 469 et 628.

Cf. Boch Juan, Para conocer las sectas. Navarra (1994) 208 -2.

Saint-Domingue, 140.

Cf. Sampedro Francisco, Religiones, sectas y evangelizacion desde Santo Domingo, en Medellin 87 (1996) 135.

Saint-Domingue, 140.

Saint-Domingue, 139-140.

Saint-Domingue, 38.

Saint-Domingue, 26.

Saint-Domingue, 141.

Saint-Domingue, 147.

Cf. Sampedro F., Evangélicos y Sectas. Santiago (1992) 25.

De fait, nous en faisons une autre: cfr. Ibidem, 25-27. On y fait aussi allusion aux causes possibles de ces groupes. Cfr. Saint-Domingue, 147, 148 et 149.

Klaiber Jeffrey. « Cambios religiosos en América Latina y entre les hispanos de Estados Unidos », dans la Revista Teologica Limense 3 (1992), 334.

Herménégilde Zanuso «Iglesias y sectas en América latina». México (1989) 5.

Dans des pays comme le Chili on considère que les pentecôtistes seraient les ¾ ou les 4/5 des évangélistes. Cfr. Sampedro Francisco: Sectas en América latina..., 317.

Cfr. Evangélicos y sectas, 40.

Cfr. Saint-Domingue, 141-147 et 150-153. Sur les sectes fondamentalistes, cfr. Galindo Florencio: le «fenomeno de las sectas» fundamentalistas, Navarra (1994). Il s'agit d'un apport important.

Cfr. Sampedro Francisco. Las Iglesias cristianas. Bogota (1996) 99-115.

Cfr. Mujica E.: «Ils augmentent leur activité pour attirer les fidèles de différents credo», dans Le Mercurio, Santiago . 20 novembre 1993, A-27.