La Mission ad gentes a-t-elle encore un sens ?

Par Giuseppe Turati, CM

 

Parmi les priorités auxquelles notre Supérieur général impulse un nouvel élan et une nouvelle vigueur, il y a certainement la mission ad gentes. Une question se pose immédiatement : la mission ad gentes a-t-elle encore un sens aujourd’hui ? Si oui, sous quelles formes ?

Face aux prophéties qui parlent de “la fin du christianisme et du retour au paganisme”[1] , est-il réaliste de penser à des formes de mission qui soient encore capables de rendre pertinent le christianisme pour les hommes du XXIe siècle, de donner une nouvelle vitalité à l’Église et à son action missionnaire dans le monde et dans l’histoire ?

Le but de cet article est de répondre à la question par l’affirmative, bien qu’il soit nécessaire que notre action missionnaire se mesure courageusement au changement d’époque en cours et qu’elle soit capable de réinventer de nouveaux modèles de mission, en réponse aux mouvements de l’esprit du Christ et en fidélité aux dons charismatiques propres à notre charisme missionnaire.

Il s’agit de faire un discernement sincère et profond du contexte culturel dans lequel nous évoluons et de choisir des modèles de mission qui ne peuvent se réaliser que dans un contexte ecclésial d’écoute, de communion et de participation entre le charisme et l’institution. Le dynamisme synodal d’écoute, de communion, de participation et de mission, initié par le Pape François, offre également à notre Congrégation l’opportunité de se régénérer (” revitaliser “) dans un monde global de plus en plus sécularisé, et nous lance le défi de rechercher de nouveaux modèles de mission, avec un dynamisme apostolique renouvelé, capable de dépasser les prétentions de domination et de pouvoir qui ont caractérisé, au moins en partie, les missions ad gentes de l’époque du colonialisme européen et occidental en général.

C’est un grand défi, mais en même temps une grande opportunité : la mission peut redonner crédibilité et vigueur à notre identité et à l’Église elle-même, dans le contexte culturel actuel de la fin du christianisme dans le monde occidental et du début d’un monde globalisé de plus en plus sécularisé, dans lequel le message chrétien et la religion en général sont relégués à la sphère privée, sans aucune pertinence sociale et culturelle. Serons-nous capables de relever ce défi et de “revitaliser notre identité” (cf. le titre de l’AG 2022) au début du cinquième centenaire de notre existence en tant que Congrégation “de la Mission” ?

Charisme et Institution

Deux tâches majeures nous attendent. La première est de vérifier quels aspects du Magistère actuel de l’Église, en particulier du Pape François, peuvent être utilisés pour revitaliser notre charisme. La seconde tâche est de discerner quel modèle de mission, parmi ceux qui émergent actuellement dans l’Église, peut être adopté en fidélité à notre charisme.

N’oublions pas une chose importante : outre le rappel de l’urgence de la mise à jour des charismes propres aux Congrégations, le Pape François propose aussi un chemin pour la mettre en œuvre : le chemin synodal, parce que “la synodalité exprime la nature de l’Église, sa forme, son style, sa mission”[2]. Mais attention : il ne s’agit pas de recueillir des avis avec la méthode du brainstorming, mais plutôt de se mettre à l’écoute de l’Esprit Saint.

Nous devons reconnaître que le chemin de la revitalisation du charisme n’est pas facile et, en ce qui concerne la mission, il est même fatigant : nous avons du mal à nous écouter les uns les autres et à marcher ensemble. C’est le Pape lui-même qui nous dit qu'”il faut une grande docilité, une grande humilité, pour reconnaître nos limites et accepter de changer des manières de faire et de penser dépassées, ou des méthodes d’apostolat qui ne sont plus efficaces, ou des formes d’organisation de la vie interne qui se sont révélées inadéquates ou même nuisibles”[3] .

Le chemin de la revitalisation du charisme est avant tout exigeant : il ne doit pas privilégier la dimension apostolique en laissant dans l’ombre d’autres dimensions plus personnelles, comme la spiritualité du fondateur et des membres. En d’autres termes, il ne doit pas privilégier le faire institutionnel sur l’être charismatique. La réflexion sur le charisme originel doit être inclusive et intérieure, capable de redonner valeur et pertinence à la personnalité de notre fondateur et à sa spiritualité.

Une revitalisation effective du charisme institutionnel peut provenir non pas tant d’un amalgame des voix et des opinions des membres de l’institution, mais plutôt du pouvoir d’attraction du témoignage charismatique du fondateur, exprimé par des moyens et des formes convenablement mis à jour. Ce n’est pas nous qui possédons le charisme ; c’est plutôt le charisme qui, de façon dynamique et comme une grâce divine, nous possède dans les différentes époques et générations. Il est donc important de savoir l’incarner dans les nouvelles situations auxquelles nous sommes confrontés dans notre ministère.

Nous aussi, Vincentiens, si nous voulons vraiment revitaliser notre identité missionnaire, nous sommes appelés à vérifier l’efficacité de nos ministères par rapport à l’évangélisation et à la mission. Or, l’évangélisation missionnaire dont rêve le Pape François est “pour l’évangélisation du monde d’aujourd’hui, plutôt que pour l’auto-préservation” de l’Église[4] . Nous vivons une époque où la simple mise à jour ne suffit pas. Il faut trouver de nouvelles formes pour servir l’Évangile et proposer le chemin de la vie chrétienne.

En Europe, où je vis, il ne semble pas y avoir de modèle de mission vraiment capable de transmettre l’énergie de l’Évangile et le style de la marche chrétienne. Dans certaines Provinces de la CEVIM, on a essayé de maintenir une certaine pertinence publique en épousant diverses causes dans la sphère politique (migration, sans-abrisme, toxicomanie…) au risque de faire oublier les autres dimensions de l’évangélisation (annonce, initiation chrétienne…). Le manque général de vocations missionnaires en dit long sur l’éradication du charisme missionnaire parmi les nouvelles générations de catholiques européens.

Dans d’autres continents (Afrique, Asie), la situation semble plus encourageante. Mais même là, la nécessité d’une révision des modèles missionnaires en place ne peut être évitée, sous peine de perdre notre identité missionnaire en tant que Vincentiens, et notre pertinence dans l’Église.

 

Il y a de nouveaux modèles de mission ici et là, on pourrait appeler modèles ” en construction “. Mais, ils peinent à trouver une place institutionnelle : ils sont un peu laissés à l’initiative personnelle. Lorsqu’ils sont discutés en Assemblée Générale (et probablement aussi provinciale), il est habituel de décider des priorités et de mettre à jour son vocabulaire, pour rester en phase avec le Magistère du Pape François. Mais il ressort d’une lecture sociologique qu’il est difficile de faire des choix fondamentaux au niveau institutionnel, préférant laisser le discernement aux individus, qui s’identifient à l’un ou l’autre modèle en fonction de leur charisme personnel.

Il est vrai que Dieu accorde ses dons à des personnes concrètes, et non pas abstraitement à une communauté ou à une structure. Il est donc important de discerner à partir des charismes accordés aux membres de la Congrégation, pris individuellement. Mais ce chemin a une limite : si le discernement et l’identification à un modèle de mission sont laissés aux membres individuels, la conscience d’une mission et d’un charisme communs et partagés s’affaiblit. De plus, dans ce cas, l’expérience est facilement condamnée à une courte durée, à ne pas avoir le suivi que seule l’institution peut assurer. Une solution possible pourrait être d’initier des processus de vérification et de discernement des expériences personnelles qui donnent aux différentes Provinces la possibilité de se configurer à certains modèles de mission plutôt que d’autres.

Modèles de mission

Nous avons mentionné plusieurs fois l’expression ‘modèles de mission’ ou ‘modèles en construction’. De quoi s’agit-il exactement ? Le missionnaire combonien portugais Manuel Augusto Ferreira, ancien Supérieur général de sa Congrégation, a énuméré dans une publication récente un certain nombre de ces modèles, dont nous nous inspirons ici[5] .

            Le modèle de mission en tant qu’annonce

C’est certainement le modèle le plus ancien d’un point de vue historique et celui qui a été constamment établi au cours des siècles de l’histoire du christianisme. Dans ce modèle, la mission est considérée avant tout comme la “proclamation de l’événement salvifique” accompli par Dieu dans nos vies. Au centre de ce modèle se trouve la Parole, proclamée, prêchée.

Le modèle s’inspire de l’activité même de Jésus qui, dans les évangiles synoptiques, instruit souvent les foules par son enseignement, annonce le royaume de Dieu parmi nous et souligne la centralité de la Parole (par exemple dans la parabole du semeur).

Paul est probablement l’emblème de ce modèle, puisqu’il se déclare lui-même “apôtre envoyé pour annoncer l’Évangile” (cf. 1 Co 1,17). Pour lui, la présence de missionnaires dans l’Église est essentielle, et l’Évangile est une Parole à proclamer, avec une puissance et une efficacité qui ne sont pas humaines, mais propres à l’Esprit Saint.

Le modèle de l’annonce s’est imposé dans les siècles suivants, à partir du IVe siècle, lorsque Benoît de Norcia et ses moines ont commencé à diffuser la Parole, embellie par la liturgie et l’art, à partir d’un centre géographique : le monastère.

Après lui, au milieu du Moyen Âge, les frères des grands ordres itinérants (franciscains et dominicains) ont porté la Parole hors des monastères et des couvents, et de leur prédication est né un christianisme renouvelé, tandis que l’Église se sentait de plus en plus porteuse d’une annonce à faire au monde.

Entre la fin du XVe siècle et le début du siècle suivant, avec la découverte de nouveaux mondes et la rencontre d’autres cultures, l’occasion s’offre à l’Évangile du Christ de s’incarner dans de nouveaux peuples. En particulier, les Jésuites font preuve d’une grande vigueur et d’une grande ouverture aux peuples qu’ils rencontrent et auxquels ils annoncent l’Évangile du Christ. Cependant, le modèle semble perdre de son mordant au fil du temps, affaibli par de multiples considérations doctrinales et des influences politiques qui affaiblissent la vigueur de son témoignage.

Ce n’est qu’avec le mouvement missionnaire du 19e siècle que le pouvoir de la parole proclamée a retrouvé son enthousiasme et sa vigueur d’antan. De nombreux instituts missionnaires fondés dans la seconde moitié du XIXe siècle ont libéré la mission des conditionnements et des intérêts des grandes puissances politiques européennes, ainsi que des grands ordres religieux[6] .

Avec le Concile Vatican II, ce modèle a entamé un processus de révision et d’enrichissement, avec l’intégration de nouveaux éléments, tels que l’inculturation (surtout en Afrique) et la transformation sociale et politique (en Amérique latine).

L’actuel pontife a encore renforcé l’importance de ce modèle, notamment dans son exhortation apostolique Evangelii Gaudium, dans laquelle il va même jusqu’à proposer ses recettes pour une bonne prédication de l’Évangile (voir l’ensemble du chapitre trois).

Aujourd’hui, cependant, le modèle de la mission en tant qu’annonce semble être menacé, ou du moins sous pression : toute proclamation explicite du Christ en tant qu’unique Sauveur de l’humanité est aujourd’hui facilement qualifiée de fondamentalisme religieux et de prosélytisme excessif, une revendication inutile de la vérité et de l’unicité. Que nous l’admettions ou non, les missionnaires d’aujourd’hui sont appelés à opérer dans un climat culturel qui les pousse à “remettre à plus tard le moment de la proclamation explicite”[7] .

Le modèle de mission en tant que rencontre

C’est un modèle qui a bénéficié d’un soutien particulier dans le magistère des deux derniers pontifes : Benoît XVI et François. Tous deux ont affirmé à maintes reprises qu’à l’origine de la mission, il n’y a pas une morale, une doctrine, mais une rencontre avec la personne du Christ et sa parole. En d’autres termes, le but de la mission est de rencontrer les personnes et les peuples, et la mission de l’Église est de faciliter cette rencontre, de construire des ponts et non d’ériger des murs.

En particulier, ce dont rêve le pape François avec son idée d’une Église en sortie, c’est de rechercher la rencontre avec les personnes, avec les peuples et leurs cultures, dans le cadre d’une nouvelle initiative missionnaire attrayante, car “l’Église grandit dans le monde par attraction et non par prosélytisme”[8] . C’est donc la beauté et la gratuité qui caractérisent ce modèle de mission.

Ce modèle a lui aussi des origines très anciennes, que l’on retrouve même dans l’Ancien Testament, où la conscience religieuse du peuple est liée à l’idée de la rencontre de Dieu avec le peuple qu’il appelle à une alliance avec lui. La tradition liturgique d’Israël est également née et s’est construite sous le signe de la rencontre : au cours de l’exode, Moïse et les Israélites sont entrés dans la tente pour rencontrer Dieu et se tenir en sa présence.

Même dans le Nouveau Testament, en particulier dans les évangiles, nous voyons Jésus rencontrer les gens, en particulier les marginaux de son époque et les rejetés de la société, pour se présenter à eux comme le “bon berger”.

Le dialogue de la vie et de la foi sont les variantes du modèle de la mission comme rencontre qui ont été inspirées par le Concile Vatican II. Le Concile proclame la vocation de l’Église à la rencontre et à la communion avec tous les peuples : “Les joies et les espoirs, ou les tristesses et les angoisses des hommes d’aujourd’hui, des pauvres surtout, et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, ou les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’y a rien d’authentiquement humain qui ne trouve un écho dans leur cœur” (GS 1).

Le modèle de la mission comme rencontre, avec une ouverture au dialogue, se retrouve dans le magistère pontifical après Vatican II. Paul VI, dans son exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, affirme qu'”un chrétien ou un groupe de chrétiens, au sein de la communauté d’hommes dans laquelle ils vivent, manifestent la capacité de compréhension et d’accueil, la communion de vie et de destin avec les autres, la solidarité dans l’effort de tous pour tout ce qui est noble et bon” (EN 21).

Bien que le modèle le plus fréquemment proposé par le Magistère de Jean-Paul II soit celui de l’annonce, le modèle de la rencontre trouve également des contributions importantes, comme l’affirmation de la destinée universelle de l’Évangile et l’importance de la rencontre avec les peuples dans le contexte de leurs cultures (inculturation), ainsi que la valeur du témoignage et du dialogue interreligieux, bien qu’en fonction de l’annonce.

Le pape François a relancé le modèle de la mission en tant que rencontre, d’une part en replaçant la rencontre avec le Christ au début du parcours du chrétien, et d’autre part en affirmant que la mission recherche effectivement la rencontre, mais pas le prosélytisme. Pour François, la mission n’est pas l’une des nombreuses formes de l’existence chrétienne, mais quelque chose que le chrétien ne peut déraciner de son cœur : “Je suis une mission sur cette terre et c’est pourquoi je suis dans ce monde”[9] . Après tout, ce modèle s’inspire également de la vie de Jésus lui-même, de “sa façon de traiter les pauvres, ses gestes, sa cohérence, sa générosité (…) son dévouement total“.[10]

C’est surtout le document issu du synode des évêques sur l’Amazonie qui représente l’expression la plus éloquente du magistère du pape François sur le modèle de la mission comme rencontre : l’Église y sert et accompagne les peuples indigènes, valorise l’écoute des peuples et leur spiritualité, et s’engage dans leur éducation, la défense de leurs terres, de leurs cultures et de leurs modes de vie. En octobre 2022, le pape François a érigé canoniquement la Conférence ecclésiale de l’Amazonie (CEAMA), un organe qui promeut la synodalité dans la région pan-amazonienne : il s’agit là d’un soutien clair au modèle de la mission comme rencontre dans les régions du bassin de l’Amazone.

En ce qui concerne l’avenir de la mission sur le continent asiatique, ce modèle semble offrir la seule voie viable, étant donné que le christianisme est une religion minoritaire et perçue comme “étrangère” par rapport aux nombreuses cultures et religions locales (hindouisme, bouddhisme, taoïsme, shintoïsme, confucianisme, islam).

Le modèle de mission en tant que service

Le modèle de la mission comme service a pris une importance particulière depuis le Concile Vatican II. D’une part, ce modèle met l’accent sur la mission et le service à la communauté avec la promotion des ministères nécessaires à sa croissance ; d’autre part, il met l’accent sur la contribution des chrétiens à la transformation de la société selon les principes inspirés de l’Évangile. En bref, ce modèle trouve dans le ministère de l’Église et dans la transformation sociale le contexte missionnaire de son action.

Le modèle de la mission en tant que service met l’accent, d’une part, sur la matrice ecclésiale des ministères de l’Église et, d’autre part, sur leur intégration avec d’autres ministères, en insistant particulièrement sur le rôle des laïcs. Depuis le Concile Vatican II, mais surtout dans les développements ultérieurs, la conscience de l’implication des laïcs dans la transformation sociale est devenue de plus en plus aigüe. En d’autres termes, la relation entre la mission et la société, la culture, la politique, l’économie et la nature.

Le modèle de la mission comme service a reçu un nouvel élan avec le pontificat du pape François qui, notamment avec l’encyclique Fratelli Tutti, voit l’Église et les religions au service de l’aspiration universelle à la fraternité[11] .

Ce modèle a ses racines dans les évangiles, qui nous montrent un Jésus proche des gens, attentif à leurs situations concrètes, à leurs besoins. La communauté primitive de Jérusalem elle-même est organisée selon ces critères de Jésus et constituée des diacres pour servir les cantines et répondre aux besoins des pauvres, des orphelins et des veuves.

Par la suite, toute l’histoire de l’Église témoigne de sa préoccupation pour les pauvres, en soutenant le modèle de la mission comme service à l’humanité. Aujourd’hui, l’Église dispose, presque partout, d’un vaste réseau d’écoles, d’universités, d’hôpitaux, qui doivent leur origine à l’action des missionnaires.

Au XXe siècle, les États ont pris leurs responsabilités et se sont chargés de l’éducation et de la santé. Par ailleurs, la société civile a vu naître un grand nombre d’organisations non gouvernementales (ONG) dans les domaines les plus divers. C’est pourquoi aujourd’hui, beaucoup de missionnaires et d’agents missionnaires s’éloignent du modèle de la mission comme service et prennent conscience de l’existence d’autres modèles.

Enfin, il faut ajouter que, dans certaines situations, le modèle de la mission comme service représente la seule possibilité de maintenir une présence missionnaire, comme c’est le cas, par exemple, pour les écoles et les hôpitaux dans les milieux islamiques fondamentalistes. Le risque, dans ces cas, est la réduction de la mission à l’action sociale, la superposition de l’action missionnaire et de l’action sociale, ce qui tend à favoriser une sorte de confusion entre l’action missionnaire de l’Église et l’action propre des organisations non gouvernementales (réduisant parfois l’Église à une ONG).

 

 

Modèle de mission en tant que fraternité

Celui de la mission comme “fraternité” est un modèle que l’on pourrait qualifier de modèle “en construction”[12] .  Le pape François a le mérite d’avoir reproposé aux hommes de notre temps, avec l’encyclique Fratelli tutti, le rêve d’une fraternité universelle et d’avoir proposé aux chrétiens la valeur de la fraternité comme concept clé de l’action et de la mission de l’Église en notre temps.

Bien que déjà présent dans l’Ancien Testament, nous savons que le concept de “fraternité” s’appliquait exclusivement aux membres du peuple d’Israël : il s’agissait toutefois d’un rêve qui n’a jamais été pleinement réalisé, à tel point que les prophètes ont fini par le projeter dans l’avenir de la promesse eschatologique de Dieu au peuple élu.

Jésus remet en cause les présupposés de la fraternité en Israël, à savoir les liens du sang et l’appartenance tribale, pour proclamer une nouvelle fraternité, fondée sur l’accueil et l’obéissance à la Parole de Dieu. L’apôtre Paul se fait alors le héraut de cette fraternité universelle, voyant dans la communauté chrétienne la communauté des frères et sœurs en Christ, où « il n’y a ni Juif ni Grec, ni esclave ni homme libre, ni homme ni femme ».

Le Concile Vatican II affirme que les chrétiens se sentent enracinés dans le monde contemporain, “solidaires du genre humain” : le monde dont parle le Concile est “celui de l’humanité, c’est-à-dire de la famille humaine tout entière dans le contexte de toutes les réalités au sein desquelles elle vit”[13]. Dans l’aspiration à la fraternité universelle, le Concile reconnaît l’un des signes des temps, voire l’un des signes les plus importants de notre époque.

Dans sa proposition de fraternité universelle et d’amitié sociale (cf. sous-titre de l’encyclique Fratelli tutti), le pape François se réfère continuellement à cette racine conciliaire et au magistère de ses prédécesseurs, en rappelant son fondement théologique et spirituel : ” la volonté salvifique universelle de Dieu s’offre à l’histoire, à toute l’humanité à travers l’incarnation du Fils, afin que tous, par la médiation de l’Église, deviennent ses enfants et ses frères entre eux [14] .

Une contribution décisive à la mission comme fraternité se trouve dans Fratelli tutti dans la proposition du Pape François de comprendre la mission de l’Église précisément comme la promotion de la fraternité et de l’amitié entre les peuples. Ce qui est original ici, c’est sa proposition de prendre la fraternité comme raison d’être de la mission de l’Église en notre temps. Il ne cache pas les maux de notre temps, les rêves brisés, les droits bafoués, les espoirs déçus, les conflits qui ne se sont jamais apaisés, la fracture sociale et les différences accrues par la mondialisation[15]. Mais il propose comme solution à ces problèmes les voies du dialogue et de l’amitié sociale[16], qui appellent à une nouvelle culture à construire ensemble, dans la recherche commune de fondements partagés.

Il est intéressant de noter qu’avec Fratelli tutti, le pape François étend la proposition de promouvoir la fraternité et l’amitié sociale aux religions en particulier[17]. Dans ce contexte, l’idée d’une “mission interreligieuse” prend une grande importance. L’appel lancé par le pape François dans l’encyclique Fratelli tutti est un appel ad intra et ad extra, que l’on pourrait qualifier d'”œcuménique”, puisqu’il s’adresse également aux autres confessions chrétiennes et aux religions en général. L’objectif d’une mission commune est celui d’un nouvel ordre social et politique, caractérisé par la fraternité. Le pape François identifie dans cet objectif commun une nouvelle orientation de la présence et de la mission chrétiennes dans le monde.

Malheureusement, le thème de la fraternité et les propositions du pape François semblent rester dans des cercles de réflexion assez limités et peinent à atteindre des communautés et des groupes plus larges. ” Il est surprenant, par exemple, le manque de réaction à l’encyclique de la part des instituts missionnaires et des sociétés de vie apostolique, malgré la claire dimension missionnaire de Fratelli tutti, ou de la part des congrégations religieuses et des instituts qui ont fait leur la mission universelle de l’Église “[18] . C’est un signe clair qu’il ne s’agit pas d’un modèle facile à passer de la théorie à la pratique et qu’il est capable de remettre en question les formes de mission auxquelles on est habitué.

En effet, Fratelli tutti remet en cause non seulement notre façon de comprendre la mission, mais surtout notre façon de regarder les autres et de nous regarder nous-mêmes, nous invitant à revoir et à repenser notre identité même. Cette encyclique nous invite à voir l’autre comme une personne et un compagnon de route et à dépasser la perception de l’autre comme une menace, un rival, un concurrent ou un ennemi[19] .

La fraternité universelle est ainsi proposée comme une réponse aux phénomènes dangereux qui émergent dans toutes les sociétés d’aujourd’hui : le tribalisme, le nationalisme, le populisme et le fondamentalisme politique et religieux. Fratelli tutti suggère une nouvelle approche de l’autre, dans laquelle l’identité est reconnue et affirmée non pas comme une séparation, mais comme une ouverture à l’autre. Cette perspective nous pousse à revoir notre façon habituelle de penser notre mission dans le monde

Le modèle de mission comme libération

Alors que le modèle dominant de la mission au 19ème siècle (époque coloniale) est celui de la mission en tant qu’annonce, nous réalisons progressivement le pouvoir transformateur de l’évangile, qui porte en lui la capacité d’améliorer les conditions de vie des peuples auxquels il est annoncé.

Ce nouveau modèle de mission, que nous pourrions également appeler “transformation”, s’accompagne de la construction d’écoles, d’hôpitaux et de centres d’art et d’artisanat. C’est un modèle qui s’est imposé tout au long du 19ème siècle et jusqu’au milieu du 20ème, c’est-à-dire jusqu’au Concile Vatican II. Il a ensuite évolué vers le modèle dit de “libération”, avec différentes variantes de ton, allant de la “transformation sociale” à la “libération politique”.

Par la suite, à partir du Concile Vatican II, les thèmes du développement, de la promotion humaine, de la paix et de la justice entre les peuples et les nations émergent avec une force croissante. Une théologie du progrès se développe également, qui réaffirme la conviction que l’Évangile et la foi chrétienne doivent être exprimés et vécus comme un ferment de transformation sociale et culturelle, politique et économique. Cette théologie renforce le modèle de la mission comme transformation, hérité du 19ème siècle, qui est sanctionné par le magistère ecclésial avec Populorum Progressio de Paul VI (1967).

Dans les années qui ont suivi, les sociétés n’ont cependant pas évolué dans le sens indiqué par le Concile, en particulier en Afrique et en Amérique. Sur ce dernier continent, l’assassinat de John Kennedy (en Amérique du Nord) et le retour des dictatures et des régimes militaires (en Amérique du Sud) ont marqué un recul important.

En Amérique du Sud en particulier, il existe un fort sentiment de frustration et de déception qui amène les chrétiens et les missionnaires à s’interroger sur leur rôle dans la transformation de la société. C’est dans ce contexte qu’apparaissent d’abord les “chrétiens pour le socialisme”, puis la “théologie de la libération”, qui apportent avec eux le modèle de la mission en tant que “libération”.

En Afrique et en Asie, la théologie de la libération et le modèle de la mission en tant que libération ont suivi des voies différentes, de moindre ampleur et de moindre impact. En Asie, les valeurs asiatiques traditionnelles et les attitudes intérieures ont été exploitées comme une réponse possible à la pauvreté sociale[20] . En Afrique, la condition coloniale de dépendance, encore forte au milieu du 20e siècle, et l’affirmation d’une identité culturelle propre ont favorisé le débat sur l’inculturation du christianisme, la naissance de la théologie africaine contextuelle et un modèle de mission centré sur la libération culturelle et politique[21] .

Comme nous le savons, sous le pontificat de Jean-Paul II, les concepts fondamentaux de la théologie de la libération ont été fortement remis en question ; et le modèle de la mission en tant que libération a perdu de plus en plus de sa vivacité. Dans la lignée de Jean-Paul II, Benoît XVI a également maintenu un regard critique sur la théologie de la libération.

Le modèle de la mission comme libération est entré dans le 21ème siècle avec peu d’influence et d’attrait. Parallèlement, on assiste à un exode croissant des catholiques vers les groupes pentecôtistes, sur la vague de la théologie de la prospérité en provenance des États-Unis d’Amérique, accompagné en Amérique latine par le retour des populismes et des dictatures, cette fois aux mains d’hommes qui étaient autrefois des révolutionnaires (cf. Venezuela, Bolivie, Nicaragua…).

L’élection du pape François en 2013 a été un facteur inattendu qui a donné à ce modèle un nouveau souffle et une nouvelle chance. Bien entendu, interpréter le pontificat du pape François comme un retour à la théologie de la libération ou comme un soutien exclusif au modèle de la mission comme libération serait réducteur de sa pensée et de son action. L’idée prédominante dans la pensée du pontife actuel serait plutôt celle d’une “théologie du peuple”, qui ne coïncide certainement pas avec la théologie de la libération. On pourrait dire que, par cette expression, le pape François reprend les thèmes de la théologie de la libération, en en faisant une synthèse nouvelle et personnelle.

Modèle de mission en tant qu’écologie intégrale

Un dernier modèle, le plus récent d’un point de vue chronologique, est le modèle de la mission comme écologie intégrale. Ce qui a donné force et contenu à l’idée d’inclure la promotion de l’écologie intégrale parmi les modèles de mission est certainement l’encyclique Laudato si’ (2015) du Pape François, bien que cette idée soit continuellement réitérée dans des interventions ultérieures, par exemple dans Fratelli tutti et Querida Amazzonia (tous deux 2020).

Dans ce modèle, il y a trois raisons de soutenir la mission en tant qu’écologie intégrale : la relation intime entre la fragilité de la planète et les pauvres ; la conviction que tout dans le monde est intimement lié ; la critique du nouveau paradigme du progrès et des formes de pouvoir qui dérivent de la technologie et créent une culture du déchet. Ces trois thèmes centraux de l’encyclique Laudato si’ lient le thème de l’écologie intégrale à la mission de l’Église de manière intrinsèque et inséparable.

En réalité, “la mission comme écologie intégrale apparaît comme un modèle en devenir, tant dans le magistère de François que dans les réflexions et les initiatives promues par les missionnaires et ceux qui se sentent attirés par ce modèle”[22] .

Il existe également trois domaines dans lesquels la construction de ce modèle peut être poursuivie : l’information (c’est-à-dire l’engagement à faire connaître les problèmes et les défis auxquels nous sommes confrontés) ; la proposition (c’est-à-dire la promotion de nouveaux styles de vie) ; et la spiritualité (elle-même spécifique aux missionnaires)[23] .

Le Pape François souligne quelques principes fondamentaux qui doivent être gardés à l’esprit en vue de la construction du modèle de mission comme écologie intégrale[24]. Le premier de ces principes est contenu dans l’affirmation que toute créature (les êtres humains et tout autre être du cosmos) est un don de Dieu et, en tant que tel, doit être accueilli et respecté. Le deuxième principe est que toutes les réalités créées, même inanimées, ont une identité, une dignité propre et sont une richesse à respecter et à protéger pour les générations futures. Le troisième principe est que, puisque toutes les réalités de la création sont un don, nous ne sommes pas les maîtres, mais les intendants et les gardiens de ces biens qui nous ont été confiés par le Créateur.

Dans la construction de la mission comme écologie intégrale, le Pape François insiste sur la nécessité de son fondement, qui est la spiritualité, car “il ne sera pas possible de s’engager dans de grandes choses avec les seules doctrines, sans une mystique qui nous anime, sans un motif intérieur qui donne de l’élan, motive, encourage et donne du sens à l’action personnelle et communautaire”[25] .

De différentes manières et à différentes occasions, le pape François affirme qu’une “conversion écologique” est nécessaire, conduisant à de nouveaux styles de vie et de consommation, à de nouveaux modèles d’économie, de production et de distribution, qui font place à la dimension spirituelle de l’homme. Nous pouvons nous demander ceci : dans l’horizon révélé par Laudato sì et continuellement reproposé par le pape François, est-il possible de repenser notre mission dans le monde d’aujourd’hui, en l’enrichissant de nouvelles dimensions qui sont indispensables aujourd’hui ?

Quelle est la mission des Vincentiens aujourd’hui ?

Au terme de cet examen des modèles de mission les plus récurrents tirés de l’action missionnaire de l’Église au cours des siècles, nous pouvons nous demander s’il existe un modèle typiquement vincentien ou qui incarne le mieux notre charisme et notre spiritualité.

Je voudrais d’emblée dissiper les malentendus : je suis convaincu qu’il n’existe pas de modèle typiquement vincentien de mission ad gentes, et que notre action missionnaire doit s’inscrire dans l’action missionnaire plus large de l’Église universelle et, en particulier, dans la reconfiguration de la mission opérée par le Pape François, dont les éléments essentiels peuvent être résumés comme suit

 

 

Les quatre principes d’Evangelii Gaudium

La troisième partie (cf. EV 217-237) du chapitre quatre de cette exhortation apostolique du pape François, intitulée La dimension sociale de l’évangélisation, contient quatre principes fondamentaux qui constituent, pour ainsi dire, le cadre général dans lequel imaginer la mission aujourd’hui.

Le premier principe dit que le temps est supérieur à l’espace. Appliqué à la mission, ce principe nous fait comprendre qu’il est nécessaire d’accorder plus d’attention aux processus de l’action missionnaire et à leur force d’attraction, plutôt qu’aux stratégies de conquête des espaces géographiques, culturels et de pouvoir.

Le deuxième principe dit que l’unité prévaut sur le conflit. En se référant aux modèles de mission, ce principe peut nous aider à comprendre et à accepter les tensions qui peuvent surgir entre les différents modèles et à mettre en évidence la profonde unité qui caractérise la mission de l’Église : avant la variété des modèles et des différentes manières de réaliser la mission, il y a l’unité de sa nature.

Le troisième principe dit que la réalité est plus importante que l’idée. Il nous fait comprendre que les missionnaires et les modèles de mission auxquels ils adhèrent sont invités à s’engager dans la réalité de l’intérieur, pour la transformer en fidélité à la Parole de Dieu que la mission elle-même proclame.

Le dernier principe stipule que le tout est supérieur à la partie. En ce qui concerne la mission, il nous fait prendre conscience que les différents modèles doivent être ramenés à une unité supérieure, qui n’est atteinte que dans la perspective du tout. L’icône de la plénitude, poursuit le pape François, n’est pas la sphère, mais le “polyèdre”, qui représente la confluence des parties, lesquelles conservent leur originalité.

Aller aux périphéries.

Cette expression, chère au pape François, est bien connue, de même que celle d'”Église sortante”, qui désigne la place propre de la mission de l’Église dans le monde d’aujourd’hui. Que nous suggèrent ces expressions et d’autres semblables pour notre action missionnaire ? Elles expriment une tendance ou, mieux encore, une attitude à tenir face aux autres : c’est un mouvement de la nature même de la mission.

Et pour être plus concret, le Pape François précise : ” L’Église sortante est une Église aux portes ouvertes. Sortir vers les autres pour rejoindre les périphéries humaines ne signifie pas courir vers le monde sans direction et sans sens”[26]. Pour les missionnaires, cette attitude suggère une profonde ouverture et inclusion à l’égard de tous, en particulier des pauvres et de ceux qui sont rejetés par la société. S’il existe une spécificité de la mission vincentienne, je crois qu’elle s’enracine ici même.

Passer de l’exclusion à l’inclusion

Les modèles dominants jusqu’au milieu du 20ème siècle étaient basés sur l’axiome extra ecclesiam nulla salus (Hors de l’Église, point de salut). La perspective exclusiviste a été abandonnée par le Concile Vatican II, qui a emprunté une nouvelle voie : celle du dialogue œcuménique, ainsi que du caractère séculier de la société et de l’autonomie des sciences.

Une attitude inclusive place les valeurs de l’Évangile au cœur de la mission et les libère de tout projet colonisateur : le colonialisme politique a été surmonté, mais les missionnaires doivent veiller à ne pas reproduire un colonialisme culturel.

 

Déconstruire pour reconfigurer

Cette expression résume une préoccupation constante dans le magistère du pape François. En matière de mission, ce qui lui importe, ce n’est pas le prosélytisme, mais l’attraction ; ce n’est pas la colonisation, mais la présence respectueuse des peuples et de leurs cultures ; ce n’est pas le cléricalisme, mais le témoignage de tous les disciples du Seigneur ; ce n’est pas une doctrine, mais la rencontre avec une Personne. En d’autres termes, il s’agit d’une action divine, et non simplement humaine.

En mettant l’accent sur le contexte, le pape François entend attirer l’attention sur certains phénomènes préoccupants qui caractérisent la société actuelle, tels que la prolifération de nouveaux mouvements religieux (qui semblent proposer une spiritualité sans Dieu), la sécularisation des cultures urbaines (qui tend à réduire la foi à la sphère privée et intime) et l’individualisme exagéré (qui affaiblit de plus en plus les liens communautaires).

Connaître en profondeur ces phénomènes pour les combattre, tel est le défi des missionnaires d’aujourd’hui. Cela correspond à l’urgence de ” l’inculturation de l’évangile”. Il s’agit de “déconstruire pour reconfigurer”, c’est-à-dire de remodeler la société.

La sainteté de la vie du missionnaire

Le Pape François stigmatise les phénomènes qui “étouffent la joie de la mission” et “volent notre enthousiasme missionnaire”, le pessimisme stérile et la mondanité spirituelle (cf. EG 81-101). Il insiste surtout sur le danger de la mondanité spirituelle, qui consiste à rechercher sa propre gloire au lieu de celle de Dieu, ses propres intérêts au lieu de ceux du Christ (cf. EG 93-97). En réalité, la mondanité spirituelle est une attitude qui se nourrit de l’attrait du subjectivisme, qui consiste à confier la mission à ses propres forces et à sa propre capacité d’organisation, plutôt qu’à l’action de l’Esprit Saint.

 

En conclusion, la vision de la mission en tant que “réalité multiforme” reconnaît l’action mystérieuse et surprenante de l’Esprit, qui accorde ses dons à des personnes différentes, sans exclure les laïcs, et soutient des sensibilités différentes pour l’édification et le bien commun de tous.

Au lieu de se lier à un modèle préétabli, la mission exige aujourd’hui la capacité d’interaction réciproque et de dialogue constant entre différents modèles : la richesse vient précisément de la variété des modèles de mission, surtout en ce début de siècle, fortement marqué par l’intolérance et le fondamentalisme.

Aucun modèle, pris individuellement, ne peut contenir toute la richesse de la réalité de la mission de l’Église dans le monde. La pluralité des modèles et la contribution du Pape François à la “reconfiguration missionnaire” de l’Église sont également importantes dans la perspective de l’ouverture au multiculturalisme, un processus qui a commencé dans l’Église et qui deviendra de plus en plus intense dans les années à venir, comme nous le vivons également au sein de notre Petite Compagnie.

Un nouveau scénario se profile déjà à l’horizon : le 21e siècle ne verra pas de missionnaires venant principalement du monde occidental, européen et américain, comme par le passé, mais des missionnaires issus des jeunes Églises, en particulier d’Afrique et d’Asie. De la capacité à opérer efficacement dans ce nouveau scénario dépendra l’avenir de notre mission ad gentes !

 

[1] Cf. Chantal DELSOL, La fine della Cristianità e il ritorno del paganesimo, Cantagalli 2022, pp., 112-113.

[2] FRANCESCO, Discorso ai fedeli della Diocesi di Roma, 18 settembre 2021.

[3] FRANCESCO, Discorso del santo padre Francesco ai partecipanti all’incontro delle associazioni di fedeli, dei movimenti ecclesiali e delle nuove comunità,16 settembre 2021.

[4] Evangelium Gaudium, 27.

[5] Manuel Augusto FERREIRA, Modelli di missione. La riconfigurazione della missione con papa Francesco. Edizioni Messaggero, Padova 2023.

[6] Voir F. GONZÁLEZ FERNÁNDEZ, Il Movimento Missionario del secolo XIX e il mondo neo-africano, in ID, Daniela Comboni e la rigenerazione dell’Africa, Urbaniana University Press, Roma 2003, pp. 37-79

[7] Manuel Augusto FERREIRA, Modelli di missione…, cit., p. 59.

[8] FRANCESCO, Messaggio alle Pontificie Opere missionarie , 21 maggio 2020.

[9] EG 273.

[10] EG 265.

[11] Voir FT 9-55 ; 56-86 ; 271-284.

[12] Cf. Manuel Augusto FERREIRA, Modelli di missione…, cit., p. 103.

[13] Cf. GS 1-2.

[14] FRANCESCO, Discorso ai fedeli della diocesi di Roma, 18 settembre 2021.

[15] Voir FT 9-55.

[16] Voir FT 199-224.

[17] Voir FT 271-287.

[18] Manuel Augusto FERREIRA, Modelli di missione…, cit., p. 123.

[19] Cf. FT 18, 86, 133, 152, 187.

[20] Voir, par exemple, A. PIERIS, Una teologia asiatica di liberazione, Cittadella, Assisi 1990.

[21] Voir par exemple J.-M. ELA, , Il grido dell’uomo africano. Domande ai cristiani e alle Chiese dell’Africa, L’Harmattan, Torino 2001.

[22] Manuel Augusto FERREIRA, Modelli di missione…, cit., pp. 156-157..

[23] Ib., p. 157-158.

[24] Ib. pp. 165-166.

[25] LS 216, qui renvoie à EG 261.

[26] EG 46.